Le Testament Des Templiers
entendait par là. S’agissait-il de lui ? De Ruac ? De leur couple ?
« Je n’en sais rien, répondit-il d’un ton vague. À quoi penses-tu ?
– Je pense que ces quelques semaines ont été complètement folles », dit-elle.
Elle buvait la bière corsée plus vite que lui.
« Je ne sais pas pour toi, mais moi, j’ai besoin d’un bon bain et de quelques jours de répit avec un gros roman, histoire de me changer les idées et de penser à autre chose qu’au pollen et à l’art rupestre.
– Tu veux dire à ce qui se passera après-demain ? »
Elle acquiesça.
« Après-demain. Je me demande ce que Fred a trouvé et pourquoi il faisait tellement de mystères. »
Luc haussa les épaules.
« Je m’attends à tout. Nous le saurons bien assez tôt. »
Elle en revint à sa question initiale.
« Donc, après-demain, que vas-tu faire, toi ?
– Toujours la même chose, je suppose. Je vais retourner à Bordeaux, retrouver mon bureau, mon labo, mes dossiers. Nous avons rassemblé une somme incroyable de données. Tout ça doit être trié, coordonné. »
Il regarda par la fenêtre, en s’efforçant de voir la rivière.
« La ministre attend un rapport. Nous devons prévoir l’ouverture officielle de la grotte, tu sais. Ma boîte e-mail déborde de messages de la part de chaînes de télévision françaises, britanniques, américaines, qui veulent toutes les droits des premiers documentaires. Ensuite, il y a le manuscrit. Il n’est pas complètement traduit. Je dois prendre contact avec la secrétaire d’Hugo pour qu’elle me mette en relation avec son déchiffreur belge. Il y a des millions de choses auxquelles il faut penser. »
Elle aussi regardait la fenêtre. C’était plus confortable de se regarder par reflet interposé.
« Nous devrions rester en contact. Professionnellement. Tu vois ce que je veux dire. »
Quelque chose dans ses propos ou la manière dont elle s’exprima eut le don de l’attrister. Était-ce une façon d’ouvrir la porte ou de la refermer ? Bien sûr qu’il la désirait. Elle était ravissante. Mais quand elle était à lui autrefois, il l’avait froidement rejetée. Pourquoi les choses seraient-elles différentes à présent ?
Il but sa bière d’un trait pour éviter de répondre, et suggéra qu’ils aillent se reposer un peu avant leur réunion du lendemain.
Le centre de Cambridge était pratiquement désert. Ils remontèrent en silence Mill Lane en direction des façades sur rue de Pembroke College, et, en tournant dans Trumpington Street, Luc remarqua une voiture garée de l’autre côté du terrain de football qui allumait ses phares.
Il n’y prêta pas davantage attention jusqu’à ce que la voiture accélère dans leur direction et emprunte la mauvaise voie.
La fraîcheur de la nuit ajoutée à la brusque montée d’adrénaline dissipa en un instant les vapeurs de la bière dans son cerveau. Malgré la brièveté des événements qui s’ensuivirent, cinq ou six secondes tout au plus, tout lui parut étonnamment clair, comme si les choses se déroulaient au ralenti – et cette étrange lucidité leur sauva probablement la vie.
La voiture fonçait droit sur eux.
Quand elle monta sur le trottoir à quelques mètres à peine de leurs jambes, avec deux roues sur le trottoir et deux roues sur la chaussée, Luc avait déjà attrapé Sara par la manche de son blouson en cuir et l’envoyait valser au loin de toutes ses forces. Elle alla valdinguer sur la route comme une toupie.
Il en fit autant, et, au moment de l’impact, l’aile de la voiture lui heurta la hanche. À un ou deux centimètres près, il aurait pu avoir le bassin fracturé.
Il trébucha sur la chaussée, tourna sur lui-même et atterrit suffisamment près de Sara pour que tous les deux puissent instinctivement rapprocher leurs mains et essayer de se toucher.
La voiture arracha des étincelles à la façade en calcaire d’une résidence de Pembroke College, enfonça un tuyau de descente d’eau, et retomba sur la route où elle s’éloigna à toute vitesse en faisant crisser ses pneus.
Luc et Sara étaient étendus au milieu de la rue, se tenant par la main.
« Tu vas bien ? demandèrent-ils tous les deux en même temps.
– Oui », répondirent-ils en même temps.
Quatre heures s’écouleraient encore avant qu’ils ne puissent se coucher.
Outre les déclarations à faire à la police, il y eut les premiers secours à recevoir de la part des
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