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L'Homme au masque de fer

L'Homme au masque de fer

Titel: L'Homme au masque de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Bernède
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causer un inutile dérangement.
    Tout en reposant sur la table le verre qu’il s’apprêtait à porter à sa bouche, Henry répliqua d’un ton ferme :
    – Monsieur le gouverneur, excusez-moi, mais ce mécanisme, qui s’était détraqué, vient de se rétablir de lui-même.
    M. de Saint-Mars, qui ne pouvait moins faire que d’accepter cette explication fort plausible, reprit, cette fois, avec amabilité :
    – Je ne puis que me féliciter de cet accident qui me permet de rompre un silence qui, jusqu’alors, m’a été profondément pénible.
    – Monsieur le gouverneur, reprit Henry, j’ai pour principe de ne parler que lorsque j’ai quelque chose à dire… et, comme je n’avais rien à vous dire, je me taisais.
    – Pourtant, objecta M. de Saint-Mars, je vous avais mis bien à votre aise, puisque je vous ai prévenu que, si vous aviez quelques réclamations à m’adresser, je les écouterais toujours avec bienveillance, et que je ferais en sorte de leur donner satisfaction dans le domaine du possible.
    D’un ton ironique, le fils adoptif de Gaëtan reprenait :
    – Monsieur le gouverneur, je n’aurais qu’une réclamation à vous faire, mais vous ne pourriez y donner suite.
    – Dites toujours, fit M. de Saint-Mars.
    – Ce serait de me rendre la liberté.
    – Vous avez raison, monsieur, il ne faut point y compter.
    – Alors, conclut Henry, il y a bien des chances, monsieur le gouverneur, pour que vous n’entendiez plus d’ici longtemps le son de ma voix.
    Jugeant inutile d’insister, M. de Saint-Mars s’inclina. Le jeune homme, à travers les trous de son masque, lui jeta malgré lui un regard de défi. M. de Saint-Mars se retira, laissant le captif achever son déjeuner et savourer le beau rêve d’espoir qui mettait déjà du soleil dans son âme endeuillée.
    *
    * *
    Le même soir, vers dix heures, dans une maison isolée située aux alentours de Cannes, à l’entrée de la route en lacets qui conduisait, à cette époque, jusqu’à la hauteur de Théoule, et un peu en arrière du village de La Napoule, un grave conciliabule était tenu entre M me  de Chevreuse et le chevalier Gaëtan.
    Tous deux se trouvaient dans une pièce de faible dimension, assez sommairement meublée, dont la porte était fermée par un verrou à l’intérieur, et dont les deux fenêtres étaient recouvertes d’épaisses tentures.
    M. de Castel-Rajac, qui avait vraiment très belle allure sous son costume d’officier de mousquetaires, se tenait debout, la main sur la garde de son épée, le regard énergique et le sourire aux lèvres.
    M me  de Chevreuse, que l’assurance de son chevalier semblait rassurer, lui disait :
    – Alors, vous êtes décidé à renouveler vos exploits du château de Montgiron ?
    – Parfaitement ! répliqua le Gascon d’un air décidé.
    – N’est-ce point vous mettre en rébellion directe contre le roi, auquel vous avez fait serment de fidélité ?
    – C’est possible, mais, ma belle amie, j’avais fait, auparavant, un autre serment, celui de défendre, quoi qu’il arrive, envers et contre tout, mon fils d’adoption. C’est le seul qui compte, car, lorsque j’ai fait le second, je ne pouvais pas prévoir qu’il serait en contradiction avec le premier.
    » Ma bonne foi est donc évidente. D’ailleurs, je ne serais nullement surpris que le roi, lorsqu’il saura la vérité, non seulement me pardonne d’avoir mis fin à une infamie commise en son nom et dont il ne pouvait avoir eu connaissance, mais que, lorsque je lui aurai dit et prouvé que son frère n’a aucunement l’intention de lui disputer une couronne à laquelle il n’a aucun droit, mais qu’il veut vivre dans son ombre comme le meilleur et le plus fidèle de ses sujets, Sa Majesté, qui nous a déjà tant donné de preuves de son intelligence et de sa noblesse d’âme, ne tende la main au fils de sa mère. »
    Remarquant que Marie de Rohan ne semblait pas partager son optimisme, Castel-Rajac poursuivait :
    – On dirait que vous êtes encore inquiète !
    – Mais non !
    – Mais si ! Vous effraierais-je avec ce projet qui, pourtant, me semble le seul réalisable, si nous voulons vraiment sauver Henry ?
    – Non, répondit la duchesse avec fermeté, non, mon ami, vous ne me faites pas peur. Je vous admire, au contraire, de toutes mes forces, car votre loyauté est telle que vous la prêtez à tous avec une générosité imprudente. Voilà pourquoi, si je n’ai

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