Les chasseurs de mammouths
et des trous à fumée, ménagés au-dessus
de chaque foyer, laissaient entrer la lumière. A une charpente en os de
mammouth étaient accrochés vêtements, outils, provisions, mais la porte
centrale de la voûte était faite de nombreux bois de cerf entrelacés.
Brusquement, Ayla prit conscience d’un arôme qui lui fit monter
l’eau à la bouche. De la viande de mammouth ! pensa-t-elle. Elle n’avait
pas retrouvé le goût de cette tendre et savoureuse chair depuis qu’elle avait
quitté la caverne du Clan. D’autres délicieuses odeurs de cuisine montaient
aussi autour d’elle, certaines familières, d’autres non. Elles se combinaient
pour lui rappeler qu’elle avait faim.
On les guidait maintenant au long d’un passage qui traversait l’habitation
sur toute sa longueur. De chaque côté, de larges couches, recouvertes de
fourrures amoncelées, s’appuyaient aux parois. Des gens y étaient assis, pour
se détendre ou bavarder. Elle sentit leurs regards se fixer sur elle au
passage. Elle vit plusieurs arches formées par des défenses de mammouth et se
demanda sur quoi elles débouchaient mais elle n’osa pas poser la question.
On dirait une caverne, se disait-elle. Une immense caverne
confortable. Mais les défenses disposées en ogives, les os de mammouth qui
servaient de piliers et de supports pour les murs attestaient qu’il ne s’agissait
pas d’une caverne découverte par hasard. C’étaient ces gens qui l’avaient
construite !
La première salle, où cuisait le rôti, était plus vaste que les
autres, tout comme la quatrième dans laquelle Talut les introduisait. Plusieurs
couchettes nues, apparemment inoccupées, le long des murs, montraient comment
elles avaient été aménagées.
Quand on avait creusé le niveau inférieur, on avait laissé, des
deux côtés de l’excavation, de larges plates-formes, tout juste surélevées,
soutenues par des os de mammouth habilement disposés. D’autres os renforçaient
la surface des plates-formes, et les interstices étaient remplis d’une bourre
végétale. Le tout supportait des paillasses de cuir souple emplies de poils de
mammouth et d’autres substances moelleuses. Quand on y ajoutait plusieurs
épaisseurs de fourrures, les plates-formes devenaient des couchettes, chaudes
et confortables.
Jondalar se demandait si le foyer vers lequel on les menait
était inoccupé. Il le paraissait, mais, en dépit de toutes les couchettes nues,
on y avait une impression de vie. Des braises luisaient dans l’emplacement
réservé au feu. Des fourrures, des peaux étaient empilées sur certaines des
couches. Des herbes séchées étaient suspendues à des râteliers.
— Les visiteurs sont généralement couchés dans le Foyer du
Mammouth, expliqua Talut. A condition que Mamut ne s’y oppose pas. Je vais le
lui demander.
— Bien sûr, Talut, ils peuvent loger ici.
La voix venait d’une couche inoccupée. Jondalar fit volte-face,
ouvrit de grands yeux en voyant se soulever un tas de fourrure. Deux yeux
brillèrent dans un visage tatoué, sur la pommette droite, de chevrons qui se
fondaient dans les rides d’un âge incroyable. Ce qu’il avait pris pour le poil
d’hiver d’un animal reprit l’aspect d’une barbe blanche.
Deux longues jambes maigres, jusque-là croisées, se déplièrent,
et les pieds se posèrent sur le sol.
— Ne prends pas cet air surpris, homme des Zelandonii. La
femme savait que j’étais là.
La voix forte du vieillard ne trahissait guère son âge avancé.
— C’est vrai, Ayla ? demanda Jondalar.
Elle ne parut pas l’entendre. Son regard et celui du vieil homme
s’étaient accrochés, comme si chacun voulait plonger dans l’âme de l’autre. La
jeune femme, enfin, se laissa tomber aux pieds du Mamut, croisa les jambes,
inclina la tête.
Jondalar se sentit à la fois intrigué et gêné. Elle utilisait le
langage par signes dont le Clan, lui avait-elle dit, se servait pour
communiquer. Cette posture était l’attitude de déférence et de respect que
prenait une femme du Clan lorsqu’elle demandait l’autorisation de s’exprimer.
La seule autre fois où il l’avait vue ainsi, c’était un jour où
elle avait voulu lui dire quelque chose de très important, quelque chose qu’elle
ne pouvait lui faire savoir autrement, parce que les mots qu’il lui avait
enseignés ne suffisaient pas à traduire ses sentiments. Il se demandait encore
comment on pouvait s’exprimer plus clairement dans un
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