Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
l'indépendance de la Lombardie, puisque cet article porte textuellement :
«S. M. l'empereur renonce (et non pas renoncera) à la partie de ses états en Italie qui se trouve au-delà de la rive droite de l'Oglio et de la rive droite du Pô.»
S. M. l'empereur ne devait occuper le territoire vénitien qu'à la paix définitive, et cependant elle s'empare de la Dalmatie et de l'Istrie, c'est-à-dire des plus belles provinces de la république de Venise ; elle en chasse les garnisons, y établit son gouvernement, et le cabinet de Vienne se plaint du changement de gouvernement de Venise !
S. M. l'empereur ne dissimule pas son impatience d'entrer en possession des états de cette république, elle les voudrait tous : elle n'en excepte ni les débouchés de l'Adige et de la Brenta, ni lu ville de Venise elle-même, et cependant le cabinet de Vienne se dit animé d'une grande sollicitude pour cette ancienne république !
L'armée française occupe, il est vrai, les états de Venise, comme elle le faisait avant les préliminaires ; elle occupe de plus la ville de Venise ; mais elle ne s'y tient que comme auxiliaire ; ses troupes ne s'y mêlent en aucune manière d'affaires politiques, et si quelques agens subalternes de S. M. l'empereur ont été insultés, on ne doit sans doute l'attribuer qu'au ressentiment de la part des Vénitiens de la violence qu'a exercée l'armée impériale en entrant dans l'Istrie et la Dalmatie : les plénipotentiaires ne pouvaient qu'interposer leur médiation entre S. M. l'empereur et roi et la république de Venise ; ils l'ont fait.
C'est cependant en conséquence des préliminaires, sur lesquels le cabinet de Vienne n'insiste que lorsqu'il les a expliqués d'une manière désastreuse pour la France, et quelquefois pour l'empereur lui-même, que cinq provinces autrichiennes ont été restituées à S. M., que le port intéressant de Trieste, et, avec lui, la faculté de reprendre son commerce, lui ont été rendus.
Quant au changement de gouvernement à Venise et à Gênes, la république française n'y a pris aucune part : elle ne s'en est mêlée qu'à la demande des peuples, et pour éloigner les excès qui s'attachent ordinairement au berceau des révolutions.
C'est donc aux gouvernemens de ces deux peuples que doivent s'adresser les plénipotentiaires de S. M. impériale, pour tout ce qui les concerne.
Et comment les plénipotentiaires français ne seraient-ils pas frappés de l'insincérité apparente du cabinet de Vienne, lorsqu'il paraît affecté d'un changement arrivé à Venise, qui rend beaucoup plus facile l'exécution des préliminaires ? Cette conduite ne semble-t-elle pas offrir une preuve d'un dessein formel du cabinet de Vienne de ne pas les exécuter ?
Pour ce qui est de l'affaire du duc de Modène, elle ne regarde en aucune manière le gouvernement français : c'est une affaire de lui à ses peuples.
S. M. l'empereur, sur la seule promesse de conclure sa paix séparée, a obtenu la restitution de cinq provinces et l'éloignement de l'armée française de sa capitale : aujourd'hui, que cette paix n'est pas encore conclue, nonobstant le texte des préliminaires, le cabinet de Vienne veut avoir cinq ou six forteresses et une grande partie de l'Italie, et c'est en faisant également des promesses qu'il croit les obtenir ! Mais, après avoir vu élever tant d'obstacles qu'il était facile d'écarter ; après que les lenteurs extrêmes du cabinet de Vienne, et ses refus prolongés d'adopter une marche qui convient aux intérêts des deux puissances, ont si considérablement ajouté aux difficultés qui s'opposent à la paix, les soussignés se voient forcés de recueillir les voeux du cabinet de Vienne pour cette paix, plutôt dans des faits que dans des protestations qui, jusqu'ici, n'ont rien produit que d'illusoire, doivent à la république, qui les a honorés de sa confiance, de ne s'écarter aucunement, dans le dessein de faire quelque chose d'agréable à S. M. I., du strict sens des préliminaires, d'après lesquels S. M. ne doit entrer qu'à la paix définitive dans les états de Venise.
Si S. M. croit qu'il est de son intérêt d'occuper sur-le-champ ces états, qu'elle fasse la paix sans délai ; mais si le cabinet de Vienne veut continuer à en empêcher la conclusion, l'intérêt de la république française exige que les pays de Venise et les forteresses soient entre les mains de son armée.
Quelque affligeant qu'il serait pour les
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