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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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se trouvait qu’à un peu plus
d’un quart de lieue d’Alcútar, la rudesse du chemin blessa les pieds nus des
chrétiens et Hernando distingua plusieurs cailloux tachés de sang. Soudain,
quelqu’un tomba par terre : d’après la maigreur de ses jambes et l’absence
de pilosité de son entrejambe, il s’agissait d’un petit enfant. Comme les
hommes étaient attachés, nul ne put l’aider ; les femmes tentèrent de le
faire, mais les gandules les en empêchèrent et assénèrent des coups de pied au
petit. Hernando observa comment la fillette aux cheveux blonds se jetait sur
lui pour le protéger.
    — Laissez-le ! cria-t-elle, à genoux, couvrant sa
tête de ses bras.
    — Demande à ton Dieu de l’aider à se lever, lui cria un
Maure.
    — Reniez votre foi, lui lança un autre.
    Le petit groupe formé par l’enfant au sol, la fillette et
les quatre gandules restés en arrière obligea la mule qui menait le troupeau à
s’arrêter.
    — Que se passe-t-il ici ?
    Hernando entendit la voix d’Ubaid dans son dos.
    Le garçon parvint à leur hauteur au moment où un Maure
renchérissait aux cris du muletier.
    — On va devoir vous tuer si vous n’avancez pas !
    Entre les jambes des gandules, Hernando parvint à voir le
corps recroquevillé du petit. Il distingua son visage crispé et ses yeux résolument
fermés. Les mots surgirent spontanément de sa bouche :
    — Si vous les tuez, vous ne pourrez plus…, nous ne
pourrons plus, se corrigea-t-il aussitôt, les convertir à la foi véritable.
    Les quatre hommes se retournèrent en même temps. Ils étaient
tous beaucoup plus âgés que lui.
    — Qui es-tu, toi, pour avoir quelque chose à
dire ?
    — Et vous, qui êtes-vous pour les tuer ? répliqua
Hernando.
    — Occupe-toi de tes mules, petit…
    Hernando le coupa et cracha par terre.
    — Pourquoi vous ne lui demandez pas à lui ce que vous
devez faire ? ajouta-t-il en montrant du doigt le large dos d’El Partal,
qui s’éloignait devant. Vous ne croyez pas qu’il les aurait déjà tués à Alcútar
s’il l’avait voulu ?
    Les quatre Maures échangèrent des regards et décidèrent
finalement de poursuivre leur chemin, non sans avoir auparavant flanqué deux
autres coups de pied à l’enfant. Avec l’aide de la fillette, Hernando emmena
celui-ci à l’écart du sentier et fit avancer les mules jusqu’à ce qu’arrive la
Vieille. Entre Hernando et la fillette blonde qui l’avaient soulevé en le
tenant par les aisselles, l’enfant, en quête d’air, hoquetait. Ubaid
contemplait la scène sans rien dire. Il paraissait soupeser la situation. Le
fils adoptif de Brahim avait plus d’audace que ce qu’il avait imaginé à première
vue… À ce moment-là, Hernando aidait la petite à hisser le garçonnet sur la
Vieille.
    — Pourquoi as-tu fait cela ? lui demanda-t-il. Ils
auraient pu te tuer.
    — C’est mon frère, répondit-elle, le visage ravagé par
les larmes. Mon unique frère. Il est bon, ajouta-t-elle, comme si elle
implorait sa clémence.
    Elle s’appelait Isabel, lui dit-elle ensuite tandis qu’elle
marchait à côté de la Vieille, soutenant son frère Gonzalico. Ils parlèrent
peu, mais assez pour qu’Hernando perçoive l’immense tendresse qu’ils se
vouaient.
    La situation de Cuxurio de Bérchules était semblable à celle
de tous les villages des Alpujarras qui s’étaient soulevés : église pillée
et profanée, Maures en fête et chrétiens prisonniers. Une autre bande de
monfíes aux ordres de Lope El Seniz les attendait. Les monfíes décidèrent
d’accorder une nouvelle chance aux chrétiens, mais cette fois, vu les maigres
résultats obtenus à Alcútar, ils donnèrent des instructions à ceux qui
faisaient office d’ulémas de les menacer de torturer, d’outrager et de tuer
leurs femmes s’ils ne se convertissaient pas à l’islam.
    — C’est comme un petit uléma, se vantait Brahim face à
El Partal et à El Seniz, lorsqu’ils virent apparaître Hernando et la Vieille
avec l’enfant à califourchon et Isabel à ses côtés, formant un étrange tableau.
Vous connaissez Hamid de Juviles ?
    Tous deux firent oui de la tête. Qui, dans les Alpujarras,
ne connaissait pas Hamid le Boiteux ?
    — C’est son protégé. Il lui a enseigné la véritable
foi.
    El Partal plissa les yeux pour observer l’arrivée
d’Hernando, de la mule et de l’enfant. « La conversion d’un si petit
enfant, pensa-t-il, pourrait miner, bien plus que

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