Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
quartier-général à Lutzen ; le vice-roi avait son quartier-général à Markrandstedt ; le général Lauriston était à Kiebersdorf ; le prince de la Moskwa avait son quartier-général à Kaya, et le duc de Raguse avait le sien à Poserna. Le général Bertrand était à Stohssen ; le duc de Reggio en marche sur Naumbourg.
A Dantzick la garnison a obtenu de grands avantages et fait une sortie si heureuse qu'elle a fait prisonnier un corps de trois mille Russes.
La garnison de Wittemberg paraît aussi s'être distinguée et avoir fait, dans une sortie, beaucoup de mal à l'ennemi.
Le 2 mai 1813.
A S. M. l'impératrice-reine et régente.
Les combats de Weissenfels et de Lutzen n'étaient que le prélude d'événemens de la plus haute importance. L'empereur Alexandre et le roi de Prusse qui étaient arrivés à Dresde avec toutes leurs forces dans les derniers jours d'avril, apprenant que l'armée française avait débouché de la Thuringe, adoptèrent le plan de lui livrer bataille dans les plaines de Lutzen, et se mirent en marche pour en occuper la position ; mais ils furent prévenus par la rapidité des mouvemens de l'armée française ; ils persistèrent cependant dans leurs projets, et résolurent d'attaquer l'armée pour la déposter des positions qu'elle avait prises.
La position de l'armée française au 2 mai, à neuf heures du matin, était la suivante :
La gauche de l'armée s'appuyait à l'Elster ; elle était formée par le vice-roi, ayant sous ses ordres les cinquième et onzième corps. Le centre était commandé par le prince de la Moskwa, au village de Kaia. L'empereur avec la jeune et la vieille garde était à Lutzen.
Le duc de Raguse était au défilé de Poserna, et formait la droite avec ses trois divisions. Enfin le général Bertrand, commandant le quatrième corps, marchait pour se rendre à ce défilé. L'ennemi débouchait et passait l'Elster aux ponts de Zwenkau, Pegau et Zeist. S. M. ayant l'espérance de le prévenir dans son mouvement, et pensant qu'il ne pourrait attaquer que le 3, ordonna au général Lauriston, dont le corps formait l'extrémité de la gauche, de se porter sur Leipsick, afin de déconcerter les projets de l'ennemi, et de placer l'armée française, pour la journée du 3, dans une position toute différente de celle où les ennemis avaient compté la trouver et où elle était effectivement le 2, et de porter ainsi de la confusion et du désordre dans leurs colonnes.
À neuf heures du matin, S. M. ayant entendu une canonnade du côté de Leipsick, s'y porta au galop. L'ennemi défendait le petit village de Listenau et les ponts en avant de Leipsick. S. M. n'attendait que le moment où ces dernières positions seraient enlevées, pour mettre en mouvement toute son armée dans cette direction, la faire pivoter sur Leipsick, passer sur la droite de l'Elster, et prendre l'ennemi à revers ; mais à dix heures, l'armée ennemie déboucha vers Kaïa, sur plusieurs colonnes d'une noire profondeur ; l'horizon en était obscurci. L'ennemi présentait des forces qui paraissaient immenses. L'empereur fit sur-le-champ ses dispositions. Le vice-roi reçut l'ordre de se porter sur la gauche du prince de la Moskwa ; mais il lui fallait trois heures pour exécuter ce mouvement. Le prince de la Moskwa prit les armes, et avec ses cinq divisions soutint le combat, qui au bout d'une demi-heure devint terrible. S. M. se porta elle-même à la tête de la garde derrière le centre de l'armée, soutenant la droite du prince de la Moskwa. Le duc de Raguse, avec ses trois divisions, occupait l'extrême droite. Le général Bertrand eut ordre de déboucher sur les derrières de l'armée ennemie, au moment où la ligne se trouverait le plus fortement engagée. La fortune se plut à couronner du plus brillant succès toutes ces dispositions. L'ennemi, qui paraissait certain de la réussite de son entreprise, marchait pour déborder notre droite et gagner le chemin de Weissenfels. Le général Compans, général de bataille du premier mérite, à la tête de la première division du duc de Raguse, l'arrêta tout court. Les régimens de marine soutinrent plusieurs charges avec sang-froid, et couvrirent le champ de bataille de l'élite de la cavalerie ennemie. Mais les grands efforts d'infanterie, d'artillerie et de cavalerie, étaient sur le centre.
Quatre des cinq divisions du prince de la Moskwa étaient déjà engagées. Le village de Kaia fut pris et repris plusieurs fois.
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