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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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agir si chiennement avec toi et le petit Henriot. Sache
seulement que ma mère m’a élevé dans la religion catholique jusqu’à l’âge de
dix ans, et qu’alors je fus converti tambour battant à la religion réformée par
mon père, raison pour quoi me voici de présent, à tes yeux, chien d’hérétique,
suppôt d’enfer, vermine, serpent, gibier de bûcher, que sais-je encore ?
    — Ha !
mon Pierre, cria-t-elle, ne huche pas tant haut ! Ces murs ont des
oreilles et si on t’oyait, tu serais sur l’heure mis en pièces par les voisins.
    — Que ne
le fais-tu dès lors toi-même, dis-je et en mon fol courroux tirant ma dague et
la lui tendant. Qu’attends-tu donc ? poursuivis-je, cela fera toujours un
chien de moins et tu gagneras ton ciel de ce seul coup et sans même passer par
le Purgatoire, comme l’a dit si bien en son prêche ton bon curé Maillard !
    Et comme elle
reculait devant ma dague pas à pas sans la saisir, interdite, accoisée et son
œil noir lui sortant presque de l’orbite en son effarement, je rengainai et
sans un adieu, sans un regard, la quittai, tant ivre de rage et de douleur que
c’est à peine si je voyais les degrés que comme fol je dégringolais. Saillant
ès rue de Tirechappe, je marchai tant vite en mon désespoir – le monde à
l’entour devenu d’un noir d’encre à mon œil chagriné – que Miroul, pour me
suivre, courait presque. Ha ! pensai-je, si Alizon, qui est en son fond si
bonne garce, abrite ces pensées de sang, et les tient pour légitimes, que
doit-il en être du guillaume ou du gautier ou du michaud en cette immense
population ?
    — Mais,
Moussu, qu’est cela ? disait Miroul, me voyant fort décomposé et les
larmes me roulant sur la face, avez-vous pris querelle avec Alizon ?
    Je fus
longtemps sans répondre, les passants m’envisageant de façon fort
suspicionneuse à cause de mon émeuvement, mais comme enfin nous atteignions la
rue de Béthisy qui, en raison du grand nombre de huguenots qui entraient et
saillaient continuement du logis de l’Amiral, prenait l’allure d’une petite
Genève, et me sentant alors au milieu des miens en sûreté davantage, je dis à
Miroul ce qu’il en était :
    — Ha,
Moussu ! dit-il, vous êtes bien trop haut à la main ! Vous eûtes bien
grand tort de vous dévoiler à cette gentille garce ! Si l’émotion civile
éclate, le Maître Recroche sachant ce qu’il sait, nous voilà barrés du logis.
Et où pourrons-nous trouver cachette pour attendre la fin de l’orage, Dame du
Luc et M. de Quéribus étant à Saint-Cloud et le révérend Fogacer courant après
son petit saltarin ? Vous nous avez ôté notre ultime refuge : Alizon
est perdue pour nous.
    Je ne répondis
miette, et me contentai de sourciller d’un air fier et malcontent, montrant
ainsi de la fâcherie à mon gentil Miroul à proportion qu’il avait sur moi tant
raison. Voilà pourtant ce qu’il en est de la sottise humaine : même en
l’extrémité de nos affres, je me voulais plus grand que mon valet.
    Je trouvai le
logis de l’Amiral, comme avait si bien dit Delay, tout aussi bourdonnant,
furieux et agité qu’une ruche dans laquelle un galapian a jeté un caillou. Mais
ce n’était là que branle et furie de paroles, sans décision aucune, ni vouloir,
ni action, les chefs étant toujours fort accrochés à demeurer, confiants en la
bonne foi du roi.
    M. de Mazille
me dit que l’Amiral avait bien reposé, que sa fièvre était prou descendue et
que pour sa part, il attendait la venue d’Ambroise Paré pour refaire les
pansements et qu’à nous trois la tâche serait plus aisée. Cela me fit grand
bien, tandis qu’il discourait, d’envisager la grave et bénigne face de M. de
Mazille, lequel me parut être, comme Pierre de l’Etoile, un papiste sans zèle
aucun et pour qui son semblable était son semblable, qu’il fût ou non de son
Église.
    Saluant tous
ceux qui étaient là, j’allai baiser la main de M me de Téligny, jeune
et jolie blondette, laquelle avait les yeux clairs de son père, quoique plus
doux, et tirant davantage sur le vert que sur le bleu, et la félicitai de ce que
la navrure de l’Amiral fût en bonne voie de curation : paroles dont,
penchant sa mignarde tête de côté, elle me fit un suave merci de sa voix tant
semblable à une plaintive flûte.
    Outre M me de Téligny, il y avait dans la chambre Yolet, le valet de l’Amiral, Nicolas
Muss, son truchement en langue allemande,

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