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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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cette admiration qu’il lui avait toujours
accordée, il l’observait maintenant chaleureusement.
    — Majesté, le pays que vous avez laissé à
votre départ est, aujourd’hui, resté riche et puissant.
    Il laissa flotter son regard sur elle quelques
instants et reprit d’un ton plus bas :
    — Si ce n’est encore plus.
    Puis, il regarda Pouyemrê. Le Grand Trésorier
avait les yeux tournés vers la foule. Il acquiesça d’un signe de tête.
    — Et les caisses du temple ? jeta Senenmout
qui s’était silencieusement faufilé près de lui, mais que chacun avait vu.
    — Elles sont intactes, coupa sèchement
Pouyemrê, resté lui aussi en Égypte durant le séjour de la reine au Pays du
Pount. Pas une dépense inutile n’a été effectuée, si ce n’est la construction d’une
annexe des greniers à céréales tant les récoltes ont été fructueuses après la
crue de l’an passé.
    — Et la réfection de la grande chambre d’Anubis
dont les dégradations des murs étaient sur le point d’être prises en compte à
votre départ, Majesté, intervint Djéhouty en s’inclinant devant Hatchepsout.
    Le Grand Vizir du Sud n’avait pas perdu son
charme depuis que l’expédition avait quitté le port de Thèbes et que trois
crues du Nil étaient déjà passées. Sa silhouette restait svelte et son maintien
noble. Seuls, sur son teint buriné et sillonné de multiples petites rides, les
cheveux bouclés étaient devenus argentés. Djéhouty ne portait jamais de
perruque.
    Le regard qu’il dirigea vers Séchât, restée
debout parmi les autres dignitaires, non loin de la reine, fut de courte durée.
Mais l’éclat en fut si mordant qu’il attira l’attention de Neb-Amon, le médecin
qu’Hatchepsout avait décidé d’attacher à son service personnel.
    Comment Neb-Amon aurait-il pu ne pas entendre
les bruits malveillants qui circulaient depuis le retour des vaisseaux au sujet
de Séchât qu’il voulait épouser ? Certes, il avait appris par des bouches
indiscrètes la liaison passionnelle qui avait lié Séchât et Djéhouty avant le
départ du Pount [1] .
    Trop fin psychologue et surtout trop épris de
la jeune femme pour lui en tenir rigueur – la vie que celle-ci avait eue
avant leur rencontre ne le concernait pas – il se disait que tout ceci n’était
plus que du passé et que, seul, l’avenir importait.
    Il ne pouvait s’empêcher tout au plus de reconnaître
la valeur intègre de l’homme, le respect qu’il imposait par ses jugements
toujours justes et sensés et les égards que chacun lui prodiguait.
    Pour se rassurer, il jeta un regard prolongé
sur l’enfant qui dormait dans les bras de la jeune femme assise aux côtés de Djéhouty.
Le garçonnet devait avoir trois ans environ. Il avait la peau sombre de son
père et les cheveux aussi bruns et frisés que ceux de Djéhouty avant qu’ils ne
devinssent gris comme l’électrum qui recouvrait la paume de son poignard.
    À voir le comportement tranquille de cette
femme envers son époux, à juger par les petits poings tendus de l’enfant vers
la silhouette paternelle, il se dit que rien n’avait l’air de brouiller cette
harmonie familiale.
    Enfin, son regard croisa celui de Séchât et le
sourire qu’elle lui jeta acheva de le rassurer. D’ailleurs, la reine se
tournait vers lui et le prenait à partie.
    — Tu entreras au sein de notre conseil,
Neb-Amon. Il est juste qu’un praticien de ta valeur soit au courant des
affaires de l’État.
    Elle observa le visage impassible du médecin,
puis éleva ses deux mains au niveau de sa tête recouverte de la lourde perruque
à l’effigie du vautour et reprit :
    — Nous verrons tous ces détails dès notre
première assemblée. Pour l’instant, j’affirme à mon peuple que les dieux nous
ont été favorables et que, malgré la mort d’une dizaine d’hommes lors de l’épidémie
qui nous a surpris au cours du voyage, malgré la disparition en pleine mer de
quelques autres, notre expédition s’avère un succès triomphal.
    L’Égypte entière semblait à l’écoute et la
pharaonne jouissait pleinement de ce moment décisif qu’elle attendait depuis si
longtemps.
    Senenmout, le conseiller favori qui
bénéficiait des largesses les plus intimes de la reine, l’observait avec toute
l’acuité de ses yeux perçants et dominateurs. Trop conscient de l’importance de
cet instant pour le distraire par une répartie qui en eût aussitôt brisé l’élan,
il se tourna

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