Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
commandans sont arrivés à leur destination. Le général Kleist n'a pu atteindre qu'un hussard russe, l'ennemi ayant évacué en toute hâte Chawli, après avoir incendié les magasins.
Le général Ricard est arrivé, le 6 de grand matin, à Poniewiez. Il a eu le bonheur de sauver les magasins qui s'y trouvaient, et qui contenaient trente mille quintaux de farine. Il a fait cent soixante prisonniers, parmi lesquels sont quatre officiers. Cette petite expédition fait le plus grand honneur au détachement de hussards de la Mort prussien, qui en a été chargé.
S.M. a accordé la décoration de la Légion-d'Honneur au commandant, au lieutenant de Raven, aux sous-officiers Werner et Pommereit, et au brigadier Grabouski, qui se sont distingués dans cette affaire.
Les habitans de la province de Samogitie se distinguent par leur patriotisme. Ils ont un grief de plus que les autres Polonais : ils étaient libres ; leur pays est riche ; il l'était davantage ; mais leurs destinées ont changé avec la chute de la Pologne. Les plus belles terres ayant été données par Catherine aux Soubow, les paysans, de libres qu'ils étaient, ont dû devenir esclaves. Le mouvement de flanc qu'a fait l'armée sur Wilna, ayant tourné cette belle province, elle se trouve intacte, et sera de la plus grande utilité à l'armée. Deux mille chevaux sont en route pour venir réparer les pertes de l'artillerie. Des magasins considérables ont été conservés. La marche de l'armée de Kowno sur Wilna, et de Wilna sur Dunabourg et sur Minsk, a obligé l'ennemi à abandonner les rives du Niémen, et a rendu libre cette rivière, par laquelle de nombreux convois arrivent à Kowno. Nous avons dans ce moment plus de cent cinquante mille quintaux de farine, deux millions de rations de biscuit, six mille quintaux de riz, une grande quantité d'eau-de-vie, six cent mille boisseaux d'avoine, etc. Les convois se succèdent avec rapidité : le Niémen est couvert de bateaux.
Le passage du Niémen a eu lieu le 24, et l'empereur est entré à Wilna le 38. La première armée de l'Ouest, commandée par l'empereur Alexandre, est composée de neuf divisions d'infanterie et de quatre divisions de cavalerie. Poussée de poste en poste, elle occupe aujourd'hui le camp retranché de Drissa, où le roi de Naples, avec les corps des maréchaux ducs Elchingen et de Reggio, plusieurs divisions du premier corps, et les corps de cavalerie des comtes Nansouty et Montbrun, la contient.
La seconde armée, commandée par le prince Bagration, était encore, le premier juillet, à Kobrin, où elle se réunissait. Les neuvième et quinzième divisions étaient plus loin, sous les ordres du général Tormazow. A la première nouvelle du passage du Niémen, Bagration se mit en mouvement pour se porter sur Wilna ; il fit sa jonction avec les cosaques de Platow, qui étaient vis-à-vis Grodno. Arrivé à la hauteur d'Ivié, il apprit que le chemin de Wilna lui était fermé. Il reconnut que l'exécution des ordres qu'il avait serait téméraire et entraînerait sa perte, Soubotnicki, Traboui, Witchnew, Volojink, étant occupés par les corps du général comte Grouchy, du général Pajol, et du maréchal prince d'Eckmühl. Il rétrograda alors, et prit la direction de Minsk ; mais arrivé à demi-chemin de cette ville, il apprit que le prince d'Eckmühl y était entré. Il rétrograda encore une fois : de Newij il marcha sur Slousk, et de là il se porta sur Bobruisk, où il n'aura d'autre ressource que de passer le Borysthène. Ainsi, les deux armées sont entièrement coupées, et séparées entre elles par un espace de cent lieues.
Le prince d'Eckmühl s'est emparé de la place forte de Borisow sur la Bérésina. Soixante milliers de poudre, seize pièces de canon de siège, des hôpitaux, sont tombés en son pouvoir. Des magasins considérables ont été incendiés une partie cependant a été sauvée.
Le 10, le général Latour-Maubourg a envoyé la division de cavalerie légère, commandée par le général Rozniecki, sur Mir. Elle a rencontré l'arrière-garde ennemie à peu de distance de cette ville. Un engagement très-vif eut lieu. Malgré l'infériorité du nombre de la division polonaise, le champ lui est resté.
Le général de cosaques Gregoriew a été tué, et quinze cents Russes ont été tués ou blessés. Notre perte a été de cinq cents hommes au plus. La cavalerie légère polonaise s'est battue avec la plus grande intrépidité, et son
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