Métronome
généalogique de toutes sortes de costumes…
Les Parisii deviendront les descendants d’Isis, déesse égyptienne, ou les enfants de Paris, prince de Troie et fils cadet du roi Priam… Ce prince mythologique avait enlevé Hélène, épouse de Ménélas, entraînant ainsi une guerre terrible entre Grecs et Troyens. Paris échappa aux coups du mari jaloux grâce à la déesse Aphrodite, qui parvint à cacher son protégé dans les brumes nébuleuses des cieux. Mais Troie fut rasée. Hélène retrouva Ménélas auquel on l’avait arrachée, et Pâris s’enfuit sur les bords de la Seine… où il aurait donné naissance à un peuple nouveau. Belle fable, qui ne repose sur rien, mais permit aux successeurs des Parisii de légitimer leur origine prestigieuse et divine. Saint Louis, au XIII e siècle, encouragea fortement la diffusion de ce mythe, qui perdura tout au long du règne des Capétiens…
— Notre civilisation n’est pas née d’une bande de voyageurs celtes, nous avons la même noble ascendance que les Romains, semblaient répéter les rois francs.
Mais pour l’heure, c’est justement aux Romains d’être les plus puissants, d’imposer leur culture et leur langue, de s’approprier mythes et légendes pour justifier leurs prétentions sur le monde. Non, les Romains ne représentent pas les reliquats d’une quelconque tribu indo-européenne installée dans la future Italie au VIII e siècle avant Jésus-Christ.
— Nous sommes, assurent-ils, issus de la race des dieux et des héros !
C’est le raisonnement qu’avait suivi jadis Homère avec L’Iliade et L’Odyssée , légitimant, lui, la suprématie des Grecs sur les peuples de la Méditerranée. Ensuite, Virgile écrivant L’Énéide au I er siècle avant notre ère a suivi le mouvement. Ce récit n’est que le calque de l’œuvre de son illustre prédécesseur, sauf que les héros ne sont plus des Grecs mais des Troyens, et un Troyen en particulier : Énée, fils de la déesse Aphrodite. Après la chute de Troie, il s’enfuit pour fonder Rome, emportant avec lui son fils Iule, aïeul de César (Jules est le nom de famille de celui qu’on surnomme César, il provient de Julia : en latin lei et le j sont confondus). César, descendant des dieux, peut donc prétendre dominer le monde.
En cette année 52 avant notre ère, les Romains sont en passe d’attaquer les modestes Parisii et d’envahir leur territoire des bords de la Seine… Ce peuple gaulois a eu le tort de se rallier, parmi les premiers, à un certain Vercingétorix, chef arverne bien décidé à coaliser les tribus gauloises pour repousser l’envahisseur. Jules César, soucieux de discipliner ces marches du futur empire, envoie sur les bords du fleuve son meilleur général, Titus Labienus.
L’officier romain s’avance à la tête de quatre légions et d’une troupe de cavalerie. Du côté des Lutéciens, c’est l’affolement ! Comment va-t-on se défendre contre la puissance surgie de la louve ? On fait précipitamment venir de Mediolanum Aulercorum – aujourd’hui Évreux – un vieux chef que tout le monde appelle respectueusement Camulogène, ce qui signifie « fils de Camulus »… fils du dieu gaulois de la Guerre. Avec un surnom aussi martial, le bonhomme devrait parvenir à assurer fièrement la sécurité de la ville. En tout cas, les habitants lui confient unanimement leur destin : à lui d’organiser la riposte, à lui de repousser l’ennemi.
Mais que peut faire le bon vieillard ? Il est placé à la tête d’une petite armée mal entraînée dont les soldats, plus courageux qu’efficaces, s’apprêtent à combattre nus jusqu’à la ceinture, armés seulement de quelques haches et de lourdes épées coulées dans un mauvais métal…
Labienus et ses légionnaires avancent inexorablement. Camulogène croit pourtant en sa bonne étoile et prépare la défense. Ce n’est pas dans la ville qu’il attend les Romains, mais aux abords, dans un bivouac dressé au milieu des marais, au cœur de la zone humide qui enserre Lutèce.
Bientôt, Labienus fait face au camp improvisé des Gaulois. La confrontation est inévitable. Les Romains, parfaitement disciplinés, casqués d’airain et cuirassés d’acier, progressent en rangs serrés. Mais ces légionnaires, guerriers des sols fermes, aux tactiques rompues dans les vastes étendues des plaines, se trouvent vite déstabilisés par ces espaces mouvants entre terre et eau. Ici, les barques
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