Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
matin, les troupes qui devaient le joindre, et surtout sa cavalerie ; mais l'ardeur française l'emporta. Plusieurs bataillons s'étant engagés, au village de Hollstedt, il vit l'ennemi s'ébranler pour les en déposter.
Le maréchal Lannes reçut ordre sur-le-champ de marcher en échelons pour soutenir ce village. Le maréchal Soult avait attaqué un bois sur la droite ; l'ennemi ayant fait un mouvement de sa droite sur notre gauche, le maréchal Augereau fut chargé de le repousser ; en moins d'une heure, l'action devint générale ; deux cent cinquante ou trois cent mille hommes avec sept ou huit cents pièces de canon, semaient partout la mort, et offraient un de ces spectacles rares dans l'histoire. De part et d'autre, on manoeuvra constamment comme à une parade. Parmi nos troupes, il n'y eut jamais le moindre désordre, la victoire ne fut pas un moment incertaine. L'empereur eut toujours auprès de lui, indépendamment de la garde impériale, un bon nombre de troupes de réserve pour pouvoir parer à tout accident imprévu.
Le maréchal Soult ayant enlevé le bois qu'il attaquait depuis deux heures, fit un mouvement en avant. Dans cet instant, on prévint l'empereur que la division de cavalerie française de réserve commençait à se placer, et que deux divisions du corps du maréchal Ney se plaçaient en arrière sur le champ de bataille. On fit alors avancer toutes les troupes qui étaient en réserve sur la première ligne, et qui, se trouvant ainsi appuyées, culbutèrent l'ennemi dans un clin-d'oeil, et le mirent en pleine retraite. Il la fit en ordre pendant la première heure ; mais elle devint un affreux désordre du moment que nos divisions de dragons et nos cuirassiers, ayant le grand-duc de Berg à leur tête, purent prendre part à l'affaire. Ces braves cavaliers, frémissant de voir la victoire décidée sans eux, se précipitèrent partout où ils rencontrèrent l'ennemi. La cavalerie, l'infanterie prussienne ne purent soutenir leur choc.
En vain l'infanterie ennemie se forma en bataillons carrés, cinq de ces bataillons furent enfoncés ; artillerie, cavalerie, infanterie, tout fut culbuté et pris. Les Français arrivèrent à Weimar en même temps que l'ennemi, qui fut ainsi poursuivi pendant l'espace de six lieues.
A notre droite, le corps du maréchal Davoust faisait des prodiges. Non-seulement il contint, mais mena battant pendant plus de trois lieues, le gros des troupes ennemies qui devait déboucher du côté de Koesen. Ce maréchal a déployé une bravoure distinguée et de la fermeté de caractère, première qualité d'un homme de guerre. Il a été secondé par les généraux Gudin, Friant, Morand, Daultanne, chef de l'état-major, et par la rare intrépidité de son brave corps d'armée.
Les résultats de la bataille sont trente à quarante mille prisonniers ; il en arrive à chaque moment ; vingt-cinq à trente drapeaux, trois cents pièces de canon, des magasins immenses de subsistances. Parmi les prisonniers, se trouvent plus de vingt généraux, dont plusieurs lieutenants-généraux, entr'autres le lieutenant-général Schmettau. Le nombre des morts est immense dans l'armée prussienne. On compte qu'il y a plus de vingt mille tués ou blessés ; le feld-maréchal Mollendorff a été blessé ; le duc de Brunswick a été tué ; le général Rüchel a été tué ; le prince Henri de Prusse grièvement blessé. Au dire des déserteurs, des prisonniers et des parlementaires, le désordre et la consternation sont extrêmes dans les débris de l'armée ennemie.
De notre côté, nous n'avons à regretter parmi les généraux que la perte du général de brigade de Billy, excellent soldat ; parmi les blessés, le général de brigade Conroux.
Parmi les colonels morts, les colonels Vergès, du douzième régiment d'infanterie de ligne ; Lamotte, du trente-sixième ; Barbenègre, du neuvième de hussards ; Marigny, du vingtième de chasseurs ; Harispe, du seizième d'infanterie légère ; Dulembourg, du premier de dragons ; Nicolas, du soixante-unième de ligne ; Viala, du quatre-vingt-unième ; Higonet, du cent-huitième.
Les hussards et les chasseurs ont montré dans cette journée une audace digne des plus grands éloges. La cavalerie prussienne n'a jamais tenu devant eux ; et toutes les charges qu'ils ont faites devant l'infanterie, ont été heureuses.
Nous ne parlons pas de l'infanterie française ; il est reconnu depuis long-temps que c'est la meilleure
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