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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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qu’il était vraiment cet affreux matin où l’on est venu me dire que tu avais été tué en tentant de t’évader de la Bastille. J’ai senti… que quelque chose mourait en moi, que des fibres inconnues se déchiraient… et que cela faisait très mal. Crois-moi ou ne me crois pas, qu’importe après tout ! Mon amour à moi est né dans la souffrance comme un enfant trop fort qui déchire ses barrières naturelles sur son passage. Plus jamais je ne pourrai le confondre avec les chaleurs de mon ventre. Dieu sait pourtant qu’il ne me laisse guère de repos celui-là, ajouta-t-elle d’une voix basse et rauque qui passa comme une râpe sur les nerfs tendus de l’homme. Jamais je ne t’ai autant désiré !
    Était-elle sincère ? Sans doute. Son joli visage malicieux était transfiguré par la passion et Gilles, frappé en dépit de sa méfiance, ne put s’empêcher de penser qu’il y avait là quelque chose de changé. Il en éprouva une joie assez cruelle, mêlée d’orgueil. S’il savait s’en servir, quelle arme ne serait-elle pas entre ses mains cette femme qui avait tous les secrets, toutes les confidences d’un prince perfide et trouble comme un marais mortel, cette femme qui s’avouait esclave d’un amour imprévu.
    — Fort bien ! soupira-t-il. Je veux bien croire que vous m’aimez, à condition toutefois que vous m’en donniez la preuve puisque vous êtes venue pour cela, dites-vous…
    Instantanément, elle fut contre lui, les lèvres entrouvertes, les yeux déjà noyés, offerte comme le bouquet de roses que son parfum évoquait. Contre sa poitrine, il sentit les battements précipités d’un cœur qui s’affolait. Doucement, alors, il détacha les bras gainés de soie qui se glissaient autour de son cou.
    — Pas comme cela. Ce serait trop facile ! fit-il en écartant prudemment de lui un corps dont il connaissait bien la séduction. Je ne suis pas venu ici… de si loin, pour entendre parler d’amour. Avez-vous oublié les termes de votre lettre ?
    De ses deux mains, elle s’agrippa à son bras.
    — Je n’ai rien oublié, tu le sais bien. Et je suis prête à répondre à toutes les questions que tu voudras me poser. Mais ensuite… ensuite, tu me reprendras, n’est-ce pas ? tu accepteras de m’aimer encore, même si ce n’est que de temps en temps ?
    Ainsi le marché était nettement posé et Gilles commençait à voir clair dans ce rendez-vous qu’il avait cru un piège, qui en était un d’ailleurs d’une certaine façon mais un piège tendu à sa sensualité et non à sa vie. C’était non seulement flatteur mais intéressant puisque la belle Anne, sous la seule condition qu’il redevînt son amant, offrait de trahir Provence.
    — Peut-être…, dit-il seulement, évitant de trop s’engager. Il en sera selon votre franchise.
    Apercevant un peu plus loin un tronc d’arbre couché, il l’y conduisit et l’y fit asseoir tandis que lui-même demeurait debout, un pied posé sur le tronc renversé.
    — Nous serons mieux ici. À présent, madame, je vous écoute…
    1 .  Voir le Gerfaut des brumes , tome I.
    2 .  Voir le Gerfaut des brumes , tome I.
    3 .  Quai de la Mégisserie actuel.
    4 .  Durant sa jeunesse le premier président des États-Unis avait exercé le métier d’arpenteur.

CHAPITRE VI
    UN FILET TISSÉ D’OR ET D’ARGENT…
    Si un reste de méfiance subsistait encore en Tournemine touchant l’importance du complot dirigé contre la famille royale, les premières phrases du récit d’Anne de Balbi le dissipa. Il fallait toute l’infernale astuce de Monsieur pour monter une telle machine.
    L’idée partait d’une vexation princière : le bateau de la reine devant, au cours de son voyage vers Fontainebleau, passer pratiquement sous les fenêtres du château de Sainte-Assise, le vieux duc d’Orléans, poussé bien entendu par la Montesson qui enrageait de n’être point officiellement « reconnue », avait exprimé le désir de voir sa royale cousine accepter, si le temps le permettait, une collation doublée d’un concert champêtre sous les arbres précieux, parés par l’automne d’or et de pourpre, de son admirable parc. Peu désireuse de complaire à la famille d’Orléans, et moins encore de rencontrer une femme en qui elle ne voyait guère plus qu’une aventurière, Marie-Antoinette avait décliné l’invitation, fort gracieusement d’ailleurs, en prétextant qu’un arrêt à Sainte-Assise rognerait trop

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