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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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lorsque je fus tout près d’elle, Jeanne d’Albret tourna vers moi sa tête convulsée par l’agonie, murmura distinctement : « Prends garde, mon enfant, prends garde !… Ecoute… il faut que tu saches… » Que voulait me dire la reine ? Quel terrible secret allait s’échapper de ses lèvres crispées ? Je ne le saurai jamais, chevalier ! Car à ce moment, la reine entra en agonie… Elle faisait de violents efforts pour me parler, mais aucune parole ne sortit plus de sa bouche… Seulement, tout à coup, son regard se fixa avec une effrayante expression sur la cheminée… puis, une légère secousse l’agita… puis ce fut fini, la reine était morte… morte… et son regard semblait encore s’attacher à cet objet que, dans la seconde suprême, elle avait cherché des yeux…
    Marillac se tut.
    A travers ses doigts crispés sur ses yeux, des larmes s’échappèrent.
    – Mon cher comte, dit Pardaillan, pardonnez-moi d’avoir ramené vos pensées vers ces pénibles scènes… Vous étiez si heureux tout à l’heure… Mais, dites-moi… pouvez-vous me dire quel était cet objet que la reine regardait en mourant ?
    Marillac alla à une armoire dont il portait la clef sur lui et, l’ouvrant, il en tira un coffret d’or qu’il posa sur une table.
    – Ce coffret, chevalier, m’a été donné par une personne auguste. Je l’avais à mon tour offert à la reine de Navarre qui s’en servait pour y mettre ses gants… Sans aucun doute, la pauvre reine, en mourant, a voulu me dire de reprendre ce coffret qui se trouvait sur la cheminée de sa chambre et de le garder comme un double souvenir… le souvenir de mes deux mères.
    – Ainsi, dit lentement le chevalier, c’est la reine Catherine qui vous a donné ce coffret ?
    – Oui, mon ami, dit Marillac en frissonnant.
    Les deux hommes se regardèrent.
    Et sans doute chacun d’eux put lire chez l’autre la pensée terrible qui l’agitait, car tous les deux pâlirent et détournèrent les yeux.
    Marillac demeurait tremblant, les mains crispées sur le coffret d’or. Il baissa la tête. Et soudain, le mystère de sa pensée monta jusqu’à ses lèvres, comme s’il n’eût pu le contenir davantage. Hagard, livide, il murmura :
    – Mon sang… je le donnerais jusqu’à la dernière goutte… pour savoir la vérité… oh ! chevalier… cette vérité… ce lamentable soupçon qui est dans mon cœur comme un ulcère… ce n’est pas vrai, dites ? Ce n’est pas possible !… Ce serait trop horrible que ce coffret ait été l’instrument de mort… que Catherine, ma mère, ait tué Jeanne, mon autre mère… et que moi… moi… leur fils à toutes deux… aie porté à l’une le poison que lui envoyait l’autre !
    – Comte ! comte ! s’écria le chevalier, vous avez raison… ce serait trop horrible… Et pourtant… tenez, laissez-moi vous répéter la parole suprême de la reine de Navarre : Prenez garde !… renfermez ce coffret… n’y touchez plus…
    – Ah ! puissé-je donc être foudroyé plutôt que de continuer à porter de tels soupçons dans mon esprit !… Je rêve, mon ami… c’est un rêve insensé, hideux… Catherine ne peut avoir conçu de pareilles horreurs… Catherine m’aime… j’en suis sûr… elle souffre de ne pouvoir proclamer sa maternelle affection… elle est ma mère… ma mère !…
    En parlant ainsi, Marillac avait ouvert le coffret avec une sorte de rage désespérée.
    Dans le coffret, il y avait une paire de gants blancs – ceux que portait Jeanne d’Albret la nuit de sa mort.
    Il les saisit et, fermant les yeux, les baisa longuement.
    Pardaillan, hors de lui, en proie à une sorte de vertige, lui arracha les gants, les remit à leur place, funèbre relique, et lui-même alla renfermer, avec un effroi visible, le mystérieux coffret d’or dans l’armoire dont il jeta la clef dans un coin de la chambre.
    Il y eut alors entre les deux hommes un de ces longs silences lourds d’angoisse qui semblent vibrer sourdement comme vibrent les airs après un coup de gong ou de cymbale.
    L’action rapide de Pardaillan venait de préciser dans l’esprit de Marillac un soupçon qu’il n’osait s’avouer à lui-même.
    Il demeurait atterré.
    Sa joie fébrile, son bonheur trop surexcité par lui-même, la vague épouvante que recouvraient ce bonheur et cette joie, son incertitude, ses doutes, son désespoir latent ; en un éclair aveuglant, il comprit tout, il se comprit soi-même.
    Et il

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