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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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victoire. Et je devenais son porte-enseigne, moi qui avais dû fuir Tolède de crainte qu’il ne m’interdise de rejoindre Malte. Et Sarmiento, qui m’avait averti des risques que je courais en désobéissant au souverain, mentait avec l’assurance d’un ambassadeur de Venise.
    Nous avons quitté ensemble le fort Saint-Elme et nous avons marché sur les remparts de Bourg, puis jusqu’à la galère espagnole amarrée à l’extrémité de la jetée.
    Sarmiento me parla avec enthousiasme de ce palais de l’Escurial qui serait le plus vaste, le plus noble de tous les palais de toutes les nations du monde. Philippe II s’y était déjà installé, mais une partie de la cour vivait encore à Madrid.
    Il me montra les falaises nues qui surplombaient les baies, les forts Saint-Michel, Saint-Ange, Saint-Elme, et la petite ville de Bourg. Il était temps, poursuivit-il, que je quitte cette extrémité perdue du monde, que je retrouve l’Espagne, Sa Majesté Philippe II qui avait besoin d’hommes de ma trempe.
    Le roi ne pouvait compter sur son fils don Carlos, pauvre fou difforme, ni sur don Juan, son bâtard de frère, dont on craignait les ambitions. Ses conseillers, Ruy Gomez et d’autres, étaient des hommes d’écritoire. Le duc d’Albe rétablissait l’ordre aux Pays-Bas. Et les gueux huguenots, les nobles flamands étaient des rebelles farouches. Il faudrait longtemps au duc d’Albe pour les réduire. Il manquait donc au roi des hommes de ma trempe. Et Sarmiento s’était porté garant de ma fidélité.
    Or, en Andalousie, autour de Grenade et sur toute la côte, les morisques s’armaient, recevaient les émissaires des Barbaresques et du sultan. Ce n’étaient encore que les premières flammèches d’une révolte, mais l’Espagne pouvait-elle accepter qu’on la défie, que la vermine se répande sur son corps et finisse par le saigner ?
    J’ai pensé à Aïcha, à Juan Mora, à tous ces convertis masqués qui priaient Allah, se prosternant en direction du tombeau du Prophète.
    N’avais-je pas répété que ma guerre était celle-là : contre les infidèles qui ne renonçaient jamais – et seulement celle-là ?
    Quelques jours plus tard, je quittais Malte pour l’Espagne sur la galère de Diego de Sarmiento.

37.
    J’ai regretté d’avoir suivi Sarmiento en Espagne.
    À peine avais-je fait quelques pas dans les grandes salles du palais de l’Escurial où Philippe II recevait sa cour, que j’ai eu l’impression d’avancer en enfer.
    Ce n’étaient pourtant autour de moi que femmes et grands d’Espagne, soies, velours, colliers d’or et d’émeraude, bijoux et dentelles. Mais chaque regard, alors que je marchais vers le trône pour être présenté au roi, était comme la pointe acérée d’un poignard. On me lardait de coups. On m’écorchait vif. On voulait que j’arrive nu, sanglant, devant le monarque.
    Philippe II m’a tendu la main alors que je m’inclinais.
    J’ai vu ses yeux voilés, son teint d’homme de l’ombre dont on disait qu’il ne quittait son bureau que pour les alcôves. Et l’on murmurait que la pauvre reine Elisabeth de Valois souffrait des fondements, que ses suivantes françaises la baignaient plusieurs fois par jour dans du lait très chaud où l’on avait versé du safran, et qu’on l’obligeait aussi à engloutir heure après heure des compotes de prunes. Mais rien ne la calmait, elle avait le cul en feu, à hurler. Et que voulait-on que fît le roi d’une pareille épouse qui avait peut-être hérité de François I er , son grand-père, la vérole ? Si le souverain se doutait de cela, il la répudierait !
    Mais qui oserait le mettre en garde contre cette petite reine française, qu’il avait forcée et dont il était si épris ?
    Voilà à quoi j’ai pensé pendant qu’il me tenait la main. Puis il a détourné la tête, contemplant la foule des courtisans chamarrés qui quêtaient l’un de ses regards, tout en me crucifiant de leur jalousie.
    J’ai reculé, essayé de me glisser vers le fond de la salle, mais Diego de Sarmiento m’a retenu. Je devais rester avec lui au premier rang, parmi les grands d’Espagne, les conseillers du roi, leurs femmes qui étaient aussi le plus souvent les maîtresses du souverain.
    Près de moi se tenait Anna Mendoza délia Cerda, princesse d’Eboli, qui du bout des doigts m’effleurait la main comme par mégarde. Mais elle me perçait de son œil vivant, le visage barré par son bandeau de

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