Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
la tyrannie de leur propre mouvement, et sans même être assurés qu'ils seraient soutenus par nous.
BONAPARTE.
Au directoire exécutif.
Je vous ferai passer, citoyens directeurs, une proclamation sur Modène. Ces petits régentaux s'avisent de conspirer, je les ai prévenus. Pourquoi faut-il que je n'aie pas deux brigades pour en faire autant à Rome ? Mais je n'ai pas de troupes disponibles, et Naples est là qui nous obligerait à rétrograder. L'affaire de Modène améliore un peu notre position.
Je suis ici environné de voleurs ; j'ai déjà trois commissaires des guerres, deux administrateurs et des officiers au conseil militaire.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Milan, le 18 vendémiaire an 5 (9 octobre 1796).
Au commissaire du gouvernement.
Il faudrait, je crois, réunir un congrès à Modène et à Bologne, et le composer des députés des états de Ferrare, Bologne, Modène et Reggio ; les députés seront nommés par les différens gouvernemens, de manière que l'assemblée soit composée d'une centaine de personnes. Vous pourriez faire la distribution proportionnée à la population en favorisant un peu Reggio. Il faudra avoir soin qu'il y ait parmi ces députés des nobles, des prêtres, des cardinaux, des négocians et de tous les états, généralement estimés patriotes. On y arrêterait, 1°. l'organisation de la légion italienne ; 2°. l'on ferait une espèce de fédération pour la défense des communes ; 3°. ils pourraient envoyer des députés à Paris pour demander leur liberté et leur indépendance. Ce congrès ne devrait pas être convoqué par nous, mais seulement par des lettres particulières : cela produirait un grand effet, et serait une base de méfiance et d'alarme pour les potentats de l'Europe, et il est indispensable que nous ne négligions aucun moyen pour répondre au fanatisme de Rome, pour nous faire des amis et pour assurer nos derrières et nos flancs. Je désirerais que ce congrès fût tenu le 23 de ce mois. Je vous prie de prendre en grande considération cet objet, je ferai en sorte de m'y trouver pour cette époque. Nous sommes ici sans un sou, et tout coûte. Procurez-nous de l'argent.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Milan, le 19 vendémiaire an 5 (10 octobre 1796).
Au chef de l'état-major.
Vous voudrez bien, général, donner l'ordre de faire arrêter l'officier qui commandait le poste de la Chiuza lors de l'affaire du 11 thermidor, et le faire traduire au conseil militaire comme traître ou lâche, ayant rendu ce poste sans raison et sans y être forcé.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Milan, le 20 vendémiaire an 5 (11 octobre 1796).
Au directoire exécutif.
L'affaire de Modène, citoyens directeurs, a parfaitement réussi : ce pays est content et heureux de se voir délivré du joug qui pesait sur lui. Les patriotes sont nombreux et en place. Je vous enverrai différens imprimés qui vous mettront au fait de la tournure que je donne à l'esprit pour opposer fanatisme à fanatisme, et nous faire des amis des peuples qui, autrement, deviendraient nos ennemis acharnés. Vous y trouverez l'organisation de la légion lombarde. Les couleurs nationales qu'ils ont adoptées sont le vert, le blanc et le rouge.
Parmi les officiers, il y a beaucoup de Français ; les autres sont des officiers italiens, qui, depuis plusieurs années, se battent avec nous à l'armée d'Italie. Le chef de brigade est un nommé Lahoz, milanais : il était aide-de-camp du général Laharpe. Je l'avais pris avec moi ; il est connu des représentans qui ont été à l'armée d'Italie, et spécialement du citoyen Ritter.
Je vous enverrai un manuscrit de l'organisation que je compte donner à la première légion italienne. À cet effet, j'ai écrit aux commissaires du gouvernement pour que les gouvernans de Bologne, de Modène, de Reggio et de Ferrare aient à se réunir en congrès : cela se fera le 23. Je n'oublie rien de ce qui peut donner de l'énergie à cette immense population, et tourner les esprits en notre faveur. La légion lombarde sera soldée, habillée, équipée par les Milanais. Pour subvenir à cette dépense, il faudra les autoriser à prendre l'argenterie des églises, ce qui vient à peu près à 1,000,000.
Je vous enverrai différentes lettres avec différentes notes du citoyen Cacault.
Tout annonce que, d'ici à un mois, de grands coups se porteront en Italie. D'ici à ce temps, il faudra avoir conclu une alliance avec Gênes ou avec le roi de
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