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Les Mains du miracle

Les Mains du miracle

Titel: Les Mains du miracle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joseph Kessel
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monde autant qu’en vous !
    — Du moment que nous parlons de
nouveau en amis, dit Kersten, je veux vous rassurer complètement : pendant
ce voyage, mes trois fils resteront à Hartzwalde avec M lle  Élisabeth
Lube. Maintenant, grâce à vous, je suis tranquille pour eux : le statut
d’extraterritorialité interdit à Kaltenbrunner d’envoyer ses agents chez moi.
    Le docteur et sa femme prirent
l’avion pour Stockholm, le 1 er  avril. L’une des valises de
Kersten contenait le courrier de la Résistance hollandaise que Beaufort lui
avait confié à La Haye. Kersten avait un passeport diplomatique. Le courrier
clandestin passa les contrôles sans difficulté. Le jour même de son arrivée,
Kersten le remit au baron Van Nagel, ambassadeur en Suède du Gouvernement
hollandais réfugié à Londres.
    Kersten resta deux mois à Stockholm.
Si le séjour fut aussi long, c’est que Gunther, le ministre des Affaires
étrangères, tenait au secret absolu de ses entretiens avec Kersten. Il voulait
examiner, étudier et fixer seul tous les détails du grand projet. Au ministère
même, on ignorait tout des premières démarches que les deux hommes allaient
entreprendre auprès de Himmler. Quand il était indispensable de consulter
quelque haut fonctionnaire sur une question technique, Gunther le faisait d’une
manière détournée, fragmentée, qui ne permettait à personne de soupçonner le
dessein dans son ensemble. Cela prenait du temps.
    Enfin, au début du mois de juin,
Gunther avait tout réglé, tout mis en place, obtenu les autorisations et
concours nécessaires. Après une dernière conférence avec Kersten, il lui
dit :
    — Je n’attends plus qu’un
signal de vous pour commencer.
    — Et moi, je commence à
travailler Himmler dès mon retour, dit le docteur. Je peux compter à fond sur
Brandt, beaucoup sur Schellenberg et Berger. Sans doute, nous avons un ennemi
terrible : Kaltenbrunner. Mais Himmler est tout de même plus fort que lui.
    Gunther demanda :
    — En quoi puis-je vous
aider ?
    — En Allemagne, je n’ai besoin
de rien, dit Kersten. Mais ici, je voudrais obtenir deux choses. La première
est l’équivalence de mon diplôme de docteur en Suède, pour que je puisse
pratiquer chez vous.
    Gunther montra d’un hochement de
tête qu’il comprenait et approuvait cette précaution. Avec les risques graves
que le docteur allait courir et la situation de plus en plus précaire du III e  Reich,
il lui était indispensable de préparer l’avenir.
    Bien, dit le ministre des Affaires
étrangères. Et puis ?
    — Une autorisation
gouvernementale pour louer un petit appartement à Stockholm, que j’ai en vue.
Autorisation indispensable, vous le savez, à cause de la crise du logement.
    — Ce sera fait, promit Gunther.
    Il tint parole. Alors, le docteur
dit à sa femme :
    — À notre prochain voyage,
toute la famille viendra. Nous avons enfin une base pour reprendre un jour une
vie normale.
    Irmgard Kersten acheta deux lits
d’enfant. Puis elle pensa aux draps. Mais comme son mari n’avait pu emporter
d’Allemagne que peu d’argent, elle n’en eut pas assez pour des draps de toile
ou de coton. Elle dut se contenter de draps en papier.
    Le 6 juin 1944, le docteur
et sa femme s’envolaient pour Berlin. Avant de partir, ils avaient appris par
la radio le débarquement des Alliés en Normandie.
    « Mieux vaut avoir des draps de
papier en Suède que des draps de soie en Allemagne », s’était dit Kersten.
     

12
    De l’aérodrome de Tempelhof, Kersten
et sa femme allèrent directement à Hartzwalde. Le printemps était dans toute sa
force. Les prés et les bois embaumaient. Élisabeth Lube, les enfants, les
Témoins de Jéhovah reçurent les arrivants avec des transports de joie. Dans
l’étable et l’écurie, les bêtes même semblaient heureuses de leur retour.
    « Combien de temps encore
verrai-je tout cela ? » ne put s’empêcher de penser Kersten.
    Il fit une très longue promenade en
forêt, rêvant, méditant, comme pour prendre conseil des hautes futaies et des
clairières fleuries. Puis il appela au téléphone Hochwald, le Q.G. de Himmler
en Prusse-Orientale.
    — Je suis là, Reichsführer,
dit-il.
    — Et votre femme ? demanda
Himmler sans transition. J’aimerais beaucoup lui souhaiter la bienvenue.
    Le ton ne permettait aucun doute.
Cette politesse était un contrôle. Mais quand Himmler reconnut la voix
d’Irmgard Kersten, il poussa un véritable cri

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