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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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non, Morgennes se trompait. Car il y avait, çà et là, des ossements. À en juger par leur état, certains devait être vieux de plusieurs siècles. Os à moitié rongés, abandonnés, îlots formés par un tas de squelettes, désordres de cages thoraciques et chaos de crânes aux orbites évidées. Impossible de faire un pas dans ces marécages sans faire craquer un os sous sa semelle. Ce sinistre spectacle lui en rappela confusément un autre, dans la cour d’un palais, à Jérusalem. C’était il y a bien, bien longtemps. Un roi fêtait son couronnement. Et une troupe de théâtre était tombée à point nommé pour y jouer une pièce narrant… le combat d’un chevalier contre un dragon ! Morgennes en était sûr à présent : ces marécages, Noir Lac, cachaient une grotte où vivait un dragon. Portant la main au côté, il s’empara de la petite épée qu’il avait prise à Dodin, et se prépara à combattre.
    Mais l’heure n’était pas au combat. D’ailleurs, la musique retentissait toujours, de plus en plus distinctement. Cherchant à s’orienter dans ce dédale sans couloirs, Morgennes repéra quelques branches d’arbres qui dépassaient de l’eau comme autant de bras appelant au secours. L’Arche ne devait plus être très loin, il en avait la conviction. Des dizaines de lumières blanches s’allumèrent autour de lui. Il ne savait pas si elles étaient proches ou lointaines, petites ou grosses – mais elles étaient fort nombreuses. Elles flottaient dans l’air, sans faire de bruit. Curieusement, cela l’emplit de bonheur. Il avait l’impression d’une présence réconfortante, et se rappela sa mère – elle était sortie sur le perron de leur petite demeure, et l’appelait : « Morgennes, viens manger ! »
    Elle appelait aussi sa sœur, mais ne la nommait pas.
    D’ailleurs, comment s’appelait-elle ? Morgennes eut beau chercher dans sa mémoire, il ne s’en souvenait pas. Oubliés, également, les prénoms de ses parents. Mais il revoyait très bien sa mère, ses longs cheveux arrangés en une natte pendant dans son dos, son tablier immaculé, et ses mains, douces et fines – ce n’étaient pas des mains de paysanne.
    Son père, portant son marteau sur l’épaule, s’en revenait de la forge. Les « clang ! clang ! clang ! » et autres « ting ! ting ! ting ! » s’étaient tus, et seul subsistait le vrombissement du foyer – que son père gardait constamment allumé.
    Jamais il ne l’avait éteint. Peu importait la quantité de bois qu’il devait y enfourner, son père ne laissait pas le feu mourir. Morgennes eut un vague sourire. « Qu’avait donc ce feu de si particulier ? Pourquoi était-il si précieux ? »
    Soudain, il entendit une voix. C’était sa sœur, elle l’appelait :
    — Morgennes !
    Il regarda de droite et de gauche, demanda :
    — Où es-tu ?
    Mais il n’y avait personne. Ce devait être un fantôme.
    Une fois de plus, il délirait.
    Alors, en désespoir de cause, il se mit à siffler la douce mélodie de l’orgue, et cela lui rendit quelque force. Ragaillardi, il reprit sa route en direction de l’Arche.
    Des ombres se dessinèrent devant lui.
    Plusieurs hommes et femmes à la peau foncée, oscillant entre le bronze et le noir, étaient accroupis dans l’eau, tête baissée, au milieu des sangsues. Ils rappelaient les adeptes de la secte des ophites – ces mêmes centaines de personnes qui avaient adoré le Serpent sous les yeux de Morgennes, au temple d’Apopis. Cela lui parut être dans une autre vie. Étaient-ils venus là en quête de la Queue du Serpent ?
    Morgennes marcha parmi eux, cherchant à croiser leur regard. Mais tous avaient les yeux vides. Les petites lumières jouaient au-dessus d’eux, les illuminant un court instant avant de les renvoyer dans l’ombre. Sauf que ce n’étaient pas des lumières. C’était…
    Il en attrapa une, la serra dans son poing et pencha la tête pour l’observer. C’était un petit papillon blanc. Mort, apparemment. Morgennes lui souffla dessus. Alors le papillon se secoua doucement, devint noir, puis s’envola, semant dans son sillage de fins nuages de poussière noire et blanche – qui clignotait bizarrement. Morgennes se rendit compte que les lumières puisaient au rythme de la musique d’orgue, qui jouait toujours, de plus en plus près de lui. Bêtement, sans savoir pourquoi, il appela :
    — Dodin ?
    — Par ici ! lui répondit une voix flûtée.
    Ce

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