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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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qu’une eau de source.
    Déjà, au moment où je quittais Tolède, Diego de Sarmiento avait tenté de me retenir. Philippe II regrettait mon départ pour Malte. Il le tolérait parce que j’étais français, mais il m’en garderait rigueur et lui avait fait comprendre qu’un renoncement de ma part m’eût valu quelques privilèges.
    — Si tu ne changes pas d’avis, enfuis-toi vite, avait murmuré mon protecteur. On peut te retenir. Si les juges de l’Inquisition décident de te briser les genoux ou de t’enfermer sous bonne garde dans un couvent, tu ne seras pas à Malte avant longtemps.
    Mon départ de Tolède avait donc ressemblé à une fuite. Mais ce n’est qu’à mon arrivée à destination que j’ai compris les raisons des réticences de Philippe II à me voir gagner l’île.
    Sur les quais du port, attendant d’embarquer sur l’une des dernières galères de l’ordre de Malte qui s’apprêtaient à franchir le blocus des flottes turques et barbaresques, j’avais retrouvé Enguerrand de Mons.
    Il avait été chargé par le Grand Maître de l’ordre d’inciter, en France et en Allemagne, les chevaliers à venir se joindre aux défenseurs de l’île, si peu nombreux par rapport aux dizaines de milliers d’infidèles qui avaient déjà débarqué et aux milliers d’autres qui se trouvaient encore à bord des galères musulmanes.
    Enguerrand de Mons avait plaidé, harangué, expliqué qu’après avoir perdu Rhodes en 1523 la chrétienté ne pouvait abandonner Malte, ce verrou qui commandait l’accès à tout le sud de la Méditerranée, l’« île du miel » que Charles Quint avait donné à l’ordre en 1530 pour qu’il en fasse l’avant-poste maritime de l’Occident chrétien.
    Si Malte tombait, alors la Sicile, puis Naples, et pourquoi pas Rome et Venise seraient menacées. Et plus personne ne pourrait défendre Chypre, oubliée au fin fond de la Méditerranée, impossible à ravitailler et à défendre dès lors que les galères musulmanes contrôleraient la mer.
    Mais Enguerrand de Mons avait rencontré peu d’échos. On soupçonnait l’ordre de Malte d’être le bras armé de la papauté. Et Philippe II regrettait que Charles Quint eût fait don de l’île à l’ordre.
    — Nous sommes seuls, avait murmuré Enguerrand. Quelques chevaliers comme vous – il avait montré une dizaine d’hommes qui patientaient sur le quai – ont répondu à mon appel. Philippe II est un roi tortueux. Une victoire des Turcs, notre écrasement et notre dispersion ne lui déplairaient pas. Mieux : il l’escompte, il l’espère. Il sera ainsi débarrassé de l’ordre, le pape sera affaibli et dépendra donc davantage du bon vouloir de l’Espagne. Et un jour Philippe espère pouvoir reconquérir Malte à son profit, reprendre ainsi ce que Charles Quint avait donné.
    Enguerrand de Mons s’était arrêté et m’avait fait face.
    — Mais, vous et moi, nous devons vaincre Dragut, n’est-ce pas ?
    La galère a attendu la nuit pour se glisser entre les vaisseaux musulmans. Quand nous nous en sommes rapprochés, quelques-uns de nos rameurs se sont mis à crier, et leurs voix ont résonné entre les hautes falaises de l’île, courait au ras des flots vers leurs frères.
    Nos gardes-chiourme ont égorgé ces rameurs, et les autres se sont tus.
    Sur les ponts des galères de Dragut et Mustapha, on brandissait des torches, on tentait d’éclairer la baie. Des navires nous ont pourchassés, mais nous avons réussi à nous mettre à l’abri sous les murailles du château Saint-Elme. Et les forts de Saint-Michel et Saint-Ange, situés de part et d’autre des baies, ont commencé à tirer sur les navires qui nous poursuivaient.
    Enfin j’ai pu sauter à terre, découvrir l’île, ces villes, ces tours de guet qui dominaient les arbousiers, les cyprès, les figuiers et les citronniers. Les vents – d’abord le magistrale, puis le gregale, le rhamsin, le scirocco – couchaient avec plus ou moins de violence les blés, secouaient les vignes, portaient les voix des guetteurs d’une colline à l’autre.
    Les troupes de janissaires placées sous le commandement du général Mustapha marchaient sur la capitale, Mdina, située au centre de l’île, puis elles se dirigeraient vers les deux baies jumelles et les forts de Saint-Michel et Saint-Ange. Mais, ajoutait Enguerrand de Mons, le bras tendu, c’était à Saint-Elme et dans la ville de Bourg, qu’il protégeait, que se déciderait

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