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Piège pour Catherine

Piège pour Catherine

Titel: Piège pour Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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regrette. Nous nous retrouverons et ce jour-là tu n'auras pas Dieu pour rempart.
    — Je l'aurai toujours pour rempart, car mes mains, chaque jour, touchent son Corps et son Sang ! Même quand tu ne le vois pas, il est sur moi, comme il est sur cette cité paisible que tu veux abattre.
    — L'abattre ? Non ! Que je veux faire mienne et que je ferai mienne !
    Mais l'abbé Bernard déjà ne l'écoutait plus. Comme une mère qui cherche à protéger son enfant, il avait ramené le soleil d'or sur sa poitrine et l'y maintenait, de ses deux bras croisés par-dessus. Il revenait maintenant vers la ville muette qui, le cœur serré, avait suivi toute la scène sans trop oser respirer.
    Lentement, les moines et leur civière franchirent la porte, l'abbé venant le dernier et priant, la tête penchée sur son fardeau sacré. Puis tout se referma.
    À l'entrée du camp, personne n'avait bougé. Mais dans la ville, une immense clameur de joie, de soulagement et de victoire éclata dès que la herse fut retombée.
    — Tirez, Dame Catherine ! chuchota Josse. Vous avez ce chien puant au bout de votre flèche ! Tirez et nous en libérez!
    Mais avec un soupir, de regret et de lassitude tout à la fois, la jeune femme reposa définitivement l'arme et hocha la tête.
    — Non. L'abbé ne me le pardonnerait pas. Bérault n'a pas osé le toucher. S'il craint encore Dieu, peut-être renoncera-t-il à nous combattre. Laissons-le réfléchir...
    — Réfléchir ? Ses hommes et lui ont faim de viande et d'or. Ils iront jusqu'au bout de leur envie. Si vous pensez qu'ils vont se retirer, vous vous trompez, Dame Catherine. Je vous dis, moi, qu'ils attaqueront.
    — Eh bien, qu'ils attaquent ! Nous verrons à les repousser.

    L'assaut, cependant, n'eut pas lieu ce jour-là. Bérault d'Apchier employa son temps à l'investissement de la cité. Toute la matinée, les gens de Montsalvy virent l'ennemi encercler lentement leur ville, s'infiltrer entre les rochers et les broussailles comme des serpents d'acier, se poster aux débouchés des chemins, y installer, dans les endroits abrités, d'autres tentes, d'autres feux de cuisine. La piétaille s'y établissait et, dans les bois qui tapissaient les versants, les goujats étaient au travail, ramassant des branchages pour en faire des fascines propres à combler les fossés, abattant des arbres pour en faire des échelles. Les beaux sapins, qui montaient autour de la ville menacée une garde si altière, perdaient leurs couronnes et s'abattaient avec des craquements douloureux, tandis que leur sève répandue mettait dans l'air empuanti d'huile chaude une odeur fraîche qui sentait le printemps.
    Presque tout le jour, Catherine demeura sur le rempart. Nicolas Barrai et Josse Rallard sur ses talons, elle parcourut le chemin de ronde, les tours de défense et de guet, inspectant les hourds, examinant les réserves de pierres, de flèches, de bois, les armes et les différents postes de combat.
    Le coup d'audace de l'abbé Bernard, récupérant le corps du malheureux messager au péril de sa vie, avait raffermi tous les courages, retrempé toutes les volontés, en admettant qu'elles en eussent besoin. La grande peur, presque sacrée, d'un moment avait disparu. Chacun avait l'impression profonde que Dieu lui-même combattrait avec lui quand l'heure en serait venue et Catherine, la première, était désormais persuadée de venir à bout de l'ennemi sans trop de peine.
    Une seule véritable angoisse lui restait : l'absence de son page qui n'était toujours pas rentré ; mais elle espérait vaguement qu'il avait pu avoir le temps, et le bon esprit, de se mettre à l'abri en rentrant chez sa mère.
    Honteuse de sa défaillance, Sara s'activait doublement au château, veillant aussi bien au train habituel de la maison qu'à pourvoir les réfugiés de tout ce qui pouvait leur rendre moins pénible leur déracinement momentané. Elle avait même offert son aide à l'abbé pour la toilette funèbre du frère Amable, car elle était habile, avec une lame tranchante et de l'huile, à ôter les pointes de flèches. Maintenant, le corps déchiré, lavé avec du vin et emballé d'une belle pièce de toile, reposait dans la crypte de l'église abbatiale, attendant les funérailles qui auraient lieu de nuit, afin que les moines pussent participer, dans la journée, à la défense de la ville, comme tous les autres habitants.
    Bientôt, il n'y eut plus rien d'autre à faire, pour les assiégés, qu'attendre et

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