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Les émeraudes Du Prophète

Les émeraudes Du Prophète

Titel: Les émeraudes Du Prophète Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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ses profondeurs bleues que la neige éclairait et qu’animait parfois la course rapide d’un chevreuil. Hilary se comportait dignement et marchait du même pas que les hommes. En bonne Anglaise organisée et habituée aux voyages, ses valises renfermaient toujours la tenue exactement adaptée à la situation ou au climat. Ainsi ses hautes bottes lacées protégeaient-elles ses jambes comme sa jupe de tweed, son chandail chiné et sa pelisse à capuchon d’épais drap brun doublé de castor défendaient le reste de sa personne du froid et des intempéries.
    À mesure que l’on avançait, le terrain s’élevait et, soudain, la barrière des arbres s’écarta, remplacée par les hauts murs de pierre d’une antique enceinte médiévale trouée de rares meurtrières et d’un portail ogival aux sculptures rongées par le temps encastrant une porte aux énormes ferrures rouillées percée d’un judas. Le silence hivernal était encore plus épais ici que partout ailleurs.
    — Qu’est-ce qu’on fait pour se faire ouvrir ? grogna Adalbert qui n’avait pas l’air d’aimer beaucoup l’endroit. On sonne de l’olifant ?
    — Si tu as ça sur toi on peut toujours essayer mais il y a là une chaîne qui doit correspondre à une cloche…
    — C’est tellement rouillé que cela risque de s’écrouler si on tire dessus…
    Coupant court au dialogue, Hilary prit en main la chaîne et tira vigoureusement. Le son grave d’une cloche qui devait être de belle taille résonna de l’autre côté des murs déchaînant les aboiements furieux de plusieurs chiens. Hilary sonna une seconde fois avec impatience et l’on vit apparaître sur le haut du mur un personnage aussi rébarbatif que possible, un colosse vêtu de cuir, coiffé d’un bonnet en peau de loup dont les poils rejoignaient ceux de sa barbe et de sa moustache. À sa ceinture étaient accrochés une hachette et un couteau à large lame cependant qu’un fusil de chasse pendait à son épaule. D’une voix rude, il aboya quelque chose qui devait se traduire par « que voulez-vous ? ». Aldo répondit en allemand :
    — Nous désirons parler à la comtesse Ilona…
    — Où as-tu pris qu’elle était comtesse ? chuchota Vidal-Pellicorne.
    — Dans ces pays un titre va presque toujours avec un château et cela ne peut que la flatter. Et puis comme nous ne savons pas son nom, cela fait mieux que M me  Ilona, non ?
    — Si, convint Adalbert avec un petit rire.
    Là-haut cependant l’homme demandait, en allemand cette fois :
    — Que lui voulez-vous ?
    — Lui proposer une affaire et nous venons de loin je suis le prince Morosini, antiquaire de Venise…
    — Et les autres ?
    — Voici… lady Dawson, du British Muséum, raccourcit Aldo qui préférait ne pas s’embarquer dans les méandres de la noblesse britannique, et monsieur Vidal-Pellicorne… du… du Collège de France !
    Pour la première fois, Hilary se dérida :
    — On dirait que nous venons de recevoir chacun une promotion, souffla-t-elle à Adalbert.
    — Vous êtes mieux servie que moi. Je me serais bien vu baron… ou marquis ? J’ai toujours aimé ce titre-là. Il sent la guerre en dentelles et la poudre à la Maréchale…
    L’homme cependant avait disparu sans autres commentaires et dix bonnes minutes s’écoulèrent avant qu’on ne le revît après un tintamarre apocalyptique de verrous tirés, de clefs tournées et de grincements de gonds assoiffés d’huile, érigé au seuil du portail où il occupait une belle part de l’espace. Derrière lui la semi-obscurité d’une longue voûte :
    — Les hommes seulement, lâcha-t-il. La femme reste dehors !
    — Là, que vous avais-je dit ? chuchota Morosini tandis qu’éclataient les protestations de la jeune fille affreusement vexée. Puis, plus haut et à l’intention du gardien : C’est impossible voyons ! Nous n’allons pas laisser une dame de qualité se morfondre devant votre porte ?
    — C’est ça ou rien ! Personne ne vous empêche de rester avec elle et même de repartir tout de suite… On ne vous a pas invités !
    Il reculait déjà pour refermer quand Adalbert s’interposa :
    — Ça ne sert à rien d’insister. Le mieux est que tu y ailles seul. Je vais tenir compagnie à Hilary.
    — Oh, je peux très bien rester seule, protesta celle-ci. Je… je suis désolée, Adalbert, ajouta-t-elle plus doucement.
    — Il est bien temps ! marmotta Morosini qui s’avança vers le

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