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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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sanglots
étouffés de Gonzalico, emmitouflé dans la couverture. « Je mourrai pour le
Christ. » Il avait cherché une autre couverture pour le couvrir davantage
et, le sachant encore réveillé, s’était rapproché de lui.
    — Merci, bredouilla Gonzalico.
    Merci ? se répétait-il avec surprise à l’instant où il
avait senti, entre les couvertures, que le petit cherchait à agripper sa main.
Il lui avait permis de le faire et ses pleurs avaient diminué avant de laisser
place à une respiration posée. Pendant le reste de la nuit, il était demeuré
près de l’enfant qui dormait, sans oser lui lâcher la main afin de ne pas le
tirer du sommeil.
    Ils s’étaient réveillés avant l’arrivée du monfí d’El Seniz.
Gonzalico lui avait souri. Hernando avait observé son sourire juvénile et avait
voulu lui répondre de la même manière, mais il avait grimacé. Comment Gonzalico
pouvait-il sourire ? « Ce n’est qu’un enfant innocent »,
s’était-il dit. La nuit, la discussion, le danger, les différents dieux, tout
était derrière eux, et à présent il répondait comme l’enfant qu’il était. Un
nouveau jour ne commençait-il pas ? Le soleil ne brillait-il pas comme
toujours ? Hernando n’avait pas osé insister sur l’apostasie et, cette
fois oui, il lui avait souri ouvertement.
    Ils n’avaient rien à manger.
    — On mangera après, avait accepté Gonzalico d’une voix
enfantine.
    Après ! Hernando s’était obligé à acquiescer.
    Aucun des chrétiens prisonniers n’avait renié sa foi.
« Je mourrai pour le Christ. » L’engagement revint à la mémoire
d’Hernando, déjà au centre de Cuxurio, quand il vit le monfí jeter l’enfant
contre le groupe important de chrétiens qui s’entassaient près de l’église. Les
youyous des Mauresques se mêlaient aux pleurs des chrétiennes, forcées de
contempler leurs pères, maris, frères ou fils, à une certaine distance. Si
l’une d’entre elles baissait les yeux ou les fermait, elle était immédiatement
battue et contrainte de nouveau à regarder les hommes. Tous les chrétiens
d’Alcútar, Narila et Cuxurio de Bérchules se trouvaient là ; plus de
quatre-vingts hommes et enfants de plus de dix ans. El Seniz et El Partal
criaient et gesticulaient face à l’uléma resté avec les chrétiens toute la
nuit. El Seniz fut le premier : sans dire un mot, il se dirigea vers les
chrétiens. Debout devant eux, il alluma une mèche de sa vieille arquebuse aux
incrustations dorées et la fixa sur le serpentin.
    Le silence se fit dans le village ; les regards étaient
rivés à cette tresse de lin trempée dans le salpêtre, qui crépitait lentement.
    El Seniz posa par terre la crosse de son arme, introduisit
la poudre dans le canon et enfonça un chiffon pour bourrer l’ensemble à coups
de baguette. Le monfí ne regardait rien d’autre que son arquebuse. Puis il
introduisit une balle de plomb et bourra encore le canon avec la baguette.
Alors il souleva l’arme et visa.
    Un hurlement jaillit du groupe de chrétiennes. Une femme
tomba à genoux, les doigts entrelacés en un geste de supplication, tandis qu’un
Maure lui tirait les cheveux pour l’obliger à lever les yeux. El Seniz ne tourna
même pas la tête et amorça le bassinet avec de la poudre fine. Puis, sans autre
préambule, il tira dans la poitrine d’un chrétien.
    — Allah est grand ! cria-t-il.
    L’écho du tir résonnait encore dans l’air.
    — Tuez-les ! Tuez-les tous !
    Monfíes, gandules et hommes ordinaires s’élancèrent sur les
chrétiens avec des arquebuses, des lances, des épées, des dagues ou de simples
instruments de labour. Les cris assourdirent de nouveau Cuxurio. Les
chrétiennes, retenues par les Mauresques et par un groupe de gandules, furent
contraintes d’assister au massacre. Nus, encerclés par une foule devenue folle,
leurs hommes ne pouvaient rien faire pour se défendre. Certains
s’agenouillèrent en se signant, d’autres tentèrent de protéger leurs fils entre
leurs bras. Hernando contemplait la scène à côté des chrétiennes. Une énorme
Mauresque lui mit entre les mains une dague et le poussa pour qu’il participe
au carnage. La lame étincela dans sa paume et la femme le poussa une nouvelle
fois. Hernando s’avança vers les chrétiens. Qu’allait-il faire ? Comment
pouvait-il tuer quelqu’un ? À mi-chemin, Isabel, la sœur de Gonzalico,
s’échappa du groupe, courut vers lui et lui saisit la

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