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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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l’impact négatif que cela entraînerait sur la confiance du
peuple à l’égard de sa monnaie, surtout de sa petite monnaie, qui est la plus
employée. Ensuite, il y a deux ans, son fils, Philippe III, a décidé que
le billon ne devait même plus être fabriqué avec ce grain d’argent et il a
ordonné qu’il soit exclusivement en cuivre. Comme les pièces n’ont pas d’aloi,
elles ne portent même pas la marque de l’essayeur de l’Hôtel de la monnaie qui
les a frappées. Et nous sommes las de fabriquer des pièces ! sourit Munir.
Binilit est mort, mais dans son atelier son ancien apprenti ne façonne plus de
bijoux maures ; il se contente de falsifier de l’argent en permanence. Et
il n’est pas le seul. Aujourd’hui il n’est plus nécessaire que les monnaies
soient en cuivre, on accepte celles en plomb et même les simples têtes de clou
grossièrement repoussées, sur chaque côté, avec un dessin représentant un
château ou un lion. Toutes les quarante pièces fausses, les chrétiens nous
paient jusqu’à dix réaux d’argent ! On calcule qu’il existe des centaines
de milliers de ducats en fausse monnaie qui circuleraient dans le royaume de
Valence.
    — Pourquoi les chrétiens ne les falsifient pas
eux-mêmes ? questionna Hernando, même s’il devinait la réponse.
    — Par peur du châtiment, et parce qu’ils ne possèdent
pas nos ateliers secrets, dit Munir en souriant. Mais principalement par simple
paresse : il faut travailler, et cela, comme tu le sais, ce n’est pas le
fort des artisans chrétiens.
    — Cependant, les gens, les commerçants, pourquoi
acceptent-ils cet argent, sachant pertinemment qu’il est faux ? renchérit
Hernando avec intérêt.
    Il revoyait la façon dont Rafaela contrôlait la petite
monnaie et vérifiait son authenticité. Mais à Cordoue ces falsifications
n’étaient pas aussi nombreuses que le prétendait l’uléma valencien.
    — Pour eux, comme je te l’ai dit précédemment, ça
revient au même. Depuis que Philippe II leur a volé trois grains d’argent
par pièce, ils n’ont plus confiance. Avec l’apparition de la fausse monnaie, le
roi, eux-mêmes, tout le monde croit y gagner. C’est un nouveau système de
change. Le seul problème, c’est que les prix montent, mais nous en sommes moins
affectés que les chrétiens ; nous n’achetons pas comme eux, nos besoins
sont bien moindres.
    — Et vous avez déjà obtenu les cent vingt mille
ducats ? demanda Hernando avec une stupéfaction qu’il ne pouvait retenir.
    — Une grande part grâce à eux, répondit l’uléma avec un
sourire de satisfaction. Une autre part est arrivée des Barbaresques, de tous
nos frères établis là-bas qui partagent notre espoir de récupérer les terres
qui nous appartiennent.
    Ils avaient terminé le maigre dîner que leur avait servi
l’épouse de Munir. L’uléma se leva et invita Hernando à sortir dans le jardin,
à l’arrière de la maison, où la lune et un ciel limpide étoilé sur la Muela de
Cortes leur offrait un panorama spectaculaire.
    — Mais, dit Munir, parle-moi de toi. À présent tu
connais mes intentions : lutter et vaincre… ou mourir pour notre Dieu.
J’ai bien conscience que tu ne les partages pas.
    L’uléma s’appuya sur la barrière qui entourait le jardin, en
haut de la colline sur laquelle était située Jarafuel, avec la vallée à ses
pieds et au loin la Muela de Cortes.
    — Qu’as-tu fait depuis la dernière fois que nous nous
sommes vus ? questionna-t-il dès qu’Hernando fut à ses côtés.
    Le Maure regarda le ciel et sentit le froid de l’hiver sur
son visage ; puis il commença à lui raconter les événements survenus
depuis qu’il était rentré à Cordoue, après la livraison des premiers plombs à
Grenade.
    — Tu as épousé une chrétienne ? l’interrompit
Munir lorsqu’il lui parla de Rafaela.
    Sa question n’était pas un reproche. Tous deux regardaient
le paysage devant eux ; deux silhouettes découpées dans la nuit, dressées
sur une barrière, seules.
    — Je suis heureux, Munir. J’ai de nouveau une famille,
deux beaux enfants, répondit Hernando. Mes besoins sont largement couverts. Je
monte à cheval, je dresse des poulains, très prisés sur le marché, énonça-t-il
calmement. Je consacre le reste de la journée à la calligraphie et à l’étude de
mes livres. La sérénité que m’a donnée cette nouvelle situation me permet, je
crois, de m’unir à Dieu dès

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