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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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honorable dans notre société est prêt à agir dans le
sens que nous voudrons. Quant à la tourbe du peuple, ne nous en
occupons pas. Le peuple verra tomber avec joie Foscari qu’il
redoute, et me verra d’un œil indifférent prendre sa place. Les
fonctions que chacun de vous doit occuper dans le nouvel État que
nous fondons sont connues dès longtemps.
    « Seigneurs, en présence de vous tous, nos frères, en
présence des morts qui m’entendent peut-être, en présence de Dieu
qui est dans ce temple, je jure de respecter fidèlement toutes nos
conventions ; je jure de respecter les garanties que nous
avons débattues et convenues ; je jure de donner à chacun, dès
le jour de la réussite, ce qui a été promis à chacun, honneur,
argent ou places, chacun ayant demandé en toute liberté, et la
demande de chacun ayant été discutée, adoptée par tous. Je jure en
un mot de continuer à être votre président lorsque vous aurez placé
sur ma tête la couronne ducale. Que Dieu et les morts soient
témoins de mon serment de fidélité. De même, souvenez-vous que vous
m’avez juré la même fidélité. »
    Tous, d’un mouvement spontané, étendirent la main.
    Pendant quelques secondes, on n’entendit que le bruit des voix
répétant la même formule sous les voûtes de la crypte
mortuaire :
    « Je jure… je jure !… »
    Puis, à nouveau, le silence retomba sur les tombeaux muets.
    Alors Altieri continua :
    « Tout est prêt. Chacun de nous connaît son poste et ce
qu’il doit faire. Seul, le jour de l’action reste à fixer. C’est ce
dernier point que nous venons d’arrêter. »
    Altieri s’arrêta une seconde, comme pour être plus sûr de
l’attention générale. Mais cette précaution était inutile. Les
visages des assistants révélaient l’ardeur passionnée de leurs
esprits.
    « Nous ne nous verrons plus, dit alors le capitaine
général. Cette réunion est la dernière. Nous avons donc choisi un
jour tel qu’il ne soit plus besoin de nous prévenir… Vous n’ignorez
pas, seigneurs et frères, que le doge Foscari n’a pas encore
accompli l’antique et traditionnelle cérémonie du mariage du doge
avec l’Adriatique. Il a de mois en mois et d’année en année reculé
cette cérémonie, qui devait le consacrer. Peut-être espérait-il une
autre cérémonie. Or, sur mes instances, et aussi d’après le
mécontentement des mariniers, Foscari a résolu d’exécuter cette
année la cérémonie. Elle doit avoir lieu bientôt, bien que le jour
n’en soit pas fixé encore. Seigneurs et frères, ce jour-là sera le
nôtre. Le mariage du doge et de l’Adriatique sera aussi le mariage
du doge et de la mort… L’heure même où retentiront les bombardes
sera notre heure. Le signal de la fête sera le signal de l’action
pour chacun de nous. Tout cela vous convient-il ? »
    Une longue acclamation éveilla encore une fois de sourds échos
dans la crypte.
    « Adieu donc ! proclama Altieri, jusqu’au jour du
mariage du doge et de l’Adriatique !… »
    Toutes les mains se tendirent vers Altieri qui, ému en apparence
d’une puissante émotion, salua ses alliés, serra des mains,
prononça des paroles de cordiale affection et se dirigea vers
l’escalier.
    Un quart d’heure plus tard, tous les conjurés étaient
partis.
    Les chefs de groupes reprirent leurs torches, et s’étant
masqués, s’éloignèrent à leur tour.
    La crypte retomba dans une profonde obscurité.
    Une demi-heure s’écoula, pendant laquelle le chef de police
tourna et retourna mille fois cette question dans son
esprit :
    « Pourquoi Roland Candiano m’a-t-il fait assister au
dernier acte de cette formidable conspiration ? »
    Soudain, une faible lueur se montra.
    L’homme qui avait conduit Roland apparut dans la crypte, une
lanterne sourde à la main.
    Comme il avait fait en arrivant, il poussa le ressort. La dalle
se déplaça. Roland sortit le premier, puis le chef de police, puis
Scalabrino. On remonta l’escalier, et on se retrouva dans la nef de
la cathédrale.
    Guido Gennaro, encore tout étourdi du spectacle auquel il venait
d’assister, palpitait d’une joie profonde : la joie de
l’artiste qui se trouve soudain en présence de l’œuvre parfaite.
Jamais, dans ses rêves de policier, il n’avait osé concevoir une
aussi magnifique occasion, une conspiration parfaite, sur le point
d’aboutir, tous les fils dans sa main.
    Il se surprit à se frotter les mains.
    « Superbe !

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