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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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de nouveau dans la vieille forteresse de Charles V. Lorsque la portière s’ouvrit devant lui, Gilles vit qu’il faisait beau et qu’un encourageant rayon de soleil plongeait jusqu’au fond de ce puits noir que constituait la grande cour, irradiant une brume qui annonçait la chaleur.
    Pour la première fois, l’officier qui l’avait accompagné ouvrit la bouche :
    — Vous voilà chez vous, monsieur, fit-il avec un sourire qui donna au prisonnier l’envie irrésistible de lui aplatir la figure mais il se souvint à temps qu’il avait autre chose à faire et qu’en fait de prison sous les toits, il risquait alors de se retrouver dans un cachot à six pieds sous terre. Et puis l’animosité des soldats de la Prévôté envers le régiment privilégié des gardes du corps ne datait pas d’hier. Visiblement, ce bonhomme avait éprouvé l’une des douces joies de sa vie en en trouvant un à la Bastille.
    Il retourna son sourire mais en plus venimeux.
    — Quelle joie ! Vous n’imaginez pas la hâte que j’avais de m’y retrouver. La Bastille est ce qu’elle est mais elle ne sent pas mauvais…
    Et, tournant le dos au personnage, il adressa un salut plein d’urbanité au chevalier de Saint-Sauveur qui approchait pour le reconduire dans sa chambre.
    Le soupir que poussa Pongo en le voyant reparaître lui donna la pleine mesure du souci que celui-ci s’était fait à son sujet. Après avoir scruté attentivement le visage mal rasé du jeune homme, il se mit à palper ses bras et ses jambes.
    — Rassure-toi ! fit Gilles en riant. Je suis entier. On ne m’a pas mis à la torture. J’ai seulement fait un petit voyage…
    Il attendit que la porte se fût refermée puis, jetant un coup d’œil au guichet derrière lequel il était toujours possible que Guyot fût aux écoutes, il posa vivement un doigt sur ses lèvres et se contenta de murmurer :
    — Tout va bien…
    Puis comme l’Indien, rassuré, allait s’accroupir de nouveau dans son coin préféré, près de la fenêtre, pour reprendre ses incantations préparatoires à une belle mort, il leva la main pour l’arrêter mais se ravisa. Tant qu’ils n’auraient pas mis une certaine distance entre eux et la vieille prison d’État, la mort demeurerait une éventualité assez proche pour mériter que l’on en tînt compte… Laissant donc Pongo à son improvisation, il alla se jeter sur son lit et, sourd aux rauques vocalises de son compagnon, s’endormit presque aussitôt.
    Ce fut vers la fin du jour qu’on tira Tournemine de son bienheureux sommeil en venant le chercher pour le changer de prison. Pongo chantait toujours. Aussi, en passant devant Guyot, le chevalier ne put-il s’empêcher de sourire : le porte-clefs avait la mine défaite d’un homme qui vient de beaucoup souffrir mais dans son œil quelque chose ressemblait à une aurore d’espérance : Dieu l’avait pris en pitié et débarrassé de cet affreux sauvage qui poussait de si affreux cris et qui lui faisait si peur…
    Sous bonne escorte, on descendit donc les trois étages de la Bazinière et l’on gagna la tour de la Liberté, séparée de la première par une autre tour, la Bertaudière. Ces tours, avec une quatrième, la tour du Coin, formaient la façade ouest de la Bastille et regardaient vers la rue Saint-Antoine. Autrefois, d’ailleurs, deux d’entre elles, la Bertaudière et la Liberté, n’étaient rien d’autre que les défenses encadrant l’ancienne Porte Saint-Antoine. Le reste de la forteresse avait été édifié autour.
    Ces énormes cylindres de pierre comportaient en général cinq chambres, une par étage. Seule, la Liberté, ainsi nommée parce qu’en principe, jadis, ceux qu’on y logeait avaient la « liberté » de se promener sur le couronnement ou sur la terrasse, en possédait six.
    La plus élevée, la calotte, fut celle qui accueillit Gilles et Pongo. C’était une pièce octogonale, pavée de briques et dont les huit arcades se rejoignaient en ogive sur un cul-de-lampe. Mais, alors que la hauteur de plafond des autres chambres était d’environ cinq mètres, celle de la calotte était si basse que les deux nouveaux prisonniers durent se baisser pour y entrer et que, vers le centre seulement, Pongo put se redresser complètement. Gilles ne le put pas : il lui manquait cinq bons centimètres.
    En outre, à la manière des Plombs de Venise, il y régnait l’hiver un froid rigoureux et l’été une chaleur de four. Aussi, en

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