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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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conduire une croisade impitoyable, le lendemain cherchant un accord avec les « mal-sentants de la foi ».
    — Elle songe avant toute chose à sauvegarder le trône de son fils. Nous autres Espagnols pensons d’abord à l’Église du Christ.
    Je doutais, Seigneur.
    J’écoutais les rumeurs, devinais les intrigues qui pourrissaient la cour d’Espagne.
    On assurait que Philippe II ne se souciait plus de combattre les infidèles, mais, comme un rapace couché sur sa proie, de garder ce qu’il possédait, oubliant ces milliers de chrétiens que Turcs et Barbaresques avaient réduits en esclavage.
    Qui libérerait Michele Spriano ?
    L’or et l’argent nécessaires pour armer des galères, payer la solde des troupes, acquitter les rançons, le roi les employait à construire un monastère et un immense palais à Escurial, non loin de la petite ville qu’il avait choisie pour capitale, Madrid.
    Au lieu d’établir des plans de bataille contre les Turcs, il examinait chaque jour l’avancée des travaux de son palais de l’Escurial. Et, lorsqu’il rentrait à Tolède, il ne pensait plus qu’aux femmes.
    On disait qu’il n’avait pas encore honoré la reine, trop jeune, mais, chaque soir, telle ou telle de ces nobles et fières Espagnoles, ou bien une simple fille rejoignait sa couche.
    Sarmiento riait, avouait qu’il héritait de ces maîtresses d’une nuit, et je devinais qu’il utilisait, pour accroître son influence, cette complicité qui le faisait parfois coucher comme un chien fidèle au pied du lit du roi.
    Sarmiento se moquait de moi, s’étonnait : j’avais bien changé, depuis les Pays-Bas ! disait-il.
    — Tu vis comme un moine, mais sans la bure.
    Il proposait de me ménager des rencontres avec ces femmes qui s’offraient et que quelques ducats suffisaient à satisfaire. Il me rappelait que, durant sa captivité en Espagne, François I er avait acheté une jeune esclave noire qui venait le retrouver chaque matin.
    — Tu n’es pas espagnol, mais es-tu français ? me demandait Sarmiento. Nous aimons chacun à notre manière trousser les filles. Mais toi ?
    Il s’éloignait un peu, me dévisageait. Est-ce que je craignais la vérole ? Il écartait la menace d’un haussement d’épaules. Qui n’avait pas, dans ses ancêtres, un vérolé ? On vous léguait la maladie, eussiez-vous vécu dans l’abstinence.
    Il baissait la voix, murmurait que l’on craignait que la reine Élisabeth de Valois, toute pucelle qu’elle fut encore, n’en fut atteinte. Sa vieille Italienne de mère, Catherine de Médicis, le craignait et faisait donner à sa fille des bains de blancs d’œufs pour que la peau de la vierge restât lisse. Catherine craignait que Philipe II, averti du risque, ne touchât pas à son épouse et ne la répudiât.
    Je ne voulais plus écouter. J’étouffais. J’insistais auprès de Sarmiento pour qu’il favorisât mon départ d’Espagne, mon enrôlement parmi ces chevaliers de Malte si peu nombreux qui affrontaient les infidèles. Eux étaient les héritiers des chevaliers du Temple ! Enguerrand de Mons les avait déjà rejoints.
    Je m’impatientais.
    On apprenait que les galères de Dragut avaient, devant Djerba, détruit une flotte espagnole et fait prisonniers des centaines de chrétiens.
    Désormais, les Turcs et les Barbaresques imposaient leur loi d’une extrémité à l’autre de la Méditerranée.
    Je voulais les combattre comme on se purifie.

35.
    Un matin, enfin, j’ai revêtu mon armure et me suis agenouillé parmi les chevaliers.
    C’était l’aube.
    Comme on retire lentement un voile, le ciel déjà apparaissait bleuté, mais la mer était encore recouverte par la nuit. Elle respirait, paisible, au pied des murailles du fort.
    Tout à coup, étouffant le bruit régulier du ressac, j’ai entendu battre les tambours des infidèles.
    Ce roulement sourd auquel se mêlaient l’aigre sifflement des flûtes et le frottement aigu des crécelles nous a enveloppés.
    Il faisait froid. J’ai frissonné et regardé autour de moi.
    Dans la pénombre, j’ai deviné la foule des chevaliers agenouillés ou debout sur les remparts. Ils formaient une masse plus sombre que la lumière grise commençait d’effleurer. Leurs casques et leurs piques, les étendards et les bannières que le vent, qu’à Malte on appelle magistrale, faisait claquer se découpaient sur l’horizon.
    J’ai reconnu ou plutôt deviné, agenouillé près de moi, le front posé contre

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