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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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troupes de Saladin.
    — Elle est là, dit Morgennes avec difficulté, tendant un doigt tremblant vers Crucifère.
    La vue de son arme, le fait qu’on se soit mis à parler d’elle, lui avait redonné quelques forces. Loin d’elle, il dépérissait, alors que, près d’elle, la vie revenait.
    — Mais il parle ! s’étonna Sohrawardi, ravi d’avoir suscité une réaction chez ce chrétien que tous croyaient moribond.
    Saladin regardait intensément son neveu :
    — Tu l’as donc prise ?
    — Oui, mon oncle.
    — Pourquoi ?
    — Elle m’a plu. J’ignorais que c’était la sienne…
    — Mais qu’a-t-elle de si particulier ?
    En guise de réponse, Taqi tira l’épée de son fourreau. Contrairement aux épées dont se servaient les chevaliers, son bout n’était pas arrondi. Elle était donc destinée à servir aussi bien à un homme à pied – qui frappe d’estoc et de taille –, qu’à un cavalier – qui ne frappe que de taille. D’ailleurs, sa garde, longue de deux empans, et sertie d’une croix de bronze, permettait de la tenir à deux mains et donc de frapper plus fort ; auquel cas on ne pouvait utiliser de bouclier.
    — C’est une épée de fantassin, constata Saladin. Pas une épée de cavalier…
    — Elle tue tout aussi bien, dit Taqi.
    Il tendit l’épée à son oncle, en la lui présentant par le pommeau. Celui-ci était orné d’une médaille, à demi effacée par le temps. Mais Saladin crut distinguer la forme d’une lune entourée d’un serpent.
    — Elle a versé le sang de nos guerriers. Je refuse d’y toucher.
    — Donne, dit Sohrawardi en dardant sur Taqi ses yeux d’aveugle.
    Il avança ses mains fébriles, mais Taqi le repoussa.
    — A-t-elle un secret ? demanda Saladin à Morgennes.
    — Oui, souffla Morgennes. Comme toutes les épées saintes…
    On le regarda, interloqué.
    — Quel est-il ? siffla Sohrawardi.
    — Une fois qu’on a fini de les forger, haleta Morgennes, leurs lames sont refroidies dans un bassin d’eau bénite mélangée à du sang de démon. Cela leur ouvre l’appétit…
    Saladin se frotta la barbe, un sourire en coin. Il se demandait si Morgennes n’était pas en train de se moquer d’eux. Mais dans la cour du roi de Jérusalem, on commença à murmurer. L’attention que Saladin accordait à cet homme et à son arme en irritait plus d’un, et réveillait la jalousie des Francs, qui n’avaient pas oublié la façon dont Baudouin IV et Amaury avaient préféré Morgennes à nombre d’autres chevaliers.
    — Menterie ! objecta Ridefort.
    — Je n’ai jamais entendu parler d’une coutume pareille, ajouta Guy de Lusignan.
    — Cette lame est ancienne, intervint Sohrawardi. Quoi qu’on en dise, elle n’est pas d’origine franque. Ils n’ont pas pu la forger… Elle est beaucoup trop belle.
    — Peu m’importe ! coupa Saladin, avant de reprendre sur un ton impérieux : Taqi ! Débarrasse-toi de cette épée ! Jette-la dans un volcan, au fond des océans, n’importe où, mais ne la garde pas !
    — Oui, mon oncle, promit Taqi en baissant les yeux.
    Le sultan repartit vers le sommet de la colline. Le temps de la prière approchait. Comme Taqi passait devant Sohrawardi, celui-ci l’attrapa par la manche ; mais Taqi ne montra rien de sa surprise.
    — Confie-moi cette arme, caqueta le vieux mage.
    — Jamais ! rétorqua Taqi.
    — Obéis !
    — Ne m’obligez pas, le prévint Taqi. Vous savez la sorte de sang dont cette épée se repaît…
    Le vieux mage siffla, lâcha la manche de Taqi et s’en alla rejoindre Saladin.

4.
    « Nos pas nous conduiront devant tes portes, ô Jérusalem ! »
    (Psaumes, CXXII, 2.)
    Le sommet de la colline de Hattin était creusé d’une cuvette, cratère d’un ancien volcan. L’armée de Saladin, tout habillée de blanc, s’y pressait, avide d’entendre son sultan. C’était le crépuscule.
    — Prions, dit Saladin.
    Juchés sur le dos des chameaux, dans des minarets de campagne, les muezzins lancèrent l’appel rituel :
    —  Allah Akbar ! La illah ila Allah !
    Courbés vers La Mecque, front contre terre, ils récitèrent la première sourate du Coran : « Au nom de Dieu, le très Miséricordieux, le Miséricordieux ; louange à Dieu, Seigneur des univers, le très Miséricordieux, le Miséricordieux, le Roi du Jour et du Jugement. C’est Toi que nous adorons, c’est Toi dont nous implorons le secours. Guide-nous sur la voie de la rectitude, la voie

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