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Les Aventures de Nigel

Les Aventures de Nigel

Titel: Les Aventures de Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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ÉPÎTRE SERVANT D’INTRODUCTION
    LE CAPITAINE CLUTTERBUCK
    AU RÉVÉREND DOCTEUR DRYASDUST.
     
    MON CHER MONSIEUR,
    Je suis fort reconnaissant des civilités dont vous avez bien voulu m’honorer dans votre lettre obligeante : je m’empresse d’y répondre, et j’adhère entièrement à votre citation de – quàm bonum et quàm jucundum ! – Nous pouvons en effet nous considérer comme issus de la même famille, ou, selon le proverbe de notre pays, comme enfans du même père ; vous n’aviez pas besoin d’excuse, révérend et cher monsieur, pour me demander tous les renseignemens qu’il est en mon pouvoir de vous fournir sur l’objet de votre curiosité. L’entrevue dont vous me parlez eut lieu dans le courant de l’hiver dernier, et elle est si profondément gravée dans ma mémoire, que je n’ai besoin d’aucun effort pour en rassembler les détails les plus minutieux.
    Vous savez que la part que je pris à la publication du roman intitulé LE MONASTÈRE a fait de moi une espèce de personnage dans le monde littéraire de notre métropole écossaise. Je ne reste plus, dans la boutique extérieure de nos libraires, à marchander les objets dont j’ai besoin, avec un commis peu attentif, coudoyé par des enfans qui viennent acheter des Corderius et des cahiers, ou par des servantes marchandant un sou de papier ; mais je suis accueilli avec cordialité par le Bibliopole lui-même, qui me dit en m’abordant : – Capitaine, faites-moi le plaisir d’entrer dans l’arrière-boutique. – Jeune homme, approchez donc une chaise au capitaine Clutterbuck. – Voilà la gazette, capitaine, – la gazette d’aujourd’hui ; – ou bien : Voici l’ouvrage nouveau ; – voilà un plioir ; ne craignez pas de couper les feuilles, ou mettez-le dans votre poche et emportez-le chez vous ; – ou bien : Monsieur, nous vous traiterons en confrère, vous l’aurez au prix de libraire. – Peut-être encore, s’il sort des presses du digne commerçant, sa libéralité pourra même s’étendre jusqu’à dire : – N’allez pas, monsieur, faire porter en compte une pareille bagatelle ; c’est un exemplaire tiré en sus. Je vous prie de recommander l’ouvrage aux littérateurs vos amis.
    Je ne parle pas de ces fines parties littéraires où les convives se réunissent, rangés autour d’un turbot, d’un gigot de mouton ou de quelque autre mets, non plus que de la circulation d’une excellente bouteille de la meilleure bière noire de Robert Cockburn, ou même de sa bière royale, pour animer notre conversation sur de vieux livres, ou nos plans pour en faire de nouveaux. Ce sont là des douceurs réservées à ceux qui ont été investis des privilèges et franchises de la corporation des lettres, et j’ai l’avantage d’en jouir complètement.
    Mais tout change sous le soleil, et ce n’est pas sans un vif sentiment de regret que, dans mes visites annuelles à la métropole, je me vois privé de l’accueil franc et cordial de l’ami judicieux et obligeant qui le premier me fit connaître au public, dont l’esprit eût suffi à une douzaine de beaux parleurs de profession, et qui avait plus de gaieté originale qu’il n’en aurait fallu pour faire la fortune d’un pareil nombre. Cette grande perte a été suivie de la perte, momentanée j’espère, d’un autre libraire de mes amis, qui, par ses vues élevées et ses idées libérales, a non-seulement fixé dans sa patrie l’entrepôt de la littérature nationale, mais y a établi une cour littéraire, faite pour commander le respect aux personnes même les plus portées à s’écarter de ses règles. L’effet de ces changemens, opérés en grande partie par la rare intelligence et les habiles calculs d’un homme qui a su tirer un parti plus avantageux qu’il n’aurait osé l’espérer lui-même des talens en tous genres que produisait son pays, sera sans doute plus sensible quand une nouvelle génération aura succédé à la nôtre.
    J’entrai dans la boutique du carrefour pour m’informer de la santé de mon digne ami, et j’appris avec satisfaction que son séjour dans le midi avait diminué les symptômes alarmans de sa maladie. Profitant alors des privilèges dont j’ai déjà parlé, je m’avançai dans ce labyrinthe de chambres petites et sombres, ou, pour parler le langage de nos antiquaires, dans ces cryptes qui forment le derrière de cette célèbre librairie. Cependant, en passant d’une pièce dans une autre,

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