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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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trique !…
    — Enfin, tout s’éteignit.
    — Ainsi, sous l’œil bienveillant du nazi, le tsigane triomphant, tenait – croyait tenir du moins – sa cinquante-troisième victime et pouvait escompter sa prochaine promotion au grade supérieur qu’il avait malencontreusement perdu.
    — On me traîna dans une baraque en planches proche du chantier, ouverte à tous les vents et je fus jeté sans connaissance sur un tas de sacs de ciment éventrés, en attendant le recensement du Kommando, en fin de travail, et mon admission au rang des vivants ou des morts.
    — Vers 17 heures, au moment du remplacement de notre équipe par l’équipe montante, le Kapo, tenu de présenter son détachement au complet, m’envoya chercher et ne fut pas peu surpris de me voir ramené, sur mes jambes, par deux camarades de bonne volonté. Je repris lentement contact avec ce monde et me trouvai bientôt, je ne sais trop comment, aligné à mon rang, soutenu, aux aisselles, par mes voisins de droite et de gauche.
    — « Le voilà qui se réveille, dit à mon côté une voix chaude et bien timbrée, à l’accent méridional. Mon vieux, tu reviens de loin !
    — « Qui es-tu, dis-je. Tu es du Midi ?
    — « Jean Campana, Corse, mais Marseillais depuis toujours ! »
    — Je murmurai quelques mots de reconnaissance.
    — « Bah ! C’est la moindre des choses. On va rentrer pour l’appel. Peux-tu marcher ? Non ? Alors on va te porter !
    — Il m’empoigna par les épaules, un Russe s’empara de mes jambes et nous voilà partis, moi les pieds devant. Je voyais défiler, dans un balancement vertigineux, la neige, les pierres du chemin, les sapins et les cimes alpestres et je m’efforçais de garder ma connaissance et de ne pas laisser échapper à nouveau cette vie qui m’était si miraculeusement rendue ; mais les efforts que je fis pour y parvenir étaient au-dessus de mes forces et je m’évanouis à nouveau…
    — Campana ne considérait pas comme terminé son rôle de bon Samaritain. Alors que tous mes voisins de lit me considéraient comme à l’agonie, le brave Marseillais n’avait pas perdu espoir. Par faveur spéciale, il réussit à se faire délivrer ma ration de soupe, m’assit sur mon lit et me fit avaler le bouillon brûlant. Je sais bien que ma casaque en absorba la plus grande part, mais ce ne fut pas sans profit, car le liquide bouillant produisit sur ma poitrine sifflante l’effet de ventouses énergiques.
    — Bref, la nuit s’écoula sans me laisser aucun souvenir, et, le lendemain matin, j’eus la surprise de m’éveiller au commandement d’Aufstehen. J’embrassai de bon cœur Campana triomphant. Le secrétaire du Block, un Polonais douloureux qui avait beaucoup souffert par les Boches et qui, en cachette, osait me témoigner de l’intérêt, vint me féliciter de ma résurrection et m’annonça qu’il m’avait inscrit d’office, comme consultant, pour la visite médicale.
    — Le crématoire était frustré une fois de plus de ma sèche carcasse ; mais je lui en promis, in petto, une beaucoup plus grasse… et cette promesse fut tenue, non point par moi, mais par d’autres Français, car le tsigane avait beaucoup d’amis…
    — Les triangles (191) noirs marquaient des hommes qui, dans la vie courante, se tenaient en dehors des lois : presque tous vivaient en Allemagne, mais leur peau brune dénonçait une origine tsigane. Ils se caractérisaient en général par une bêtise assez rare et par leur nature excessive. Ou bien ils étaient d’une grande douceur ou bien d’une sauvagerie sans nom. Les premiers restaient simples détenus, n’ayant pas les qualités nécessaires pour jouir de responsabilités, mais n’étaient victimes d’aucun mauvais traitement, étant considérés comme allemands. Les seconds devenaient Kapos, jamais davantage, étant trop inintelligents pour devenir chefs de Block, poste où il fallait pouvoir tenir une conversation, savoir écrire et compter ses hommes. Parmi les Kapos tsiganes, l’un d’eux acquit à Ebensee une célébrité rarement atteinte. Il était connu sous la simple dénomination de Kapo tsigane. Il avait une souplesse et une force de tigre et fut responsable en moins d’un an de la mort de plusieurs centaines de détenus, particulièrement des Russes, des Yougoslaves et des juifs hongrois. Il eut une mort en parfaite harmonie avec le genre d’activité qu’il avait menée dans le camp. Le jour de la Libération,

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