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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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là ! Je suppose que si vous m’avez donné ce rendez-vous c’est sur son ordre et que…
    — Il n’en est rien. J’en jure l’honneur de ma mère, il te croit vraiment mort.
    — Vraiment ? En ce cas, comment se fait-il que vous ne partagiez pas sa croyance ?
    Brusquement, elle lâcha son bras, s’éloigna d’un ou deux pas, détournant la tête pour qu’il ne pût voir son visage.
    — Peut-être parce que je ne voulais pas le croire, parce que tout en moi refusait ta mort. Alors j’ai voulu en avoir le cœur net, j’ai voulu voir le cadavre que l’on avait retiré, il y a un mois et demi, des fossés de la Bastille.
    — Et on vous l’a montré tout simplement ? Vous entrez à la Bastille comme vous le voulez ?
    — Cela n’a pas été si difficile. Je connais bien le chapelain du château, M. de Faverly. Je suis allée le voir et je lui ai dit que nous avions un lien de parenté, que je souhaitais prier un moment auprès du corps. C’est un saint homme et il a trouvé mon désir bien naturel. J’avais emporté des fleurs et il a bien voulu me conduire lui-même dans la salle basse où le cadavre avait été déposé. Le major Chevalier, qui nous a reçus, voulait m’empêcher d’entrer, disant que c’était un affreux spectacle, beaucoup trop cruel pour une femme… mais j’ai tant insisté qu’il m’a enfin permis d’entrer…
    Elle se tut et enfouit soudain son visage entre ses mains comme pour se préserver d’une abominable vision.
    — C’était atroce !… pire encore que je ne l’avais imaginé ! On m’a dit que ton visage s’était écrasé au pied de la tour quand la balle de la sentinelle t’avait touché. Ce n’était qu’une… immonde bouillie dans laquelle il était impossible de reconnaître le moindre trait.
    L’émotion qui la bouleversait était sincère et la voix de Tournemine s’adoucit un peu pour demander :
    — Comment, dans ce cas, avez-vous acquis la certitude que je n’étais pas ce cadavre ?
    D’un mouvement violent, elle lui fit face de nouveau, levant vers lui un visage inondé de larmes au milieu desquelles les yeux noirs étincelaient, triomphants.
    — Je ne pouvais savoir si c’était ton visage… mais ce n’était pas ton corps ! Ah ! je le connais si bien, ton corps ! Chaque muscle, chaque pouce de ta peau. On avait ôté à l’homme ses vêtements souillés et déchirés. Il était nu sous un drap que j’ai fait glisser d’un geste que mon émotion a sans peine fait passer pour une maladresse. Et j’ai ressenti un grand bonheur… Jamais ce corps-là n’avait possédé le mien, jamais je ne l’avais caressé… Mais, rassure-toi, j’ai bien joué mon rôle. J’ai versé une larme, posé mes fleurs, dit une prière et puis, en donnant tous les signes d’une profonde affliction, j’ai rabattu mon voile sur ma figure parce que j’éprouvais un mal affreux à ne pas éclater de rire, à ne pas montrer la joie folle que j’emportais : j’étais sûre, à présent, que tu étais vivant, que je te reverrais…
    Tournemine se permit un sourire.
    — Très touchant ! Eh bien, madame, vous m’avez revu ? Vous voilà contente, j’espère. Votre petit piège innocent a bien fonctionné…
    — Ce n’est pas un petit piège innocent ! Monsieur a bel et bien l’intention de faire tuer, demain, la reine et ses fils.
    Elle avait jeté au vent de la nuit ces mots terribles d’une voix si sauvage que Gilles, surpris, scruta ce visage tendu où aucune trace d’ironie ou de joie n’apparaissait plus. Un instant, Anne de Balbi et lui se regardèrent au fond des yeux.
    — Et c’est vous, articula-t-il lentement au bout d’un instant, vous, sa maîtresse, qui venez me le dire ?
    — Moi, oui !
    — Pourquoi ?
    — Parce que je t’aime !
    Le mot lui arracha un sourire de dédain et un haussement d’épaules.
    — Vous ne savez même pas de quoi vous parlez ! Je me souviens vous avoir entendu dire que l’amour était une idée stupide et bourgeoise, que seul le plaisir était souhaitable ? Alors, ne confondez pas.
    — J’ai dit tout cela et je ne le renie pas. Le plaisir est une bonne compensation quand le cœur se tait et longtemps j’ai cru qu’il pouvait suffire. À présent, je ne le crois plus.
    — Bravo ! Et c’est à moi que vous devez cette admirable découverte ?
    — Raille si tu veux, moque-toi ! tu n’empêcheras pas que ce ne soit la seule vérité. L’amour, j’ai senti ce

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