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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sur le joli panorama du fleuve, ses ponts chargés de maisons à toits aigus, l’enfilade des clochetons et des girouettes, et en perspective, dans la grande lumière pure et chaude de ce matin d’août. Notre-Dame dont le soleil rosait les tours.
    Nul n’eût reconnu dans ce petit bourgeois souriant et heureux l’homme qui venait de se débattre dans une crise affreuse contre des visions formidables, le roi qui venait de décréter l’hécatombe des huguenots…
    Il remonta le cours de la Seine, puis tourna à gauche, atteignit la rue des Barrés et pénétra dans la maison de Marie Touchet.
    C’est là qu’après ces terribles accès qui faisaient de lui tantôt une misérable loque humaine, tantôt un fou furieux, c’est là qu’il venait chercher le repos réparateur ; c’est là, lorsqu’il sentait son âme empoisonnée par l’air du Louvre, qu’il venait respirer en liberté ; c’est là qu’il venait trouver l’apaisement et la douceur, lorsque quelque terrible scène l’avait mis aux prises avec sa mère.
    Lorsque le roi eut été introduit dans l’appartement de Marie Touchet, il s’arrêta dans l’encadrement de la porte, émerveillé par le spectacle qu’il avait sous les yeux : Marie Touchet, assise près d’une fenêtre dont les châssis levés laissaient entrer à flots l’air et la lumière, était en déshabillé du matin. Son sein était nu. Et à ce sein se suspendait l’enfant rose, joufflu, ses deux petites mains pressant le beau sein blanc qu’il tétait assidûment, ses jambes en l’air se livrant à une gymnastique de satisfaction ; il se frottait les pieds comme on se frotte les mains. Marie le contemplait en souriant. Elle avait l’air de dire : Est-il glouton ! Bois mon petit, bois sans crainte le bon lait de ta mère… Charles ne bougeait pas…
    Enfin, l’enfant, repu sans doute, s’endormit tout à coup, une goutte de lait au coin des lèvres.
    Alors Marie Touchet se leva et le déposa doucement dans le berceau.
    Et elle demeura là, le visage plein d’admiration.
    A ce moment, Charles s’avança sans bruit, la saisit par derrière dans ses bras et lui mit ses deux mains sur les yeux, en riant comme un gamin qui fait une bonne farce.
    Marie le reconnut aussitôt, mais se prêtant au jeu de son amant, elle s’écria dans un joli rire :
    – Qui est là ? Quel vilain m’empêche de voir monsieur mon fils ? Ah ! c’est trop fort, je m’en plaindrai au roi…
    – Plains-toi donc ! fit Charles en ôtant ses mains et en se reculant, car voici le roi.
    Et Marie se jetant dans ses bras lui tendit ses lèvres en disant :
    – Mon cher seigneur, le premier baiser pour moi… Et maintenant, monsieur votre fils, ajouta-t-elle lorsque Charles l’eut embrassée.
    Le roi se pencha sur le berceau. Marie était près de lui, penchée aussi.
    Les deux têtes se touchaient.
    Toutes les deux exprimaient la même admiration naïve qui, chez le roi, se nuançait d’étonnement… Quoi ! ce petit être si fort, si beau, c’est mon fils !… Le roi était perplexe… Il cherchait une place pour embrasser le petit sans l’éveiller, et finalement, n’osant pas, chercha les lèvres de Marie en disant :
    – Tiens, donne-lui ce baiser… je pourrais lui faire mal, moi…
    Marie Touchet déposa doucement ses lèvres sur le front de l’enfant.
    Puis, tous deux se relevant, gagnèrent sur la pointe des pieds la salle à manger où le roi se jeta dans un fauteuil en disant :
    – Je tombe de sommeil et de fatigue…
    Marie Touchet s’était assise sur ses genoux et caressait doucement les cheveux de Charles.
    – Raconte-moi tes peines, disait-elle. Comme tu es pâle !… Qui t’a encore tourmenté ?… J’espère que tu n’as pas eu de crise, au moins ?… Mon bon Charles… raconte à ta petite amie…
    – Eh bien, oui, Marie, j’ai encore eu une crise, et elle a été terrible… Ce qui est affreux, vois-tu, c’est qu’il y a quelque chose de nouveau dans mon mal… Autrefois, tu te rappelles, c’était court… Je souffrais beaucoup, c’est vrai, mais la crise passée, je redevenais moi-même. Maintenant, je sens que mon esprit est atteint… ma cervelle se détraque… lorsque je sens la crise venir, il entre en moi comme un souffle de haine furieuse contre l’humanité… Dans ces minutes-là, je voudrais détruire tout ce qui m’entoure, mettre le feu à Paris comme je t’ai dit que cet empereur fit de Rome, frapper, tuer… Ah ! Marie, on

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