Les fils de Bélial
présents aux capitaines anglais. Jeanne de Kent fut comblée de joyaux et pierreries… jusqu’à ce que son mari se souciât enfin de placer le reste du pactole en lieu sûr. Pèdre dépêcha à Londres le maître d’Alcantara pour traiter avec Édouard III du mariage de ses filles avec des princes anglais et pour obtenir que le roi d’Angleterre s’engageât complètement dans un conflit où la France était impliquée. Il se justifia des morts qui n’avaient cessé de joncher son règne. Reconnaissant en lui un homme de sa trempe, le roi d’Angleterre promit son aide. Le traité de Libourne fut conclu le 23 septembre 1366 entre le prince de Galles et le roi de Navarre. La guerre était imminente. On avait seulement oublié une chose : l’hiver et ses calamités.
Annexe II
Guesclin et l’argent
Dans l’ouvrage qui précède celui-ci (Les Fontaines de Sang), le lecteur a pris connaissance de la façon dont Guesclin avait exigé du Pape, sous la menace, une contribution exorbitante à la campagne d’Espagne : 5 000 florins d’or et une tentative de récidive dont ses hagiographes ne parlent point (533) . Le lecteur sait également que bien que soldés, les routiers que le Breton avait engagés pour cette expédition poursuivirent leurs pillages, incendies, viols et tueries. L’on peut affirmer que si une partie de cette fortune acquise sous la menace fut répartie entre les routiers, l’autre tomba dans la bourse du Breton.
Et déjà une remarque s’impose : alors que Robert Knolles et Hugh Calveley, à la fin de leur vie, aidèrent leur roi pécuniairement grâce aux trésors qu’ils avaient amassés dans la guerre, Guesclin se garda bien de venir en aide à la royauté française exsangue qui, pourtant, avait fait de lui un personnage « distingué » avant d’en faire un connétable. Jamais le roi Édouard III ne paya les rançons des grands chevaliers prisonniers : il préférait les échanger. Toujours la royauté française paya pour obtenir la liberté de ses prud’hommes ! Et pourtant ils étaient richissimes.
L’occupation qui rendit le Breton lugubrement célèbre en Espagne constitua pour ce mercenaire un merveilleux moyen de s’enrichir. Le Pape, Charles V et le roi d’Aragon contribuèrent aux frais préliminaires de cette aventure. Chacun devait verser un tiers. Urbain V avait imposé comme un moindre mal une participation de 5 000 florins au Comtat Venaissin (Bulle du 23 novembre 1365) et une autre de 30 000 florins à la Provence (Bulle du 20 novembre) avec participation effective du Clergé pour sa quote-part. Il autorisa également (Bulle du 23 novembre) certains emprunts en vue d’un versement à faire aux routiers à titre immédait (de proximo) sur le produit d’une décime biennale accordée jusque-là au roi Charles V pour l’aider à vider le royaume des Compagnies.
La loi des partages
Quelques auteurs, notamment Kenneth Fowler, de l’Université d’Edimbourg 381 , prétendent que c’est à Saragosse, le 16 février 1366, que Calveley et Guesclin conclurent un contrat par lequel ils s’associaient pour la campagne de Castille et de Grenade, mais il paraît plus certain que les conditions de leur alliance militaire et pécuniaire furent décidées en France. Dans ce partage, ajoute Kenneth Fowler, « où tout le butin obtenu dans cette guerre, y compris les donations et conquêtes, serait réuni. Guesclin prendrait trois parts et Calveley une seule ». Les dons de Pierre IV d’Aragon en faveur de Guesclin (9 janvier) étaient inclus, notamment les châteaux de Boija et de Magallén situés près de la frontière de Castille, et les vallées de Novelda et d’Elda dans le royaume de Valence. En cas de conquête du royaume de Grenade, Guesclin se l’octroierait dans sa totalité, pro indiviso, excepté les cités et places fortes du roi maure de Bellemarine sur le côté nord du détroit de Gibraltar elles deviendraient les possessions de Calveley ainsi que tous les privilèges et les terres octroyées auparavant à Guesclin par le Trastamare. Il était également prévu une défection de Calveley si le roi ou l’un de ses fils requérait sa présence.
Ce fut dès l’entrée des « alliés » à Tolède, le 5 mai, que le Breton et l’Anglais réglèrent leur premier compte. Dans une lettre de créance, Bertrand s’engagea à payer à Hugh la somme de 63 008 francs d’or qui restaient à payer comme gages pour l’Anglais
Weitere Kostenlose Bücher