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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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contre moi, lui dis à caressante voix :
    — Opine,
mon Samson.
    — Nous
demeurons, dit Samson, la voix tout étranglée par le nœud de sa gorge.
Cependant, Monsieur mon frère, je voudrais quérir de vous la promesse de quitter
cette Babylone que voilà, le moment que le Roi vous aura sa grâce baillée.
    — Je le
promets, Samson, dis-je incontinent.
    Promesse qu’à
la légère je fis, et qu’à la légère je ne tins. Hélas pour moi, car il m’en
coûta gros et il m’en cuisit fort, et de fort tragique façon, comme je dirai.
    Expectant,
espérant, insoucieux, comme m’en avaient requis mes amis, je les quittai rue de
la Ferronnerie pour qu’ils allassent se conforter à la bonne repue de Guillaume
Gautier et, suivi du seul Miroul qui fit tant qu’il obtint de m’accompagner, je
dirigeai mes pas vers la petite maison de la rue Trouvevache où la Baronne des
Tourelles m’avait convié à souper. L’huis à notre toquement s’ouvrant après
qu’un œil nous eut envisagés derrière la grille de judas, je trouvai le joli
petit valet Nicotin, me confrontant d’un œil gaussant.
    — La
Baronne est-elle là, Nicotin ?
    — En
ma conscience, je ne sais ! dit Nicotin qui trouvait fort naturel de
parler comme sa maîtresse ou nos muguets de Cour, noyant jamais que ce
langage-là.
    — Et
Corinne ?
    — Je la
vais quérir, Monsieur, s’il vous plaît, dit-il avec un profond salut qui me
parut teinté d’une moquerie polie, laquelle m’enlevait le prétexte de lui
mettre le pied au croupion sans toutefois m’en quitter l’envie.
    — Ha !
Moussu ! J’enrage ! dit Miroul tandis que le petit valet abandonnait
la place. Ces Parisiens ont une sorte de civilité gaussante qui me tourne le
sang en eau. Et jusqu’à ce drolissou qui vous trousse en salutation sa petite
impertinence.
    — Tu lui
bailleras deux sols pour moi. Cela l’adoucira.
    — Deux
sols ! Je lui baillerai un soufflet. C’est tout le picotin que ce Nicotin
aura de moi. Et un grand coup de pied de par le cul.
    À quoi je ris.
    — Ha !
Moussu, reprit Miroul, j’augure mal de notre soirée céans. Tel valet, telle maîtresse.
On va nous amuser, je gage.
    — On me
l’a laissé craindre, dis-je à basse voix. Mais, Miroul, comment le savoir si je
n’attente rien ?
    — Ha !
Moussu ! Ce serait pitié ! Si vous faillez, vous resterez quinaud sur
le tapis avec votre poil rabattu ! Et que dira notre Barberine à vous voir
ainsi dénudé ?
    — Ha !
Miroul ! dis-je, pour le coup, c’est toi qui te moques !
    Mais il ne put
répondre. Corinne entrait, le tétin pommelant à demi sorti d’un corps de cotte
émeraude, son cotillon étant émeraude aussi, bordé de deux raies vert amande.
La garce était fort saine et proprette et accorte. De pimplochement, pas le
moindre ; le front lavé d’eau claire, l’œil vif, la denture éclatante, la
lèvre fort friande, le cheveu blond tressé en deux longues nattes mignonnant
ses joues roses.
    — Cornedebœuf,
Moussu ! dit Miroul à voix basse, l’œil lui sortant quasi de l’orbite.
    — Ha !
Mon noble Monsieur ! s’écria Corinne en plongeant au sol en une révérence
indiscrète. Après quoi, tirant vers moi, elle me dit en son parler de Paris, si
vif et si précipiteux :
    — Ha !
mon gentilhomme ! Que splendide vous êtes ! Que j’ai d’aise à vous
voir ainsi attifuré ! En ma conscience, il en faudrait mourir ! Ce satin ! Cette façon ! Cette épaulure ! Cette coupe à la mode
qui trotte ! Ces perles ! Et du plus bel orient ! On voit bien
que ce ne sont point là verroteries de Lyon ! Que Madame serait donc
confortée à vous envisager en ces beaux affiquets !
    — N’est-elle
point au logis ? dis-je, me redressant et la face froidureuse.
    — Madame
a dû délayer sa venue céans étant retenue en son hôtel par une inattendue
traverse, mais elle vous prie que vous soupiez sans elle, vous promettant de
vous joindre sur le minuit.
    Quoi disant,
Corinne, après une de ces révérences qui l’abaissaient si commodément à la vue,
me prit par la main et me conduisit en une petite pièce douillettement close et
tapissée de velours pourpre, où trônait une riche table fort bien mise éclairée
de quantité de chandelles et chargée de viandes si odorantes que la salive m’en
vint en bouche.
    — Sanguienne,
Corinne ! m’écriai-je, voilà qui est bel et bon. Mais c’est triste chère
que de gloutir seul, serait-ce sur une

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