Le vétéran

de mouton. Mais le froid traversait leur jean et ils durent se regrouper plus près du feu.
    La température tomba à zéro et continua à baisser. Dans le ciel, les adjoints du shérif virent de gros nuages estomper les pics des montagnes.
    Très haut sur un versant du mont Rearguard, ils aperçurent la brève étincelle d'un feu, qui ne tarda pas à disparaître. Ces hommes avaient beau être natifs du Montana, habitués aux hivers rigoureux, on n'était jamais que fin octobre, trop
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    tôt pour un temps pareil. ¿ une heure les gardes forestiers estimèrent la température à moins vingt, et elle descendait toujours en flèche. ¿ deux heures tout le monde était debout. H n'était plus question de dormir, et les hommes battaient la semelle pour faire circuler le sang, alimentant en vain leur feu d'énormes fagots de branchages. La neige commença à tomber en flocons plats, affaiblissant le feu o˘ ils se posaient en sifflant. Le chef des gardes forestiers s'approcha du shérif en claquant des dents.
    - Cal et moi, on est d'avis d'aller se mettre à l'abri dans le parc national.
    - Vous croyez qu'il y fera meilleur ?
    - C'est possible.
    - Bon Dieu, mais qu'est-ce qui se passe par ici ?
    - Si je vous le dis, vous me prendrez pour un dingo, shérif.
    - Faites-moi ce plaisir.
    La neige tombait plus dru et les étoiles s'étaient éteintes. Un désert blanc et glacé les encerclait peu à peu.
    - Nous nous trouvons à l'endroit o˘ les terres des Indiens Crows rencontrent le territoire de la nation shoshone. Il y a très longtemps, des guerriers ont combattu et ont péri ici, avant l'arrivée de l'homme blanc.

    Les Indiens croient que leurs esprits continuent à hanter les montagnes.
    Ils pensent que c'est un lieu enchanté.
    - Charmante tradition ! Mais quel rapport avec ce fichu temps?
    - Je vous ai prévenu que c'était une histoire dingue. Ds prétendent que le Grand Manitou vient quelquefois par ici, et qu'il apporte le Froid du Grand Sommeil, un froid auquel personne ne peut survivre. Bien entendu, il s'agit simplement d'une anomalie climatique, mais je crois quand même qu'on devrait s'en aller. Si on reste ici, on sera gelés d'ici demain matin.
    Après quelques instants de réflexion, le shérif hocha la tête.
    - Sellez les chevaux, on s'en va d'ici. Prévenez Braddock et ses hommes.
    Au bout de quelques minutes, les gardes forestiers reparurent dans le blizzard.
    - H dit qu'il va se mettre à l'abri au bord de la rivière mais qu'il n'ira pas plus loin. Grelottant de froid, les gardes, le shérif et ses adjoints retraver-347
    sèrent à cheval le Silver Run Plateau pour regagner les épaisses pinèdes de la forêt. Là, la température ne tombait pas en dessous de zéro. Us allumèrent de nouveaux feux de camp et eurent la vie^sauve.
    ¿ quatre heures et demie, le manteau blanc qui couvrait les montagnes se détacha pour dégringoler vers la plaine, tel un raz de marée puissant et silencieux qui se déplaça comme une muraille sur la roche, avant de s'abîmer dans le cours d'eau qu'il combla entièrement. Il roula sur un demi-mile à travers le Silver Run et finit par s'immobiliser. Le ciel commença alors à se
    dégager.
    Deux heures plus tard, le shérif se posta en lisière de la forêt et regarda vers le sud. Les teintes rosées de l'orient annonçaient une journée lumineuse et le ciel indigo virait au bleu canard. Toute la nuit, Lewis avait gardé sa radio sur lui pour la réchauffer, et c'avait été efficace.
    - Jerry, appela-t-il, on a besoin de vous et du Jetranger dans les plus brefs délais. H y a eu du blizzard et ça ne va pas fort... Non, on est revenus en bordure de la forêt, là o˘ vous avez évacué l'homme de main de Braddock hier. Vous nous trouverez
    là.
    L'appareil à quatre places approcha en tournoyant dans le ciel matinal et se posa sur les rochers glacés, que la neige n'avait pas recouverts. Lewis casa deux de ses hommes à l'arrière et s'installa à côté du pilote.
    - Revenez dans les montagnes.
    - Et notre tireur d'élite ?
    - ¿ mon avis, personne ne risque de nous tirer dessus en ce moment. Bien beau s'ils sont toujours en vie.
    L'hélicoptère refit le trajet que le petit groupe avait accompli la veille.
    Lake Fork ne se signalait que par les cimes des pins et des mélèzes. Aucune trace par contre des cinq hommes qui s'y trouvaient. L'appareil continua à
    voler vers la montagne. Le shérif cherchait l'endroit o˘ il avait aperçu l'étincelle d'un feu de camp