L'empereur des rois
entrent le 26 octobre 1806 dans Berlin, que celles de Murat marchent vers Stettin, Napoléon, après avoir reçu des mains du prince Hatzfeld les clés de Berlin, se dirige vers le château de Charlottenburg, dans les environs de la capitale de la Prusse.
La pluie tombe. Les chemins sont détrempés. Il s’égare, perd son escorte, se retrouve seul dans la campagne battue par l’averse.
Devant la porte du château, il aperçoit Ségur qui tente en vain d’ouvrir la porte.
— Pourquoi n’avez-vous disposé aucune troupe sur mon passage ? crie-t-il. Pourquoi êtes-vous sans aucune garde ?
La porte cède enfin. Le château est vide. Napoléon découvre les appartements de la reine Louise, et, dans une coiffeuse, les lettres de la souveraine.
Il les feuillette. Il rit.
Il a le sentiment d’avoir conquis cette femme.
1 - Napoléon-Charles, le « Napoléon » de cette lettre, fils d’Hortense et Louis Bonaparte, est né en 1802. Il mourra en 1807. Le « petit » est son frère Napoléon-Louis, né en 1804, mort en 1831. Le dernier fils du ménage sera Charles-Louis, né en 1808 et mort en 1873, le futur Napoléon III. Un demi-frère né de la liaison entre la reine Hortense et Flahaut est né en 1811. Il portera le titre de duc de Morny et mourra en 1865.
4.
Il a peu dormi. Ce lundi 27 octobre 1806, il voit, dans la cour du château de Charlottenburg, les chasseurs de la Garde qui commencent à se rassembler. Ils lui serviront d’escorte pour son entrée dans Berlin, aujourd’hui.
Il veut une parade militaire qui frappe les esprits. Un véritable triomphe. Déjà il a exigé que les gendarmes nobles prussiens, qui avaient aiguisé leurs sabres sur les marches de l’ambassade de France, traversent Berlin, prisonniers entre deux colonnes de soldats français, afin qu’on les punisse de leur jactance !
Hier soir, il a dit à Daru, l’intendant général de la Grande Armée, qu’il fallait s’emparer de tout l’argent qu’on trouverait à Berlin afin de le verser dans les caisses du payeur de l’armée.
— Mon intention est que Berlin me fournisse abondamment tout ce qui est nécessaire pour mon armée, a-t-il poursuivi, pour que mes soldats soient dans l’abondance de tout.
Puis il a entraîné Daru dans les appartements de la reine Louise. Il a montré les papiers qu’elle avait laissés. Ce n’était pas, comme il l’avait imaginé un instant, une correspondance amoureuse, mais des pièces montrant la détermination de la reine à déclencher la guerre.
— Contre moi, Daru, contre nous.
Elle appelle Napoléon Noppel , et son perroquet prononce Moppel , ce qui signifie en argot berlinois : « petit roquet vantard ». Elle écrit cela.
Il a même trouvé dans ses papiers un rapport de Dumouriez, oui, le vainqueur de Brunswick à Valmy, sur la tactique à employer pour battre les troupes françaises.
— Malheureux les princes qui laissent prendre aux femmes de l’influence sur les affaires politiques ! s’est exclamé Napoléon.
Ce lundi, il fera beau.
Il regarde les régiments se former. Ces hommes espèrent en avoir fini avec les marches, les bivouacs, les combats. Ils ont échappé à la mort. Ils rêvent de paix. Ils ne savent pas que la paix se conquiert. Les Prussiens attendent les Russes qui avancent, dont les rapports précisent qu’ils ont traversé la Vistule, qu’ils sont entrés dans Varsovie. Faut-il aider les Polonais qui veulent leur indépendance ? Mais qu’est-ce que vouloir ? Napoléon l’a dit à Dombrowski, ce Polonais qui voudrait que la France fasse renaître son pays : « Je verrai si vous méritez d’être une nation. » « Si la Pologne fournit quarante bons mille hommes de troupe sur lesquels on puisse compter comme si l’on avait un corps de quarante mille hommes de troupes réglées », alors c’est que les Polonais voudront vraiment leur indépendance. Sinon…
Et aider les Polonais, c’est ouvrir la boîte de Pandore : la guerre à n’en jamais finir avec les Russes et sans doute les Autrichiens. Et derrière eux, l’Angleterre, l’âme damnée des coalitions, le banquier des puissances, celle qu’il faut briser si l’on veut un jour obtenir la paix.
On annonce l’arrivée du général Zastrow, qui demande une audience de la part de Frédéric-Guillaume. Le roi de Prusse sollicite un armistice et l’ouverture de négociations.
— Les Russes sont-ils déjà sur le territoire prussien ? répond
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