Révolution française Tome 2
beau
Le plus digne d’envie.
On l’exalte, en rapportant le sacrifice du jeune Avignonnais
Joseph Agricol Viala, commandant d’une petite garde municipale, Espérance de
la patrie, tué sur les bords de la Durance en tranchant, sous le feu des
royalistes, les câbles du bac qui aurait permis à ces aristocrates, à ces
Girondins – les uns valent les autres, dit-on ! – de franchir le fleuve, alors
qu’ils contrôlent les villages du Var, Toulon, et jusqu’au 25 août Marseille. L’armée
du général Carteaux réussissant à reprendre la ville, ce jour-là. Et les
représentants en mission, Barras et Fréron, entrent alors dans fa cité phocéenne
et commencent… à la « terroriser », à la piller, à la rançonner, Barras
exigeant que chaque famille aisée donne deux chemises, pour subvenir aux
besoins des troupes.
La terreur s’installe partout, sans encore être proclamée.
Elle naît de l’angoisse que suscite la situation dramatique
de la nation.
La famine est de nouveau menaçante.
Les Enragés dénoncent les « accapareurs, les gros
marchands, les propriétaires, les agioteurs, la horde barbare des égoïstes et
des fripons ».
Il faut traquer les suspects :
« Je t’exhorte à scruter les fortunes individuelles, dit
Jacques Roux. Ceux qui se sont enrichis depuis la Révolution, à une époque où
tous les bons citoyens ont fait tant de sacrifices, où ils se sont ruinés, ceux-ci
sont à coup sûr des égoïstes, des fripons, des contre-révolutionnaires. »
Et ces dénonciations visent Danton. N’a-t-il pas amassé une
fortune qui lui a permis de « doter » sa nouvelle épouse, Louise Gély,
de près de quatorze millions ?
Et n’est-il pas, lui, le corrompu, l’un de ces comploteurs
qui, à toutes les étapes de la Révolution, avec le ci-devant duc d’Orléans, avec
Dumouriez, et maintenant avec le général Dillon ont essayé d’entraver le cours
du fleuve révolutionnaire ? Et ne cherche-t-il pas, dans cet été 1793, à
faire évader Marie-Antoinette, à lui éviter de comparaître devant le Tribunal
révolutionnaire, où Robespierre puis Barère souhaitent la voir juger ?
« C’est le sommeil des républicains qui enhardit le
complot des royalistes », dit Barère à la tribune de la Convention.
C’est notre « trop long oubli des crimes de l’Autrichienne
qui leur donne l’espérance de rebâtir le trône royal parmi nous » !
La Convention applaudit, décide aussitôt de traduire la
veuve Capet devant le Tribunal révolutionnaire.
On la réveille dans la nuit du 2 août. On lui annonce qu’elle
sera transférée à la prison de la Conciergerie, et séparée de sa belle-sœur
Élisabeth et de sa fille, Marie-Thérèse – Madame Royale.
Elle n’est plus qu’une vieille femme, une mère accablée qui
ne voit plus son fils. Elle sait seulement qu’il a été confié au cordonnier
Simon.
À la Conciergerie, on la fouille, on l’enferme dans une
cellule, et deux gendarmes, placés dans la même pièce derrière un paravent, sont
chargés de la surveiller en permanence.
Elle semble indifférente, comme si elle n’appartenait déjà
plus à ce monde, paraissant ne pas se rendre compte que le concierge de la
prison organise, pour un bon prix, des « visites » de citoyens qui veulent
voir la veuve Capet ci-devant reine de France. Et cependant, on craint cette
femme brisée. On sait que les Vendéens espèrent qu’un jour le petit Capet sera
sacré Louis XVII.
Il faut leur montrer en châtiant Marie-Antoinette, en
traitant le fils Capet comme un citoyen ordinaire, que tout espoir de
restauration est illusoire.
Fersen peut bien se lamenter, écrire qu’il « ne vit
plus depuis l’incarcération de Marie-Antoinette à la Conciergerie » ou
bien que « mon plus grand bonheur serait de mourir pour elle et pour la
sauver, je me reproche jusqu’à l’air que je respire quand je pense qu’elle est
enfermée dans une affreuse prison », la ci-devant reine sera jugée.
Quant aux Vendéens, qu’ils n’espèrent rien, pour eux et leur
province, déclare Barère.
« Les forêts seront abattues, les repaires des bandits
seront détruits, les récoltes seront coupées pour être portées sur les
derrières de l’armée et les bestiaux seront saisis. Les femmes, les enfants et
les vieillards seront conduits dans l’intérieur. Il sera pourvu à leur
subsistance et à leur sûreté avec tous les égards dus à
Weitere Kostenlose Bücher