Napoléon

chasseurs de la Garde, sur son char, entouré de Victoires, passe sous l’Arc de Triomphe de l’Étoile, cette arche à la mesure de sa gloire et qu’il a offerte à Paris. Au son d’une marche funèbre, il descend la plus belle avenue du monde que, d’un coup de plume, traça un jour le jardinier du Roi-Soleil.
    À Sainte-Hélène, l’Empereur avait prédit à ses compagnons :
    — Vous entendrez encore Paris crier Vive l’Empereur !
    Et la foule en voyant marcher maintenant derrière le cercueil ces vétérans de gloire les salue du cri qui, autrefois, sur les champs de bataille, faisait trembler l’ennemi, leur annonçant que Napoléon était présent — et qu’il allait les battre :
    — Vive l’Empereur !
    Grenadiers, chasseurs de la Vieille Garde, dragons de l’Impératrice, dragons de la mort, lanciers rouges, tous passent, bombant le torse, relevant la tête pour cette ultime parade, pour ce défilé de fantômes. Et le coeur de ces revenants bat à se rompre tandis qu’ils accompagnent leur Empereur vers le dôme étincelant d’or qui préservera désormais son sommeil éternel.
    Le maréchal Moncey, gouverneur des Invalides, âgé de quatre-vingt-sept ans, s’est fait porter dans son fauteuil jusqu’au pied du catafalque. Depuis huit jours, il suppliait son médecin :
    — Docteur, faites-moi vivre encore un peu. Je veux recevoir l’Empereur !
    À l’entrée du Dôme, Louis-Philippe s’avance au-devant du cortège. À sa demande, Bertrand place l’épée de Napoléon sur le cercueil et Gourgaud y dépose le chapeau légendaire.
    Lorsque fut terminé le long service religieux, on entendit Moncey murmurer :
    — À présent, rentrons mourir...
    FIN