Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
de Cleonicus, un serviteur qui vivait à ses côtés depuis plusieurs lustres. Sénèque l’avait affranchi, satisfait de son dévouement, de son intelligence à le servir.
    Après l’avoir écouté, Cleonicus était tombé à genoux, avait saisi la main de son maître et lui avait confié qu’il avait reçu l’ordre de Néron de préparer du poison et de tuer ainsi Sénèque.
    — Fuis, quitte Rome, quitte l’Italie ! lui dit ce dernier en le relevant. Va en Espagne, ma famille t’accueillera. Change de nom.
    Mais Cleonicus hésita à suivre ces conseils. Il laissa passer plusieurs jours et on le retrouva égorgé devant la statue d’Apollon où Sénèque et moi avions l’habitude de deviser.
     
    Telle était Rome, désormais. Tel était l’Empire.
     
    Dans la ville de Préneste, des gladiateurs avaient tenté de s’enfuir et la plèbe murmurait qu’allait commencer une nouvelle guerre servile comme celle qui avait été jadis conduite par Spartacus.
    Malgré l’effroi que suscitait ce souvenir, je décelais comme le tremblement hésitant d’un espoir. Car la plèbe tout à la fois était avide de changements et les redoutait.
     
    Ces jours-là, alors que l’année de l’incendie s’achevait, on aperçut dans le ciel de Rome une comète.
    Sur le forum et le champ de Mars, la foule avait les yeux levés, les bras tendus.
    Debout sur les bornes, des astrologues prétendaient que le passage d’une comète annonçait toujours que le sang allait couler.
    Autour de moi on s’interrogeait : qui allait mourir ? Quel sang les dieux allaient-ils répandre ? Celui de Néron ou celui des ennemis qu’il se choisirait ?
    La rumeur que se préparait une conspiration contre l’empereur, je la sentis gonfler, nourrie de tous les présages qui se multipliaient.
    On signalait la naissance de nombreux embryons d’hommes ou d’animaux à deux têtes.
    Le long de la via Appia, on avait découvert un veau qui avait une tête sur la cuisse.
    Que voulaient dire les dieux en modelant ces monstres ?
    Certains, parmi la plèbe, chuchotaient que le Dieu des chrétiens annonçait ainsi sa prochaine vengeance après les supplices infligés à ses fidèles.
    Mais les devins consultés assurèrent que cela signifiait que bientôt le genre humain allait avoir une autre tête.
    Or l’empereur du genre humain, pour l’heure, se nommait Néron.

 
     
     
     
     
NEUVIÈME PARTIE

 
     
39
    Je n’ai pas cru les devins.
    La tête de Néron me paraissait aussi solidement vissée sur ses épaules qu’une verrue sur la peau.
    Je ne le quittais pas des yeux quand il s’avançait sur la scène de l’amphithéâtre, entouré par les préfets du prétoire, Tigellm et Faenius Rufus, qui portaient sa lyre. Il était suivi des tribuns militaires et de ses amis les plus intimes, ses délateurs, ses affranchis, ses compagnons de débauche et de crimes.
    Les spectateurs se levaient dès qu’il apparaissait et commençaient à scander, répétant qu’ils désiraient entendre la « voix céleste de leur empereur ».
    C’était à l’ouverture des jeux néroniens dont il avait avancé la date, tant il avait hâte d’être applaudi, sacré pour ses talents d’acteur, de chanteur et de citharède.
    Il baissait la tête comme si ces acclamations l’avaient intimidé et gêné.
    — Ta voix céleste, Néron, nous la voulons ! criait-on.
    Il minaudait, répondait qu’il réaliserait leur désir dans ses jardins.
    Je voyais Tigellin se tourner vers les prétoriens et ceux-ci imploraient aussitôt l’empereur de chanter, de jouer « tout de suite », dans l’amphithéâtre, pour le peuple de Rome, afin que la voix céleste s’élevât enfin. Néron faisait mine d’hésiter puis s’inclinait, cédait.
    Oui, on allait l’entendre, puisque le peuple de Rome le voulait, mais il ne chanterait, il ne jouerait qu’à son tour, après les autres citharèdes, car il n’acceptait aucune faveur, demandant seulement qu’on le jugeât pour son art.
    Les Augustiani criaient, la plèbe se joignait à eux.
    Alors la vanité empourprait son visage et il se mettait à chanter Oreste meurtrier de sa mère, Œdipe devenu aveugle, Hercule emporté par la fureur. Il se laissait couvrir de chaînes, parer comme pour le sacrifice afin de tenir son rôle, tel un acteur de métier.
    Et l’on murmurait qu’il avait même songé à se louer pour des spectacles privés, lui, l’empereur du genre humain, et à se faire payer un million de

Weitere Kostenlose Bücher