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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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désigna, saillant de la rue des Lavandières, un quidam coiffé
d’une toque blanche dont sortaient des cheveux roux comme flamme et qui,
ouvrant une bouche large comme four, chantait d’une voix fort haute :
     
    Et moi pour
un tas de friands
    Pour
Gautier, Guillaume ou Michaud,
    Tous les
matins, je vais criant
    Échaudés,
gâteaux, pâtés chauds !
     
    — Compagnon,
dis-je, bridant Pompée, tire de ce côté ! Nous sommes de ces friands dont
tu gloses ! Encore que nous ne soyons ni Gautier, ni Guillaume, ni
Michaud. Et pourquoi Michaud, bonhomme ?
    — Pour la
rime, dit le pâtissier en accourant à ma botte à pas précautionneux car sur son
plat panier retenu par une cordelette passée autour du col, et soutenue
par-dessous de ses larges mains, il portait un monceau de sa marchandise,
laquelle était recouverte d’une serviette proprette qu’il retira tout soudain,
nous ensorcelant la vue de ses gâteaux dorés, croustillants, odorants et
fumants.
    — Sanguienne,
Moussu ! dit Miroul, à peu que la bave ne m’en coule de gueule !
    — Paix
là, Miroul, dis-je en oc, si tu parles de bave, il nous en coûtera le double.
    — Mon
noble Monsieur, dit le pâtissier dont la face ronde était elle-même toute dorée
par son feu, si vous avez grand-faim, comme je cuide à votre œil, je vous
recommande ces pâtés chauds...
    — Combien
pourtant que je ne sois pas Michaud...
    — Et non
plus juif, Monseigneur, dit le pâtissier promptement, car ils sont à la chair
de porc.
    — Chrétien
je suis. Combien l’un pour un pauvre chrétien ?
    — Trois
deniers.
    — Peste !
Trois deniers pour un pâté à chair !
    — Sans
enchérir. Combien que vous soyez d’oc, si je m’en crois l’oreille, je vous le
fais au prix parisien.
    — Voire !
Que dirais-tu de quatre pâtés pour huit deniers ?
    — Je
dirais non ! Fi donc, Monseigneur, poursuivit-il, l’œil vif et le verbe
prompt. Un gentilhomme barguigner comme un Lombard !
    — À quoi
juges-tu que je suis gentilhomme ?
    — À votre
cheval qui est fort beau.
    — Tu
erres, je m’en vais de ce pas le vendre pour acheter du foin.
    — Monseigneur,
vous vous gaussez. Allons, je dis pour vous obliger, dix deniers pour quatre.
Prenez, c’est mon dernier dit.
    — Tenu.
Voici tes fraîches pécunes.
    — Et
voici vos chauds pâtés. Monseigneur, gardez qu’on ne vous larronne votre beau
cheval, quand vous serez en visite.
    — Mon
valet le gardera.
    — Je le
vois bien fluet.
    — Je le
serai moins, dit Miroul, quand j’aurai glouti tes pâtés. Ventre
Saint-Antoine ! La bave m’en coule sur le pourpoint !
    Je lui en
baillai deux, et je me mis à dévorer les deux autres, lesquels étaient
surcroûtés et succulents, à la mesure de ma faim véhémente.
    — Ha !
dit le pâtissier, voilà des dents fort aiguës. Mangez ! Mangez !
Mangez ! il vous en profitera ! Il n’est bon pâté que de Paris et en
Paris, que des miens ! Mon gentilhomme, je vous souhaite le bonjour de
tout cœur, et que la benoîte Vierge vous bénisse, si du moins, étant d’oc, vous
n’êtes pas aussi hérétique.
    — Pas
plus que toi, pâtissier ! dis-je, la bouche pleine.
    Sur quoi, il
départit dans la Grand’Rue Saint-Denis.
    — Certes,
dis-je, tâchant à ne pas gloutir trop vite pour goûter du dessus et du dessous
de la langue la chaude onctuosité de cette chair en croûte, certes je suis de
ces tas de friands que chante le pâtissier, mais Miroul, as-tu ouï ce
faquin ? Étant d’oc, nous sommes suspects de réforme, et partant, tout
soudain haïs. Sanguienne, l’hérétique, c’est lui !
    — Moussu,
dit Miroul, besognant de la mâchoire, c’est le plus nombreux et le plus fort
qui nomme l’hérétique. Nous à Nismes. À Paris, les papistes.
    — Tu
parles d’or, Miroul, dis-je, jasant à l’étouffé. Je te ferai docteur aux triduanes du bon sens. Hèle-moi cette laitière dont j’espinche la mignarde
croupière. Hèle-la, Sanguienne, je n’ai plus de voix !
    — Laitière !
hucha Miroul avalant une bouchée qui lui gonfla le cou, tire de ce côté, je te
prie !
    À quoi, la
blonde laitière se retournant vint à nous portant ses deux pots pendant des
deux côtés d’un bâton lequel passait derrière son cou, posture qui la
contraignait à se tenir fort droite au grand avantage de ses tétins lesquels
étaient rondis à merveille et saillaient presque du fichu. Elle vint à nous, en
dépit de son

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