Retour à l'Ouest
4 mètres, ce
qui atteste l’insalubrité, la promiscuité, la gêne pour tout le monde. Sans
doute a-t-on beaucoup bâti ; mais l’industrialisation et la dévastation
des campagnes par la collectivisation forcée ont plus que doublé la population
des villes. Les loyers sont très bas et ne peuvent pas ne pas l’être, étant
donné l’inconfort des logements et les bas salaires. Ils représentent moins de
5 % du budget d’une famille ouvrière ; leur montant ne suffit pas à l’entretien
des immeubles surpeuplés.
Les plans en cours d’exécution ne prévoyaient pas à cet état
de choses d’amélioration appréciable d’ici 1942… Ils ne prévoyaient pas non plus
les mobilisations successives, la construction de nouvelles fortifications dans
le Midi, la coûteuse et inhumaine conquête de la Finlande, l’aggravation de la
crise permanente des transports résultants de ces facteurs. À n’en pas douter, la
situation des travailleurs soviétiques a sensiblement empiré au cours des
derniers mois ; elle doit être particulièrement pénible à Leningrad, par
suite de la proximité du front de Finlande et de l’effort fourni par les
transports de la région. Nous sommes enclins à conclure que les travailleurs
soviétiques ne pourront reprendre leur marche vers plus de bien-être, interrompue
en 1928 par l’avènement de Staline, que lorsque l’expérience du totalitarisme
bureaucratique aura pris fin. Lorsque, en d’autres termes, ils seront redevenus
les maîtres de leurs destinées.
Lumières sur l’intervention
stalinienne en Espagne *
12 mars 1940
L’ancien ambassadeur de la République espagnole à Paris, Luis
Araquistáin, qui appartient à la gauche du parti socialiste dont Largo
Caballero est le leader, a publié récemment une brochure remarquablement
intéressante sur
Le Communisme et la
guerre d’Espagne
(en espagnol). On me dit qu’il prépare un livre
sur le même sujet. Souhaitons que cet ouvrage voie bientôt le jour. Nul doute
qu’il n’apporte sur des problèmes d’une brûlante et sanglante actualité des
lumières utiles… Que la guerre des deux Espagne ait été le commencement
véritable de la guerre européenne, nous paraît assez évident. Et il est
saisissant de constater que le rôle de l’URSS infortunée, gouvernée par Staline,
dans ces deux séries d’événements fut le même : un funeste rôle. C’est
probablement que les mobiles auxquels obéit le Fusilleur de Moscou ne varient
pas en eux-mêmes.
Je n’entreprendrai pas de résumer ici les vingt-cinq pages
denses de Luis Araquistáin sur l’intrigue stalinienne, ourdie par l’ambassadeur
Rosenberg et le PC espagnol pour provoquer la démission de Largo Caballero, au
moment où celui-ci mettait au point un projet d’offensive dont la réalisation
pouvait procurer la victoire à la République ; sur le rôle très
particulier des conseillers et des techniciens russes envoyés en Espagne ;
sur l’envoi à Moscou – en dépôt ! – de 510.079.529,3 grammes d’or (cinq
cent dix millions soixante-dix-neuf mille cinq cent vingt-neuf grammes et trois
dixièmes…) par le gouvernement Negrín ; sur les instructions politiques
envoyées par Staline, Molotov et Vorochilov à Largo Caballero… Relevons seulement,
en passant, que « bien des opérations militaires désastreuses, telles que
celles de Brunete et de Teruel, furent imposées par les conseillers russes
contre l’opinion des chefs espagnols les plus compétents… » Nous savons
que l’opération de Brunete répondait moins à un dessein stratégique qu’à des
besoins de politique intérieure : elle était nécessaire à un complot
stalinien que l’échec subi sur le champ de bataille fit avorter. Relevons ce
singulier détail : que M. Negrín, président du Conseil de par la
volonté des communistes, a refusé de rendre compte de l’emploi assigné à l’or
déposé à Moscou jusqu’au jour où un régime républicain sera établi en Espagne… Relevons
enfin que M. Alvarez del Vayo, ministre des Affaires étrangères du cabinet
Negrín, fit toujours une politique purement stalinienne. Nous le savions :
mais le témoignage de Luis Araquistáin nous est précieux par sa précision.
Jusqu’où alla la mainmise russe sur la malheureuse
république ainsi conduite à sa perte, on le verra par les détails suivants. Le
ministère de la Défense était, sous l’égide de M. Negrín, dirigé en fait
par trois sous-secrétaires
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