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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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sesterces par le préteur qui lui avait fait cette proposition !
    Au fur et à mesure qu’il chantait, l’ivresse le gagnait. La foule continuait de l’applaudir, parce qu’on savait que celui qui manifesterait de l’ennui serait battu à mort par les hommes de Tigellin.
     
    Cependant, je lisais sur les visages de nombreux sénateurs, chevaliers, prétoriens le mépris et la haine.
    Ceux-là n’acceptaient pas, en cette onzième année de règne, que cet empereur de vingt-huit ans osât se comporter en histrion à Rome même, à quelques centaines de pas du forum et du Sénat, du temple d’Auguste, des statues de César, des trophées pris aux peuples vaincus.
    À Naples, dans cette ville grecque, c’était déjà indigne ; à Rome, cela devenait sacrilège !
    Il fallait que la tête de Néron, comme les présages l’annonçaient, fut tranchée et qu’un autre empereur lui succédât.
    Il fallait qu’il respectât les traditions de Rome, ses dieux, ses lois, son Sénat.
    Il fallait qu’il renonçât à faire de la plus grande ville du monde une cité d’Orient, une autre Alexandrie, et qu’il cessât d’apparaître sous les traits d’un roi d’Asie, d’un pharaon, fils du Soleil, empereur-Horus.
    Rome avait réussi, il y avait cinq lustres, à se débarrasser d’un empereur fou, Caligula. Pourquoi une nouvelle conspiration ne viendrait-elle pas à bout du pouvoir de Néron ?
     
    Or Néron, à entendre ceux qui le haïssaient et le méprisaient, était pire que Caligula.
    Il avait mis le feu à Rome ou laissé l’incendie se répandre pour pouvoir bâtir cette Maison dorée construite sur les terrains et les ruines de villas qui ne lui appartenaient pas.
    Il flattait la plèbe, mais il proscrivait, assassinait tous ceux qui, par leurs ancêtres, risquaient d’apparaître ses rivaux.
    Il diminuait la teneur en or et en argent des monnaies.
    Il enfonçait ses mains de femme dans les coffres de l’État et se servait des impôts pour payer ses putains et ses banquets de débauche.
    Et, par le poison ou le glaive, sans qu’on pût parfois comprendre ses motivations, il tuait.
    Peut-être voulait-il simplement s’emparer des biens de ses victimes ou écoutait-il l’un de ses délateurs qui lui avait jeté un nom en pâture, prétendant que cet homme-là, un proche pourtant, conspirait contre lui, et Néron ordonnait aussitôt qu’on mît à mort cet ami accusé sans preuve.
     
    Car je découvrais aussi, en observant ses rictus, sa bouche qui se tordait, ses paupières qui se plissaient, que la peur rongeait Néron tel un ver caché dans la vanité et la certitude d’être dieu.
    Il n’était rassuré qu’en ordonnant la mort de tous ceux qui pouvaient représenter pour lui une menace.
    Lui aussi se souvenait de Caligula, de la manière dont les conspirateurs s’étaient jetés sur l’empereur et l’avaient achevé en lui portant trente coups de poignard, cependant que d’autres enfonçaient leur glaive dans les parties qu’on dit honteuses.
    Néron tuait pour chasser sa hantise de connaître le sort de Caligula, pour repousser cette peur qui faisait brusquement pâlir son visage, même lorsqu’il était en scène et qu’il voyait un homme s’avancer vers lui.
    Cet effroi, cette panique qu’il ne parvenait pas à maîtriser et qui, comme un brutal et inattendu accès de fièvre, le terrassait, augmentait le mépris – et l’espoir – de ceux qui rêvaient d’en finir avec lui.
     
    J’ai connu la plupart d’entre eux.
    Certains étaient des hommes courageux et désintéressés qui ne pensaient qu’à la gloire de Rome.
    Le tribun d’une cohorte prétorienne, Subiras Flavus, et le centurion Sulpicius Asper étaient de ceux-là.
    Ils avaient songé à tuer Néron alors qu’il était seul en scène, afin de profiter de ces instants où les prétoriens de Tigellin ne pouvaient l’entourer et se tenaient à plusieurs pas de lui.
    Mais ils y renoncèrent parce qu’ils voulaient aussi sauver leur propre vie.
     
    Je me souviens qu’après avoir écouté ce récit Sénèque a baissé la nuque comme s’il était déjà devant le bourreau, attendant que le glaive s’abattît.
    — Le désir d’immunité nuit toujours aux grandes entreprises, a-t-il murmuré. Celui qui n’ose pas offrir sa vie en sacrifice, comment peut-il penser réussir à atteindre un but presque inaccessible ? Quel dieu favoriserait un homme qui ne voudrait pas payer le prix de son succès ?
    J’ai

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