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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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messieurs, qui veut une pierre ? C’est le tir, à la fête de Neuilly, montrez votre adresse et faites voir ce que vous savez faire. Tiens, il coule. Non ! Si ! Mains crispées et bulles.
    — Finale : embrasement général. Je n’avais encore jamais vu le crématoire. Alors, c’est là-dedans qu’on a failli aller. Celui-ci n’est pas encore tout à fait mort, cela va le réveiller. Ah ! le tsigane, eh bien ! qu’en dis-tu ? Ah ! non, ne sors pas du four, attrape un bon coup de barre de fer, mais pas sur la tête, il faut que tu savoures bien…
    — Secrète : on tue un peu partout, ce soir. Vous ne pouvez pas lire, cela vous fait horreur ? Nous, on ne vous en veut pas, vous ne pouvez pas savoir.
    — Moi, n’est-ce pas, je ne suis pas un sanguinaire. Et peut-être, après tout, ai-je moins souffert que les autres. Alors, je ne savais pas trop que faire.
    — Je connais tous ces hommes que l’on supprime, ce soir. Je sais leurs crimes. Ils ont égorgé, pendu, assommé, envoyé au fil électrique, noyé. Je sais bien tout cela. Mais l’atmosphère, ce soir, n’est guère différente des autres jours et je voudrais la paix, enfin la paix, et le silence. Les machines se sont tues, là-bas, aux tunnels. Il n’y a plus que de vagues rumeurs dans le camp. Mais là, tout près, un incendie ravage les baraques des S.S.
    — Que faire ? Ils ont raison, c’est sûr. Il faut bien laisser s’échapper comme par une soupape, le trop-plein des impatiences, des souffrances, des haines refoulées. Et l’on pourrait tout juste leur en vouloir, s’il s’agissait d’hommes normaux. Le plus grand crime des S.S. a été justement de tuer dans ces hommes tout ce qu’il y avait de spécifiquement humain. Le sang est bon à voir couler pour les hommes primitifs.
    — J’ai erré du côté des fosses ; ces fosses que nous sommes peu à connaître, celles où l’on a enfoui, par milliers de kilos, les cendres des corps brûlés au crématoire. Justement il y en a une d’ouverte, au bord de la route qui conduit au bâtiment du four. Elle bée, là. Elle contient les restes de huit cents camarades, au moins, et cela ne fait pas beaucoup de volume… Débris informes, comme de petits cailloux d’os, où l’œil du médecin reconnaît de-ci, de-là, une tête de fémur, un bout de côte.
    — Innocemment, les malades se serviront de cette fosse comme d’une feuillée, dans les jours qui suivront ; et, par ordre des Américains, on la refermera bien vite, après y avoir entassé tous les détritus du voisinage.
    — Je n’ai rien dit. Cela a-t-il une telle importance, les formes dont en entoure la mort.
    — Voyez, moi non plus, je ne suis plus tout à fait un homme civilisé.

LES CAMPS DU NECKAR
    Dans les camps du Neckar également, ce sont les Kapos tsiganes qui ont marqué le souvenir des déportés. Et pourtant, dans ces Kommandos du camp de Dachau, certainement plus de cinquante déportés tsiganes ont vécu le quotidien des condamnés à mort par le travail. Le docteur Roche a rencontré à la libération de Dachau un des survivants tsiganes des expériences sur l’eau de mer.
    — C’était l’un des plus jeunes. Il m’a raconté qu’eux, les tsiganes, étaient particulièrement surveillés par les Kapos tsiganes qui ne leur passaient aucune faiblesse. Ils n’étaient pas de même tribu, c’est ce qui explique ce comportement inhabituel. On pourrait même dire raciste. Dans les camps du Neckar, les groupes nationaux vivaient en communauté, ignorant les autres « étrangers ». Les Français entre eux, les Allemands entre eux, les tsiganes entre eux.
    — On (194) ne sait pas au juste ce qu’on reproche à quelques Français dans un Kommando, toujours est-il que l’Oberkapo tsigane, « le Négus », nous en veut sérieusement. Tandis que nous attendons la soupe, il ordonne, toujours armé de sa trique :
    — « Français, rahousse ! »
    — Nous nous rassemblons à part.
    — Quoique les commandements soient donnés en allemand, nous finissons par les comprendre. Pendant une demi-heure, pas de gymnastique ! Couchez-vous ! Debout ! Pas de gymnastique ! Couchez-vous ! Debout !
    — Alors que nous sommes étendus dans la boue, la brute passe dans les rangs pour nous bastonner le dos. Inutile de dire qu’il ne faut pas décomposer les mouvements pour se coucher ou se relever. Les retardataires ont droit à une ration supplémentaire de gourdin.
    — Quand la

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