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Les émeraudes Du Prophète

Les émeraudes Du Prophète

Titel: Les émeraudes Du Prophète Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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gardien : je vous suis !
    L’homme eut un sourire féroce qui fit briller de longues canines sous sa moustache hirsute :
    — Dites à vos amis qu’ils feraient aussi bien de rentrer au village. L’attente pourrait leur paraître longue… très longue même. Et la nuit, en hiver, les loups viennent jusqu’ici.
    — C’est gentil ne nous prévenir, fit Adalbert tout de même un peu inquiet, mais nous sommes assez grands pour savoir ce que nous avons à faire… Nous resterons !
    — C’est à vous de voir !
    Un instant plus tard, le vantail de chêne et de fer retombait derrière Morosini avec un bruit aussi implacable qu’une dalle de pierre sur un tombeau. Désagréablement impressionné, il fut tenté de se retourner pour voir si l’injonction que Dante vit s’inscrire en lettres de feu sur la porte de l’Enfer : « Vous qui entrez, laissez toute espérance » n’y était pas tracée, mais il repoussa l’idée avec un haussement d’épaules. Pour Lisa il se sentait prêt à affronter tous les démons de la terre.
    Ce qu’il découvrit au bout de la voûte basse qu’un cavalier n’aurait pu franchir sans se courber n’était guère plus réjouissant. Le château proprement dit se dressait devant lui, érigé à même le rocher qu’il semblait continuer. Il était le centre d’une cour circulaire délimitée par la chemise de muraille dans laquelle s’inscrivaient des bâtiments et il n’avait rien d’une demeure de plaisance : c’était une sorte de donjon large et trapu percé de rares et étroites fenêtres trilobées mais, seule grâce chez ce monstre, une galerie à fines arcades ornait ce qui devait être le dernier étage. Ainsi, dressé contre le ciel gris dont le vent effilochait les nuages, il était sinistre à souhait. À peine moins que l’étrange ornement planté dans la cour : un gibet où se balançait un squelette pendu par la cage thoracique à un énorme croc de boucher… Aldo se sentit pâlir en imaginant ce qu’avait pu être la fin de cet homme… Son arrivée à lui fut saluée par les grondements furieux de quatre molosses noirs qu’une copie conforme du gardien maintenait d’une poigne de fer : n’importe lequel d’entre eux était capable de le réduire à l’état du supplicié… Il fallait cependant faire bonne figure et ce fut avec un haussement d’épaules dédaigneux qu’il considéra l’homme aux chiens et suivit son guide jusqu’aux marches de pierre accédant à l’entrée du château…
    Lorsqu’il l’eut franchie, il considéra avec stupeur le décor intérieur, se demandant s’il n’avait pas changé de siècles en pénétrant dans cet univers démentiel ou peut-être gagné une autre planète. Ce qu’il voyait aurait pu servir de modèle à Piranèse pour ses « Prisons » : un assemblage délirant d’escaliers à claire-voie, de poutres armées de chaînes, de voûtes obscures, de profondeurs ténébreuses qui étaient peut-être des oubliettes. Quelques chauves-souris ajoutaient au charme de l’endroit. L’idée qu’une femme pût habiter là-dedans ne serait venue à personne. Ce fut pourtant dans ce dédale de pierre et de bois qu’on le guida jusqu’à une porte peinte en rouge donnant sur une pièce qui ressemblait beaucoup plus à une prison qu’à une antichambre. Il y avait là un lit bas avec une paillasse et une couverture, une chaise, une table supportant une lanterne éteinte et quelques commodités. L’homme alluma la lanterne, posa sur la table quelques feuilles de papier et un stylo qui faisait un peu anachronique et désigna le tout au nouveau venu :
    — Écrivez ! ordonna-t-il.
    — Et que voulez-vous que j’écrive ?
    — Tout ce qui vous concerne : noms, profession, âge, etc. Et vous ajouterez la raison qui vous a conduit jusqu’ici…
    — Vous ne pensez pas que c’est du temps perdu ? Quelques minutes d’entretien avec votre maîtresse suffiront à mon bonheur…
    — Pas au sien ! Écrivez ce que je vous ai dit. Ensuite, elle verra si elle vous reçoit, si elle vous jette dehors ou si…
    — Ou si quoi ? insista Morosini dont la patience s’usait à grande allure.
    — Vous le verrez bien ! Maintenant, si vous ne voulez pas écrire, je vous ramène dehors et je dis à Tiarko de lâcher les chiens…
    Allez donc discuter avec des gens de cette sorte ! Luttant vigoureusement contre la moutarde qui lui montait au nez, Morosini rédigea un texte court mais complet

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