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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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enfants, avait songé Hernando. Il venait de connaître une autre
femme, avec laquelle il avait essayé d’atteindre ce ciel qui s’étendait
au-dessus des nuages, mais c’était Fatima qui y apparaissait, comme si Isabel,
dans cette Grenade qu’il aurait presque pu toucher, l’avait libéré et lui avait
permis d’ouvrir les vannes d’un sentiment qu’il gardait enfermé en lui. Trois
ans. À cette vision céleste, Hernando n’avait pas pleuré comme il l’avait fait
après la mort de son épouse ; ni les larmes ni la douleur n’avaient
enseveli le rire de Fatima, les douces paroles d’Inès ou les yeux bleus
coupables de Francisco. Il avait regardé le nuage et suivi son parcours jusqu’à
un autre nuage. Il avait ensuite tapoté le cou de son cheval et l’avait obligé
à se retourner. L’hidalgo et les domestiques s’étaient éloignés. Il avait
failli éperonner Volador pour les rejoindre, mais il avait finalement préféré
les suivre de loin, au pas.
     
    Le valet de chambre du duc de Monterreal s’appelait José
Caro et avait près de quarante ans, dix de plus qu’Hernando. C’était un homme
tiré à quatre épingles, sérieux, et qui remplissait scrupuleusement sa tâche,
comme il seyait à quelqu’un qui, enfant, avait déjà servi de page au père de
don Alfonso. Le valet de chambre, situé dans la hiérarchie au-dessous du
chapelain et du secrétaire, était chargé de veiller à la garde-robe,
accessoires et autres effets personnels du duc, en plus de tout ce qui
correspondait à l’ornementation et à l’entretien du palais. José Caro était la
personne qu’Hernando devait persuader de s’intéresser aux soies du maître
tisserand, mais depuis trois ans qu’il vivait au palais il n’avait pas échangé
plus de douze mots avec lui.
    Un soir, Hernando l’aperçut dans un des salons,
impeccablement vêtu de sa livrée. Il surveillait un charpentier qui réparait un
buffet abîmé. À ses côtés, une jeune domestique balayait la sciure des copeaux
avant même qu’elle atteigne le sol.
    Hernando s’arrêta à l’entrée du salon. « J’ai besoin que
vous alliez acheter de la marchandise dans la boutique du maître Juan
Marco… » s’imagina-t-il lui dire. « J’ai besoin ? J’aimerais…,
je vous prie… » Pourquoi ? Que lui répondrait-il si le valet posait
cette question ? Et il la poserait certainement. « Parce que je suis
un ami du duc, pourrait-il répondre. Je lui ai sauvé la vie. » Il serait
alors obligé de répéter cet argument devant doña Lucía. Immédiatement, il
écarta cette éventualité. Don Sancho lui avait appris plein de choses, mais il
n’était jamais parvenu à lui donner une leçon sur la façon de s’adresser aux
domestiques avec cette autorité naturelle qu’ils avaient tous. Il avait
d’ailleurs songé demander conseil à l’hidalgo, mais celui-ci ne lui parlait
plus depuis l’affaire d’Isabel.
    Soudain, il se sentit observé. Le regard du valet de chambre
était fixé sur lui. Depuis combien de temps se tenait-il immobile sur le seuil
de la porte ?
    — Bonjour, José, le salua-t-il en ébauchant un sourire.
    La jeune domestique arrêta de balayer et se retourna avec
étonnement. Le valet de chambre lui répondit d’un léger hochement de tête et
reporta aussitôt toute son attention sur le maître charpentier.
    La surprise qui s’était reflétée sur le visage de la jeune
fille troubla Hernando. Il différa son projet. En vérité, il avait été peu
expansif à l’égard des employés du palais durant les trois années passées. Il
fit demi-tour et lambina dans les patios de la résidence jusqu’au moment où il
vit passer la servante.
    — Approche, lui demanda-t-il en fouillant dans sa bourse.
Tiens !
    Il lui donna une pièce de deux réaux. La domestique accepta
l’argent avec méfiance.
    — Je veux que tu surveilles le valet de chambre et que
tu me préviennes quand il sort du palais le soir. Tu m’as compris ?
    — Oui, don Hernando.
    — Il sort le soir ?
    — Seulement quand Son Excellence n’est pas là.
    — Bien. Tu auras une autre pièce la prochaine fois. Tu
me trouveras dans la bibliothèque, après le dîner.
    La jeune fille acquiesça, elle le savait déjà.
     
    Hernando allait chevaucher tous les jours. Il s’arrangeait
pour se lever tôt, avant les hidalgos qui ne le faisaient pas avant le milieu
de la matinée, mais surtout afin d’éviter ainsi doña Lucía. Il était

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