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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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une faute que vous n’avez pas commise.
    — Pourtant, sire, je supplie le roi de me faire ramener dans ma prison.
    Louis XVI interrompit son petit repas si joyeusement commencé, repoussa son assiette et regarda Gilles avec une réelle stupeur.
    — Vous voulez y retourner ? Ah çà, monsieur, vous perdez l’esprit ? Et pour quoi faire, s’il vous plaît ?
    — Pour y sauver la vie de mon épouse. Si le roi me libère, en me déclarant aussi hautement hors de cause, elle mourra…
    Louis XVI poussa un soupir à éteindre les chandelles et regagna son fauteuil.
    — Qu’est-ce encore que cette histoire ? Racontez, racontez ! Nous nageons en plein délire et puisqu’il est écrit que nous finirions la nuit ensemble, apprenez-moi ce nouveau mystère.
    Tournemine s’exécuta. Le plus calmement qu’il put il relata la visite du comte de Modène dont le nom, au passage, arracha au roi une exclamation de colère qui ne fit que croître à mesure que se déroulait le récit du jeune homme. Quand il en vint à sa décision de mourir pour ôter à Provence tout motif de s’en prendre à la vie de Judith, Louis explosa.
    — Dites-moi, chevalier, me prenez-vous pour un si pauvre sire ? Ne suis-je pas le roi ? Si je déclare qu’il n’y a pas de quoi fouetter un chat dans cette histoire de sachet rouge, si j’ordonne à mon frère de rendre immédiatement sa liberté à Mme de Tournemine…
    — Monsieur niera avec hauteur la détenir en sa maison. D’ailleurs dans laquelle, en admettant que ce soit bien l’une des demeures de Son Altesse ? Et pendant qu’on la cherchera il exercera sur elle sa vengeance, ou plutôt la livrera à la vengeance d’une femme qui se croyait des droits sur moi. Non, sire, je remercie le roi du fond du cœur, mais il faut qu’il m’abandonne à mon sort et…
    — Et moi je dis que vous êtes fou, que j’aime votre service et que j’entends vous garder en vie ! Je ne veux ni que vous mourriez, ni vous laisser pourrir des années à la Bastille.
    — Il faut pourtant que je meure, sire… ou que je passe pour mort ! fit Tournemine en qui une idée commençait à se faire jour. Je ne peux supporter l’idée de savoir en danger la femme que j’aime.
    — Qui la supporterait ?
    Puis, changeant brusquement de ton :
    — Où vous a-t-on logé, à la Bastille ?
    — … Dans la tour de la Bazinière, je crois, sire.
    — Comme l’on fait pour les nouveaux venus auxquels on n’a pas encore attribué de prison définitive. Eh bien, l’on va vous trouver très vite une autre chambre, il ne faut pas que vous restiez à la Bazinière… Prenez ce flambeau et venez avec moi.
    Renonçant momentanément à comprendre, Gilles prit le candélabre et quitta le cabinet de géographie à la suite du roi. Sur le palier, Winkleried montait toujours sa garde et les regarda passer en s’efforçant de dissimuler la joyeuse surprise qui lui causait leur double apparition.
    — Veillez à ce que personne n’entre ici ou ne monte aux étages, monsieur, lui lança le roi en se dirigeant vers l’escalier.
    L’un derrière l’autre, Louis XVI et Tournemine gagnèrent le quatrième palier du Degré. C’était le dernier étage du palais. Au-dessus, il n’y avait plus que le belvédère dans lequel le roi-savant avait son télescope. Tout était obscur dans cette partie des petits appartements où le roi seul entrait. La chaleur encore forte pour la saison, qui avait régné durant tout ce jour de septembre, semblait s’y être condensée car toutes les fenêtres étaient soigneusement closes et, avant même que Louis n’eût ouvert la porte qui menait à sa forge, les deux hommes étaient déjà inondés de sueur.
    Ce n’était pas la première fois que Gilles pénétrait dans le domaine le plus privé du roi. Il avait déjà eu les honneurs de l’atelier de serrurerie quand Lauzun, au retour d’Amérique, l’avait lui-même présenté au roi. Il y avait reçu un accueil qui lui avait été droit au cœur et il retrouvait avec plaisir l’odeur de charbon, d’acide et de ferraille qui régnait dans la grande pièce, obscure à cette heure de nuit.
    La lumière qu’il tenait au poing fit surgir de la nuit les rangées d’outils bien ordonnés, la forme fantastique du soufflet et de la forge éteinte avec leurs chaînes de tirage, l’établi avec son étau dont les mâchoires puissantes retenaient une serrure commencée. Plus loin, sur des rayonnages, il y avait des

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