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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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vaux mille ducats.
    Il s’est tourné, a tendu le bras, montré un coffre posé sur une table.
    — Ils ont payé ta rançon. J’aurais pu exiger davantage. Mais – il a écarté les mains, ricané – nous sommes les alliés de l’empereur de France et les Thorenc le servent. Ils m’ont accueilli et le sultan les a reçus.
    Il a tout à coup serré le poing et a hurlé d’une voix menaçante :
    — Mais toi, que faisais-tu sur une galère espagnole ? Fou ! La tête farcie des mensonges d’un moine : voilà ce qu’ils m’ont dit de toi !
    Il s’est mis à arpenter la pièce, penché en avant, ses longs bras allant et venant, accompagnant ses phrases.
    — Les prêtres, les moines, leur religion, ton Dieu, je les connais !
    Il s’est arrêté, a laissé tomber la tête sur son épaule, bras en croix.
    — Un Dieu vaincu, crucifié !
    Il a ramené les bras le long de son corps et a repris :
    — On me destinait au séminaire. Mais ton Dieu, celui que je priais depuis l’enfance comme tous les habitants de mon village, est-ce qu’il nous a protégés ? Nos maisons ont brûlé, tout comme l’église. J’ai pensé : Il n’est donc pas le plus fort ! J’ai reconnu le vrai Dieu, Allah l’Unique, et Mahomet Son prophète. J’obéis à Sa parole. Il est mon guide. Je suis Son soldat. Il me protège et sait me récompenser.
    Il a croisé les bras.
    — Je suis là et je peux, si je le veux, t’écorcher comme un mouton, puis crucifier ce qu’il restera de toi. Qu’en dis-tu ?
    J’ai baissé la tête.
    — Ce n’est pas ton Dieu qui t’a sauvé, a-t-il repris. C’est moi ! Moi, fils du prophète Mahomet, je décide de te vendre à Louis de Thorenc pour mille ducats !
    Ce qui m’a fait répondre à Dragut :
    — Je ne connais pas Louis de Thorenc.

7.
    Est-ce Vous, Seigneur, qui m’avez inspiré les mots qui ont scellé mon destin ?
    Je n’ai pas eu le courage de les répéter lorsque Dragut l’a exigé, m’empoignant par le col et commençant à me secouer.
    J’ai baissé la tête pour ne pas voir son visage, ne pas succomber à l’effroi qu’il suscitait en moi, tant émanait de lui une implacable cruauté.
    — Tu ne connais pas Louis de Thorenc ? répéta-t-il.
    Je me suis mordu les joues et les lèvres pour ne pas crier : « Oui, j’ai menti ! Je suis son fils ! Oui, je lui rends grâces d’avoir payé ma rançon ! Oui, je veux être libre, quitter cette ville, ne plus penser à ceux que j’y abandonne : Mathilde de Mons, Diego de Sarmiento, et mes frères chrétiens livrés par leur roi, enchaînés, battus, martyrisés ! Je veux chevaucher jusqu’aux forêts qui couvrent les sommets, au-delà du Castellaras de la Tour. Je veux y chasser le sanglier ou le chamois, y vivre loin des hommes, laisser les uns s’allier aux infidèles, les autres les combattre. Je ne veux plus être entraîné dans leur guerre. Je ne veux pas être écorché, empalé, crucifié. Je ne veux plus pourrir parmi les rats dans la pénombre de la chiourme ! »
    Seigneur, j’ai dû combattre la tentation de me renier et n’ai trouvé la force d’y résister que dans la prière. J’ai rempli ma bouche et ma tête de Vous, Notre Père qui êtes aux cieux, et de Marie, Mère de toutes les grâces.
    Dragut m’a souffleté, puis a serré ses mains autour de mon cou, ses pouces pressant si profondément ma gorge que j’ai eu l’impression qu’il allait les y enfoncer et m’arracher la tête.
    Un voile rouge a alors recouvert mes yeux.
    Lorsqu’il s’est déchiré, j’étais à genoux, mains liées dans le dos, un bâton passé sous les bras. Les deux hommes qui me gardaient en tenaient les extrémités, me soulevant parfois quand ils me voyaient m’apaiser.
    Dragut était assis en face de moi.
    — Ainsi, tu veux rester avec nous ? a-t-il dit.
    Il parlait d’une voix posée, les doigts noués sur sa poitrine.
    — Tu es un homme précieux. Ta valeur va augmenter. Bientôt, c’est deux mille ducats que je demanderai à Louis de Thorenc. Et pour cette rançon-là je te livrerai tel que tu es maintenant, attaché comme un chevreau avant qu’on l’égorge.
    Il a secoué la tête.
    — Mais je te garde pour la fin du ramadan.
    Il s’est levé et s’est mis à tourner autour de moi, se baissant pour me relever la tête en me tirant les cheveux.
    — Mais tu veux peut-être reconnaître qu’Allah est l’Unique et écouter la voix du Prophète ?
    Il s’est accroupi,

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