Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
d'intrigues qui composaient sa société habituelle.
En conséquence il fut rappelé, on annonça pour lui succéder M. le baron de Knobelsdorff, homme d'un caractère plein de droiture et de franchise, et d'une moralité parfaite.
Cet envoyé extraordinaire arriva bientôt à Paris, porteur d'une lettre du roi de Prusse, datée du 23 août.
Cette lettre était remplie d'expressions obligeantes et de déclarations pacifiques, et l'empereur y répondit d'une manière franche et rassurante.
Le lendemain du jour où partit le courrier porteur de cette réponse, on apprit que des chansons outrageantes pour la France avaient été chantées sur le théâtre de Berlin ; qu'aussitôt après le départ de M. de Knobelsdorff les armemens avaient redoublé, et que, quoique les hommes demeurés de sang-froid eussent rougi de ces fausses alarmes, le parti de la guerre soufflant la discorde de tous côtés, avait si bien exalté toutes les tètes que le roi se trouvait dans l'impuissance de résister au torrent.
On commença dès-lors à comprendre à Paris, que le parti de la paix ayant lui-même été alarmé par des assurances mensongères et des apparences trompeuses, avait perdu tous ses avantages, tandis que le parti de la guerre mettant à profit l'erreur dans laquelle ses adversaires s'étaient laissé entraîner, avait ajouté provocation à provocation, et accumulé insulte sur insulte, et que les choses étaient arrivées à un tel point, qu'on ne pourrait sortir de cette situation que par la guerre.
L'empereur vit alors que telle était la force des circonstances, qu'il ne pouvait éviter de prendre les armes contre son allié.
Il ordonna ses préparatifs.
Tout marchait à Berlin avec une grande rapidité : les troupes prussiennes entrèrent en Saxe, arrivèrent sur les frontières de la confédération, et insultèrent les avant-postes.
Le 24 septembre, la garde impériale partit de Paris pour Bamberg, où elle est arrivée le 6 octobre. Les ordres furent expédiés pour l'armée, et tout se mit en mouvement.
Ce fut le 25 septembre que l'empereur quitta Paris ; le 28 il était à Mayence, le 2 octobre à Wurtzbourg, et le 6 à Bamberg.
Le même jour, deux coups de carabine furent tirés par les hussards prussiens sur un officier de l'état-major français. Les deux armées pouvaient se considérer comme en présence.
Le 7, S. M. l'empereur reçut un courrier de Mayence, dépêché par le prince de Bénévent, qui était porteur de deux dépêches importantes : l'une était une lettre du roi de Prusse, d'une vingtaine de pages, qui n'était réellement qu'un mauvais pamphlet contre la France, dans le genre de ceux que le cabinet anglais fait faire par ses écrivains à cinq cents livres sterling par an. L'Empereur n'en acheva point la lecture, et dit aux personnes qui l'entouraient : «Je plains mon frère le roi de Prusse, il n'entend pas le français, il n'a sûrement pas lu cette rapsodie.» A cette lettre était jointe la célèbre note de M. Knobelsdorff. «Maréchal, dit l'Empereur au maréchal Berthier, on nous donne un rendez-vous d'honneur pour le 8 ; jamais un Français n'y a manqué ; mais comme on dit qu'il y a une belle reine qui veut être témoin des combats, soyons courtois, et marchons, sans nous coucher, pour la Saxe.» L'empereur avait raison de parler ainsi, car la reine de Prusse est à l'armée, habillée en amazone, portant l'uniforme de son régiment de dragons, écrivant vingt lettres par jour pour exciter de toute part l'incendie.
Il semble voir Armide dans son égarement, mettant le feu à son propre palais ; après elle le prince Louis de Prusse, jeune prince plein de bravoure et de courage, excité par le parti, croit trouver une grande renommée dans les vicissitudes de la guerre. A l'exemple de ces deux grands personnages, toute la cour crie à la guerre ; mais quand la guerre se sera présentée, avec toutes ses horreurs, tout le monde s'excusera d'avoir été coupable, et d'avoir attiré la foudre sur les provinces paisibles du Nord ; alors par une suite naturelle des inconséquences des gens de cour, ou verra les auteurs de la guerre, non seulement la trouver insensée, s'excuser de l'avoir provoquée, et dire qu'ils la voulaient, mais dans un autre temps ; mais même en faire retomber le blâme sur le roi, honnête homme, qu'ils ont rendu la dupe de leurs intrigues et de leurs artifices.
Voici la disposition de l'armée française :
L'armée doit se mettre en marche
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