Mon frère le vent
l'assurance de sa propre force.
Une troisième voix s'éleva et, cette fois, Samig observa attentivement le Corbeau, la façon dont il tenait sa tête. Il observa sa bouche, la raideur de ses lèvres. C'est une ruse, se dit Samig — rien qu'une ruse.
Alors Samig fit comme s'il n'avait rien entendu.
— Kiin est ma femme, déclara-t-il. Elle restera ici, avec moi.
— Vaut-elle ta vie ?
— Oui, et la tienne aussi.
— Alors, as-tu appris à te battre au couteau ?
— Je combats avec bien plus, dit Samig en levant la main droite. Cette lame exige ton sang. Avec elle tu as tué mon frère — cette lame qu'il a faite lui-même. Depuis ce jour, ce couteau ne veut rien d'autre que le goût de ton sang.
— Tes nombreuses paroles montrent seulement que tu crains mes armes, rétorqua le Corbeau.
Il bondit en avant et sa lame décrivit un arc de cercle en direction du ventre de Samig qui recula avec un cri de dégoût venu du fond de sa gorge.
Samig fit trois pas rapides et se plaça de côté pour donner moins de prise à la lame du Corbeau. Lorsque celui-ci s'avança, Samig zébra l'air de sa main gauche, provoquant une longue estafilade à l'avant-bras du Corbeau. Le sang avait jailli dès la première estocade.
Le Corbeau recula et Samig bondit de nouveau à l'assaut, bloquant le bras droit du Corbeau à l'aide de son
bras gauche, bras contre bras, os contre os. Puis, de sa main droite, il brandit la longue lame d'obsidienne noire du couteau d'Amgigh. Il taillada jusqu'au sang le ventre du Corbeau. Quand la blessure s'ouvrit, Samig entendit le sifflement de la respiration de ceux qui se tenaient derrière lui.
— Tu es lent, dit Samig qui, attaquant une fois de plus, balafra la joue du Corbeau.
Le Corbeau ne broncha pas. Il s'avança pour affronter le coup de Samig et, de sa main droite, frappa d'une longue meurtrissure le flanc de Samig ; la lame traversa la peau pour effleurer les côtes. Mais Samig, sans se soucier de la douleur, visa le cou du Corbeau. Celui-ci pivota si rapidement sur lui-même que la lame de Samig ne rencontra que des cheveux. A son tour, le Corbeau se lança pour viser l'épaule avec son couteau gauche, mais Samig se laissa tomber, enfermant volontairement les pieds du Corbeau dans les siens. Le Corbeau s'affala lourdement sur le ventre, son couteau gauche se fichant dans le sable jusqu'à la garde.
Le Corbeau tira son couteau, les deux hommes se relevèrent, le corps maculé de sang, le souffle lourd et bruyant.
— Tu as beaucoup appris, remarqua le Corbeau avant de marquer une pause comme s'il voulait donner à Samig le temps de répondre.
Mais Samig ne dit rien. Alors, genoux pliés, le Corbeau ajouta :
— Le pouvoir n'est rien de plus que des bras puissants et de bons couteaux, Traqueur de Phoques.
Il éleva la voix, appela en direction de l'obscurité, en langue Morse.
Samig vit les ikyan qu'il savait être là, pas seulement les ikyan longs et peu maniables des Chasseurs de Morses, mais ceux fins et élancés des Chasseurs de Baleines.
— Tu crois pouvoir échapper à un tel peuple, Traqueur de Phoques ? demanda le Corbeau.
Mais la voix de Kayugh s'éleva au-dessus de celle du Corbeau.
— Samig, concentre-toi sur ce combat, ne pense qu'aux couteaux.
C'est alors qu'une voix surgit des ikyan, une voix connue de Samig : Roc Dur.
— Meurs maintenant. Meurs vite, Tueur de Baleines, dit-il en utilisant le nom Chasseur de Baleines de Samig. Ma vengeance ne sera pas aussi rapide que celle du Corbeau. Tu espéreras le tranchant rapide du couteau si tu attends de mourir de ma main.
— Samig ! répéta Kayugh.
Mais l'avertissement vint tard et, avant que Samig ne puisse lever ses couteaux, la lame du Corbeau avait fait une plaie dans son bras droit et son couteau gauche menaçait la gorge de Samig.
Samig rassembla ses forces et repoussa son adversaire avant qu'il ne frappe à nouveau puis, de sa main gauche, provoqua une zébrure peu profonde en travers de sa poitrine.
Les deux hommes décrivirent des cercles et le Corbeau entonna des incantations incompréhensibles pour Samig.
Une autre voix se fit entendre, une voix de femme, puissante, montant des ulas des Premiers Hommes.
— Le Corbeau, tu as gagné le précédent combat grâce à mon pouvoir, grâce au pouvoir de mes sculptures.
Kiin parut et se tint près d'un des feux, ses fils dans ses bras. Les flammes éclairaient son visage et celui de ses fils.
— Le Corbeau, s'écria-t-elle, cette
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