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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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pour l’arithmétique ! Diviser par 2 le nombre des rangées de cinq femmes, puis multiplier par 10 dépasse leur possibilité.
    — Après ce comptage laborieux, nous défilons devant le Blockova pour recevoir un quart de jus. Et on nous distribue nos tâches. Je suis désignée pour le « rivetage » ainsi que ma petit amie Marthe et quatre autres camarades. Chacune doit, à l’aide d’une riveuse, machine à air comprimé pesant plusieurs kilos qu’il faut tenir appuyée sur la poitrine, poser des rivets sur des morceaux de tôle. Ce travail ébranle tout le corps, et nous somme vite à bout de forces.
    — Nous rivons pendant six heures, avec une pause d’un quart d’heure dans la matinée. À midi, écuelle de soupe aux rutabagas et aux choux. Le travail reprend aussitôt jusqu’à 18 heures.
    — Des Meister, des contremaîtres, nous montrent comment se servir des riveuses. Notre apprentissage doit durer huit jours après quoi on nous confiera du vrai travail sur des pièces d’avion. Nous mettons tant de mauvaise volonté à « apprendre » que pas une n’arrive à poser un rivet droit. Nos Meister sont furieux.
    — À 18 heures, nouvel appel, et l’équipe de nuit nous remplace. Nous recevons un morceau de pain, une rondelle de saucisson et… au dodo !
    *
*   *
    — Dans (146) le dortoir 3, chaque fois qu’une Aufseherin passe il faut se précipiter sur le bord de l’allée. C’est vraiment une course pour celles qui sont au fond de la troisième rangée de châlits, faut se mettre au garde-à-vous et crier à la suivante : « Aufseherin » pour qu’elle se fige dans la même attitude respectueuse. Or un jour, alors que j’étais assise de biais sur mon lit, tournant le dos à l’allée d’où venait l’Aufseherin, je n’entends pas le signal que crient les rares compagnes qui sont au dortoir à ce moment-là. Furieuse de mon inattention, l’Aufseherin se précipite sur moi. Je lève mon bras replié pour protéger ma tête : crime impardonnable !… Nous devons nous laisser rouer de coups en nous tenant au garde-à-vous. Elle continue de me frapper jusqu’à ce qu’elle soit fatiguée ; et puis, furieuse, descend au bureau. Après son départ, mes compagnes d’infortune me réconfortent, je suis en larmes… Le lendemain au travail, je vois venir vers moi une grande Lyonnaise, « Frédérique » , qui me dit qu’on me demande au bureau. Elle ignore pourquoi et me dit gentiment :
    — « On va peut-être vous libérer !… »
    — J’arrive au bureau et j’entre, passant devant une rangée de tsiganes allemandes. Le commandant et la commandante sont là. M me  Fusch également pour traduire. Elle est bouleversée.
    — « Vous vous êtes rebellée devant une Aufseherin et vous avez esquissé un geste de menace… »
    — Je proteste et raconte comment les choses se sont passées.
    — L’Aufseherin, qui est présente, ne veut pas démordre et continue de m’accabler avec hargne.
    — Vous allez recevoir cinquante coups de schlague ! C’est la sanction et ceci sera inscrit sur votre dossier.
    — La commandante demande alors aux tsiganes de me frapper chacune son tour. Elles refusent catégoriquement et disent qu’elles sont prisonnières comme moi. Ces malheureuses créatures dont beaucoup étaient arrêtées depuis dix ans, se montrèrent plus pitoyables que nos bourreaux.
    — Entre-temps on m’a fait monter sur une table à plat-ventre. Et les coups commencent à pleuvoir inexorablement… Lorsque la commandante fut fatiguée de frapper, le commandant la relaya sans aucun remords.
    — Mes compagnes, mesdames Duteich et Arnaud, guettant ma sortie, me conduisirent aux douches pour me masser à l’eau chaude.
    — … Et puis les jours recommencèrent à passer trop lentement à mon gré.
    — Un jour… la Gestapo passa en tournée d’inspection à l’usine et malheureusement, plusieurs dossiers furent ouverts. L’un d’eux tomba sur l’annotation qui avait été ajoutée à mon dossier : « Rébellion… »
    — Je fus à nouveau convoquée et je reçus encore vingt-cinq coups de schlague. Soixante-quinze coups de schlague pour un réflexe instinctif, c’est beaucoup !… et pourtant c’est ce qui m’est arrivé. »

LES CONVOIS DE ZWODAU
    — Cela (147) était en moi, je ne le savais plus depuis bien longtemps, presque vingt ans ! Il a suffi d’un visage, d’une parole, pour que jaillisse en moi, avec une force

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