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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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tout
illuminé de son candide zèle, c’est le ciel qui parle céans par la bouche de
Fogacer ! (À quoi Fogacer arqua son sourcil diabolique.) Rendez
incontinent à ce Duc corrompu ses écus corrupteurs et à ce frivole poupelet
l’attifure qui vous colle à la peau comme le rouge manteau de la grande prostituée.
Qu’avez-vous à faire de la grâce du Roi ! N’avez-vous point l’absolution
de votre conscience pour avoir occis le méchant Fontenac ? Fuyons, mon
frère, les vilaines gens de cette moderne Babylone ! Cherchons asile aux
champs à Mespech en nos douces retraites paternelles, loin des vices et des
abominations de cette Paris puante !
    Ce beau
discours, explosant au milieu de nous, nous laissa béants, hormis Miroul qui
dit en oc sotto voce, son œil marron s’égayant :
    — Ce
rouge manteau est en satin bleu pâle.
    Cependant,
comme j’allais encore une fois en mon tracassement me courroucer contre mon
pauvre frère, Giacomi me posa la main sur le bras et dit sur le ton le plus
suave et la dextre rassemblant le bout de ses doigts devant lui :
    — Samson !
N’avez-vous pas ouï ? E une questione di fatto e non di principio [41] .
Pierre ne peut qu’il n’ait la grâce du Roi sans laquelle il serait en danger de
décapitation, même à Mespech. Il ne peut être introduit au Roi qu’en ce
pourpoint, et non en celui que Miroul porte sur le bras. Et s’il refusait les
largesses du Duc, il serait aussi en péril de sa vie. Voulez-vous voir occis à
toutes mains ce frère tant chéri ?
    À quoi Samson,
les larmes aux cils, s’accoisa tout quinaud, n’ayant jamais des traverses de la
vie qu’une vision biblique et pastorale. Ha ! certes ! Mon bien-aimé
frère était peu idoine à se régir sagement en la ville et la Cour, où moi-même,
à peine arrivé, m’étais jeté dans les toiles comme lièvre étourdi au sortir
d’un fourré. Ha ! Que j’eusse voulu mon Samson à cent lieues de là, ou du
moins à Montfort-l’Amaury où j’avais écrit au Maître Béqueret pour requérir
qu’il le logeât au moins le temps que je demeurerais en la capitale. Et de
présent, j’avais d’autant plus appétit à cet éloignement qu’il ne m’avait pas
échappé avec quelle faveur le Duc d’Anjou, en notre entretien, l’avait
envisagé, l’appelant dans sa lettre « mon tant joli frère » ! Havre
de grâce ! Il n’eût plus manqué à mon prédicament que cette faveur se
précisât davantage, et que mon frère, qui était par bonheur un peu lent, finît
par l’entendre ! Ciel ! Que de feux, de flammes et de braises
bibliques jailliraient de sa bouche ! Et dans quel renouveau d’inouï péril
nous serions tous jetés !
    Non que je
crusse que tout l’alentour du Duc d’Anjou fût fogacérien, encore que cette
usance qu’on nomme en France le « vice italien » et en Angleterre le
« vice français » n’y fût pas, à ce que j’avais observé, tout à plein déconnue, le Duc lui-même, à ce que j’ouïs plus tard,
paraissant balancer entre deux passions ayant des objets différents. À dire le
vrai, je n’avais pas laissé de nourrir quelque doutance à ce sujet
touchant le Marquis d’O, le petit Maugiron et Quéribus, mais pour celui-ci,
j’avais répondu tout de gob par la négative, ayant observé, tandis que nous tournions
dans la cour du Louvre afin qu’il y pût parader dans mon déprisé pourpoint,
que, tout jaseur et rieur qu’il fût, il n’avait pas manqué une seule fois
d’être fort hameçonné par les belles qui passaient, les envisageant d’un air
friand qui montrait bien que son appétit le portait tout à plein à Ève et non à
celui qui fut avant elle créé, n’en étant que la prime et primitive ébauche.
    Mais revenant
à mes moutons, lesquels n’étaient pas si blancs en dépit de l’éclat de mon
plumage et du bedon de ma bourse – et envisageant avec le dernier sérieux
Fogacer, Giacomi et Miroul (qui était de droit en mes conseils et par le
commandement de mon père), je dis à basse voix :
    — Eh
bien, mes amis, que fais-je ?
    — Aspettate
domani [42] ,
dit Giacomi.
    — Patienti
vincunt [43] ,
dit Fogacer. La Cour oublie. La faveur passe. La disgrâce aussi.
    Miroul dit en
oc, branlant le chef :
    — Samenas
sezes en Brial.
    N’auras tot
l’estiu [44] .
    — Nous
voilà donc unanimes, dis-je.
    — Mais
moi, je n’ai pas opiné, dit Samson d’un air tant marri et navré que je lui pris
le bras et le serrant

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