Le Testament Des Templiers
qu’on puisse la boire.
À la lumière des lampes vacillantes, il continua à chanter, assit le garçon, et demanda à son père d’écarter ses lèvres sèches suffisamment pour pouvoir lui faire absorber une petite quantité de liquide. Le garçon toussa et donna des coups de pied. Tal attendit et lui en redonna un peu. Puis encore un peu. Jusqu’à ce que l’enfant en ait absorbé une bonne dose.
Le garçon fut étendu sur le sol, enveloppé dans sa peau, et les hommes se mirent autour de lui, deux espèces se partageant une seule terre, unies par le désir commun de sauver un minuscule petit être.
Tal chanta pendant des heures.
On dut apporter de nouvelles lampes.
Pendant toute la nuit, les nouvelles furent relayées aux deux clans rassemblés sur la saillie de chaque côté de l’entrée de la grotte, qui se tenaient toujours sur leurs gardes. Tala sortait et annonçait au clan des bisons que l’enfant gémissait, ou vomissait, ou dormait enfin calmement. Uboas forçait son petit-fils à manger des morceaux de viande séchée avant de retourner précipitamment près de son grand-père.
Quand la première lumière du jour apparut à l’extérieur de la grotte, l’enfant paraissait aller mieux. Il leva la tête tout seul pour boire de l’eau. Tal fit savoir qu’ils allaient quitter la grotte, car la guérison était en cours. Le père du garçon grommela son approbation.
Puis ce fut la catastrophe.
La salle se remplit soudain d’une odeur fétide : brusquement, on entendit le ventre de l’enfant gargouiller, et il se vida complètement. Il poussa un soupir aigu, et il cessa simplement de respirer.
Abasourdis, les hommes contemplaient en silence le corps sans vie.
Le père de l’enfant s’agenouilla et le secoua pour le réveiller. Il cria quelque chose, et Kek lui cria quelque chose en retour. À son ton, Tal comprit que son fils essayait de prévenir un désastre.
Osa se leva lentement. Dans la faible lumière des lampes sifflantes, ses yeux enfoncés étaient devenus étonnamment brillants. Puis il poussa un hurlement à glacer le sang qui paraissait venu d’un autre monde, un mélange de cri humain et de rugissement animal, qui paralysa tous les autres hommes.
Pour quelqu’un de massif, il se déplaçait comme un lion. En un éclair, il prit le bol de pierre de Tal dans sa main puissante. Ni Tal ni personne n’eut le temps de réagir. Il aperçut à peine une forme sombre quand le bras du Néandertalien décrivit un arc de cercle et lui assena un coup derrière l’oreille.
Le monde devint soudain brillant, comme si le soleil avait déserté le ciel pour traverser toutes les salles de la grotte jusqu’à la dernière.
Il était à quatre pattes par terre.
Il prit conscience des cris au loin, du son du silex entamant les chairs, de grands hurlements de douleur et de guerre.
Il entendit le bruit d’hommes en train de tomber, le bruit sourd de la mort.
Il souleva la tête.
L’homme-oiseau se dressait au-dessus de lui, son bec fièrement ouvert.
Je vais m’envoler, pensa-t-il. Je vais m’envoler pour toujours.
Sa tête était trop lourde pour qu’il puisse la lever. Il semblait y avoir quelque chose sur le sol. Il s’efforça de regarder de plus près malgré la douleur et le brouillard qui obscurcissait son esprit et la faible lumière.
C’était le petit bison en ivoire, tombé du sac qu’il portait à la ceinture.
Il tendit la main pour le prendre tandis qu’il formulait ses dernières pensées.
Le clan des bisons.
Uboas.
Tala fut le seul à sortir de la grotte vivant. C’est lui qui tua Osa en lui fracassant la tête contre le mur. Kek fut frappé par son propre frère, et Mem tué par un des Néandertaliens. Dans cet espace confiné, les hommes s’affrontèrent au couteau et donnèrent du pied et de la gouge jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une masse d’hommes ensanglantés. Tala avait le bras cassé. Était-ce d’avoir donné des coups ou d’en avoir reçu ? Il n’en savait rien. Tal était mort. Le Peuple de l’Ombre avait attaqué. Ils devaient se venger.
Rapidement et avec la plus grande brutalité, les hommes du clan des bisons s’abattirent sur les Néandertaliens terrifiés. Comme ils avaient été contraints de laisser leurs lances au camp, il ne fallut pas longtemps pour que chacun d’entre eux, chaque homme, femme et enfant soit transpercé ou jeté du haut de la saillie. Ils s’étaient appelés le Peuple de la Forêt. Ils
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